Titre original : A Million Ways To Die In The West
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Seth MacFarlane
Distribution : Seth MacFarlane, Charlize Theron, Amanda Seyfried, Liam Neeson, Giovanni Ribisi, Neil Patrick Harris, Sarah Silverman, Wes Studi, Evan Jones…
Genre : Western/Comédie/Aventure/Romance
Date de sortie : 2 juillet 2014
Le Pitch :
Albert Stark ne cadre pas avec son époque. Sensible, plutôt malin et davantage porté sur la bonne vanne que sur les fusillades, il jure franchement avec les codes violents du Far West. C’est d’ailleurs plus ou moins ce que lui dit sa petite-amie, quand elle le quitte pour un riche entrepreneur arrogant. Éploré, Albert n’a qu’une idée en tête : reconquérir sa dulcinée. Et c’est alors qu’Anna fait son entrée. Aussi belle que redoutable quand il s’agit de manier le colt, la jeune femme se propose de transformer le pleutre en fine gâchette. Albert voit là une occasion en or de prouver sa valeur. Mais c’était sans compter le passé de la mystérieuse Anna, qui ne tardera pas à rappliquer au galop sous la forme d’un célèbre et impitoyable hors-la-loi…
La Critique :
Seth MacFarlane est plus complexe qu’il n’y paraît. Connu comme étant le paternel de séries animées à succès comme American Dad ou Les Griffin, le bougre a également cartonné avec Ted, sa première réalisation. Une comédie absolument géniale, qui mit le box office à genou, tout en confirmant la flamboyance de la MacFarlane’s Touch, à savoir ce mélange de gags bien trash, de références à la pop culture, de clins d’œil savoureux et de bons sentiments assumés.
Le cinéma de MacFarlane brille alors par sa capacité à enchainer les vannes, tout en s’ancrant avec pertinence dans son époque, pour au final livrer un ersatz certes subversif, mais pour autant relativement fédérateur. Et cela même si au fond, l’humour de MacFarlane s’avère suffisamment décalé pour ne pas plaire à tout le monde. Le truc, c’est que le réalisateur/scénariste opte pour l’outrance. Il enchaîne. Si vous ne riez pas à cette vanne, vous rirez à la prochaine. Et si vous ne vous esclaffez pas non plus et bien attendez un peu, ça viendra. Et si ça ne vient pas, et bien c’est qu’au fond, vous vous êtes peut-être trompé de salle…
Quoi qu’il en soit, c’est après le monumental Ted, et avant Ted 2, que Seth MacFarlane s’octroie une escapade en plein Far West, à l’occasion d’un western parodique pour le moins burné.
Burné car au lieu de se reposer sur ses lauriers et battre le fer tant qu’il est encore chaud en enchainant directement sur Ted 2, MacFarlane tente autre chose. Dans les steppes arides de l’Arizona, pas d’ours en peluche doué de parole. Que des personnages en chair et en os, un chien, des chevaux, et des moutons. Si son premier film ne cherchait pas l’originalité en optant pour une trame scénaristique plutôt classique, il bénéficiait en revanche de Ted. Un personnage qui lui, était original, surprenant et diablement attachant. Un ours vulgaire et alcoolique dont le principal mérite est d’être parvenu à cristalliser l’attention du public, tout en conférant au long-métrage une identité forte.
Ce que possède Albert à l’ouest, c’est l’identité western et tous les codes et autres gimmicks qui vont avec. D’emblée, avec son générique en forme de carte postale épique, le film pose le décors. On est à la maison, comme à l’époque de Clint, de John et de Charles. Tout est là, rien ne manque. Prenant pied dans une petite ville, plantée au milieu des géants de pierre de la Monument Valley, la bourgade accueille les hors-la-loi, les filles de joie, les buveurs invétérés, les coyotes et toutes les gueules cramées par le soleil qui cadrent bien avec le paysage. Dans ce décors connu, MacFarlane débarque et s’approprie les codes, comme il sait si bien le faire. L’humour est immédiatement reconnaissable. Rythmé à la perfection, il fait avancer le récit, se répète pour le meilleur via quelques running gags pas piqués des vers, et n’hésite pas à verser dans le vulgaire qui tache, tout en fourmillant de surprises. À ce sujet, sans en dévoiler une miette, le film contient une vraie pépite, à destination des cinéphiles. Une séquence absolument géniale, parfaitement intégrée, qui illustre la maestria d’un réalisateur/scénariste suffisamment malin et roublard pour faire sien, un univers dans lequel il n’a jamais mis les pieds auparavant et régaler au final les geeks et autres amoureux du septième-art portés sur la pop culture.
Pour la première fois, avec Albert à l’ouest, Seth MacFarlane réalise, écrit, produit et joue le rôle principal. Il y avait peut-être un peu de quoi craindre cette soudaine mise en avant, mais en fait, non, ça passe comme une lettre à la poste. Suffisamment charismatique, MacFarlane a de toute façon façonné le personnage d’Albert à son image. Réaliste, il n’a pas opté pour le héros vertueux ou pour le bad boy badass, mais pour le gentil looser qui vient de se faire lourder par sa meuf. Un (anti)héros dont l’un des principaux mérites est de laisser les coudées franches aux autres acteurs. Que ce soit Charlize Theron, décidément à l’aise dans la comédie, y compris « ce genre » de comédie, ou Liam Neeson, lui aussi parfait en hors-la-loi violent, en passant par la géniale Sarah Silverman (trop rare au cinéma), ou encore Neil Patrick Harris, qui joue ici une partition qui n’est pas sans rappeler (et c’est une bonne nouvelle) le Barney de How I Met Your Mother. On pourra toujours noter que les personnages qui peuplent ce Far West fantasques ne sont pas profonds, mais là n’est pas la sujet. Tous servent le même objectif, à savoir faire rire, et tous apportent leur pierre à un édifice finalement très ambitieux.
Dégueulant de classe par tous les pores, grâce à un casting au poil (mention à Amanda Seyfried, à l’origine d’une vanne tout à fait brillante), Albert à l’ouest embrasse et embrase le western. Il s’agit d’une comédie certes, d’une romance par moment, mais aussi d’un véritable western. MacFarlane se fait plaisir et case tous les éléments qui font d’un western, un western avec un grand W. Y compris du côté des indiens ! Grand n’importe quoi maitrisé, le film s’apparente à un hommage. Une parodie intelligente et savoureuse, qui prouve qu’elle comprend l’univers dans lequel elle se positionne, en se permettant suffisamment de superbes écarts de conduite pour exister en tant que telle et non se limiter à un exercice de style excluant.
Avec ses vannes hilarantes, ses gimmicks jouissifs, ses acteurs et leur bonne humeur contagieuse, sa violence gore outrancière et la vivacité de son discours (un exemple ? Les photos sur lesquelles personne ne sourie, car à l’époque, il était de bon ton de tirer la tronche quand on se faisait photographier), Albert à l’ouest fait carton plein. Il pourra néanmoins déstabiliser, car à l’instar de Ted, Albert n’évite pas certains clichés. Au fond, le film est surtout une comédie romantique au sujet d’un type cherchant à s’affirmer. Avec tout ce que cela comprend de scènes « formatées », que le réalisateur prend plaisir à bousculer à l’aide d’un humour vivace et impromptu.
C’est d’ailleurs sans aucun doute ce désir de ne pas chercher à transcender à tout prix les codes du genre auquel il s’attache, qui attire les foudres de certains critiques sur MacFarlane. Plus académique que prévu, plus subversif qu’il n’y paraît, Seth MacFarlane cherche avant tout à faire rire. Son cinéma est en cela très américain. Très axé sur un modèle ancestral de divertissement populaire. Dans le bon sens du terme. Rien de mal à ça.
La différence est encore une fois dans un humour frondeur et inventif. Albert à l’ouest est à l’image de son créateur. Il rit de tout, y compris de lui-même. Et encore une fois, mieux vaut prévoir un stock de couches ! Finalement, le seul vrai défaut d’Albert à l’ouest est son titre français, vraiment à côté de la plaque.
@ Gilles Rolland