Artiste aux mutiples casquettes, Dave Luxe continu de tracer sa route entre références hip-hop et passion du vinyle, folie d’internet et musique électronique. Véritable professionnel du remix (ou « refix »), le belge exilé à Montréal excelle dans le traitement de la voix et des beats à écouter bien enfoncer dans le siège en cuir d’une berline de luxe. Il signe la quatrième édition de « Union Street Radio Mix » et répond à nos questions avec passion et intérêt, prêt à enfoncer le clou d’une carrière qui s’internationalise déjà.
Union Street : Présentes toi pour nos lecteurs qui ne te connaissent pas encore.
Dave Luxe : En quelques mots : Dave Luxe, DJ, producteur, ingénieur du son, bruxellois d’origine, expatrié à Montréal, je ne vous donnerai pas mon âge mais je suis dans le jeu depuis environ une décennie.
US : Comment est-ce-que tu décrirais ta musique ?
DL : Question difficile. Des beats sexy mais énergiques, parfois rythmés parfois languissants. Le genre de musique que tu veux avoir sur ta cassette pour chopper des meufs dans ta house party ou emmener ta copine faire un tour dans ta berline de luxe.
US : Tu as fait de nombreux remixs, je dirais même que c’est devenu une spécialité pour toi, qu’est ce qui te plaît dans cet exercice- là ?
DL : Contrairement à beaucoup de nouveaux producteurs je suis un DJ à la base, même si j’ai commencé la production assez tôt dans ma carrière.
J’ai toujours aimé faire des mashups, placer des acapellas sur des instrumentaux improbables (cf. mes premières mixtapes, maintenant introuvables, où je plaçais des acapellas de Dirty South sur de l’Eurodance).
Donc le remix est vraiment venu naturellement. J’adore partir d’une piste de voix et voir comme je peux l’habiller, soit en partant dans un délire complètement différent de l’original, soit en en refaisant le beat tel que j’estime qu’il aurait dû être si l’original est un peu naze…
C’est pourquoi je les appelle souvent des « Refixes ». Et j’utilise toujours des vocales dont la performance est hors du commun, ce qui n’est pas toujours facile à trouver autrement.
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« …Le genre de musique que tu veux avoir sur ta cassette pour chopper des meufs dans ta house party ou emmener ta copine faire un tour dans ta berline de luxe.… »
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US : Tu as sorti pas mal de mixtapes. Comment est-ce-que tu choisis tes morceaux et quel a été l’impact en terme d’exposition pour toi ?
DL : Ça se fait vraiment au feeling… Je passe énormément de temps à fouiner sur Soundcloud et sur le net, donc au moment de commencer une nouvelle tape j’ai en général plusieurs centaines si pas milliers de morceaux à parcourir.
Pour ne pas trop me perdre j’essaye de garder une vibe représentative de mon univers, même si ça me démange parfois de faire un mix 100% Funk ou 100% Footwork ou que sais-je. Et évidemment les mixtapes sont un bon moyen de diffuser en exclusivité mes productions, ce qui est important.
L’exposition vient de la production et surtout des remixes comme on le disait, les mixtapes sont juste un petit extra…
US : Tu viens de Bruxelles en Belgique. Parles nous un peu de la scène belge de « beat music » et « bass music ».
DL : Dans ces genres la scène Bruxelloise est plutôt embryonnaire, même si la tendance commence à changer avec des collectifs comme Futuristik Soul et Moonlight qui se bougent pour faire avancer les choses, ainsi que des clubs qui s’ouvrent aux nouvelles tendances malgré certaines réticences de leurs public.
Le problème à Bruxelles est que les gens veulent soit du très underground soit du très facile, il est difficile d’attirer les gens avec des concepts qui se situent entre les deux, ce qui est un problème pour les organisateurs évidemment.
Espérons que le public s’ouvre l’esprit dans les années à venir, en attendant moi je me suis tiré à Montréal !
US : Comment est-ce-que tu définirais le mouvement de « future beats » dont tu sembles faire partie ? Une musique hybride, entre hip-hop et musique électronique ?
DL : Je crois que tu as répondu à la question en la posant… Effectivement on peut parler de beatmaking façon Hip-Hop, avec des rythmiques très souvent inspirées du Sud des Etats-Unis, et des grooves à la J Dilla, mais dans lequel on a remplacé les samples de Soul ou de Jazz par des instruments électroniques.
L’idée étant de repousser les limites au niveau de la texture et de la composition en utilisant du matériel (hardware ou logiciel) de pointe. Evidemment certains producteurs vont avoir un son plus organique, plus proche de la New-Soul, et d’autres vont avoir un son plus progressif, psychédélique, saturé d’effets digitaux.
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« …Espérons que le public s’ouvre l’esprit dans les années à venir, en attendant moi je me suis tiré à Montréal !.… »
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US : Tu es actuellement au Canada. Parles nous un peu des connections que tu as pu faire là-bas. Tu as déjà sorti un remix des Anticipateurs par exemple, est-ce-que l’on peut s’attendre à d’autres collaborations de ce genre dans le futur ?
DL : Tout à fait. Je suis installé depuis quelques mois à Montréal, mais j’avais déjà eu l’occasion de venir y jouer plusieurs fois. J’avais rencontré des mecs comme Tommy Kruise, avec qui je suis un petit peu resté en contact.
Via la musique je suis également rentré en contact avec des mecs comme High Klassified, dont j’apprécie énormément le son. Une fois sur place les connections se font assez rapidement, c’est un petit microcosme tout le monde se connait donc c’est plutôt cool.
La scène est très dynamique, on trouve énormément de plateformes de diffusion et de promotion, ce qui manque cruellement par chez nous (quoique des gens comme vous essayent d’y remédier).
Je penses notamment aux homies de Saint Woods ou de Moto Made avec qui je travaille, ou encore des labels comme RAW Records. Je suis d’ailleurs en train de bosser avec Thomas White de RAW sur un morceau assez épique.
Avec Les Anticipateurs la connection s’est faite via Tarko de Booty Call Records, même si je jouais déjà leurs morceaux dans mes tapes il y a 2/3 ans. Tronel est devenu un pote, donc oui c’est possible qu’on bosse sur quelque chose par la suite !
US : On a pu te voir au côté des montpellierains de Set&Match qui préparent leur prochain album et que l’on connaît bien. Parles-nous de cette rencontre.
Bunk était rentré en contact avec moi il y a longtemps déjà, pour chopper des beats, et comme lui et son équipe sont très à l’affut de nouvelles sonorités, ça c’est fait plutôt naturellement.
Je suis également en contact avec Akeda leur DJ, puisqu’on évolue dans la même mouvance. Donc quand on a su qu’ils venaient jouer ici on a repris contact et on s’est capté tout de suite.
On a bien chillé pendant tout leur séjour et on en a profité pour taffer quelques beats à l’appart. On verra si ça se retrouvera sur l’album ou pas mais dans tous les cas c’était une bonne ride ! Big up à eux.
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« …Comment survivre en ligne avec un flot continu d’informations ? Ce sera sûrement la grande question de ce siècle… »
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US : Quel regard portes-tu sur l’effervescence autour d’internet et sur la multiplication des DJ/beatmakers qui sont sortis de l’ombre grâce à ce média ?
DL : Ecoute, c’est vraiment une arme à double tranchant. Etant plutôt « old school minded » je trouve ça un peu trop par moments, les réseaux sociaux et tout ça, en même temps ça m’a également permis de me faire connaître à moindre frais, donc je ne vais pas cracher dans la soupe !
C’est une vraie chance pour les jeunes de pouvoir accéder rapidement à la connaissance et à l’infrastructure requise pour produire de la musique, le problème étant que tout le monde veut s’y mettre et qu’on trouve des tonnes de morceaux approximatifs voire même bidons partout sur la toile.
Il faut de plus en plus de temps pour faire le tri soi-même, car si on ne se fie qu’aux médias (blogs etc) on passe à côté de la moitié des bons tracks…
Comment survivre en ligne dans un flot continu d’informations plus ou moins pertinentes ?
Ce sera probablement la grande question de ce siècle haha !
US : Parle- nous un peu du mix que tu as fait pour Union Street.
DL : Comme je le disais ça se fait au feeling, et toujours un peu en dernière minute haha. J’ai choisis des morceaux plus deep sur celle-ci, plus lents, je n’avais pas envie de me la jouer trop pop ou trop clubby.
Bien entendu on y retrouvera des remixes de gros anthems de rap sudistes, quelques morceaux plus clubby, et du son à moi, dans ce cas-ci un original nommé « Down 4 Whatever » qui sortira dans quelques semaines sur un nouveau label canadien nommé Pure Fortune.
US : Quels sont tes projets pour l’avenir ?
DL : Là dans l’immédiat je prépare ma première tournée US, pour la mi-août. Je suis en négociations pour signer en management avec une boite d’ici, on va voir ce que ça donne.
Sinon il faut absolument que je me trouve un bon tourneur, ou au moins un bookeur pour l’Amérique du Nord… Avis aux amateurs (rires).
Sinon niveau production j’ai 4-5 singles qui vont sortir cet été, je vais surement me faire un ou deux remixes aussi, puis il serait temps de commencer à bosser sur mon premier EP.
J’espère avoir le temps de plancher là-dessus avant la fin de l’année 2014, on verra bien… A suivre donc !
Interview : David Dupoirieux
Union Street remercie Dave Luxe pour ses réponses.
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