Agnès Martin-Lugand : Entre mes mains le bonheur se faufile

Par Stephanie Tranchant @plaisir_de_lire

Entre mes mains le bonheur se faufile d’Agnès Martin-Lugand  3,75/5 (25-06-2014)

Entre mes mains le bonheur se faufile (336 pages) est sorti le 5 juin 2014 aux Editions  Michel Lafon.

L’histoire (éditeur) :

Depuis l’enfance, Iris a une passion pour la couture. Dessiner des modèles, leur donner vie par la magie du fil et de l’aiguille, voilà ce qui la rend heureuse. Mais ses parents n’ont toujours vu dans ses ambitions qu’un caprice : les chiffons, ce n’est pas « convenable ». Et Iris, la mort dans l’âme, s’est résignée.
Aujourd’hui, la jeune femme étouffe dans son carcan de province, son mari la délaisse, sa vie semble s’être arrêtée. Mais une révélation va pousser Iris à reprendre en main son destin. Dans le tourbillon de Paris, elle va courir le risque de s’ouvrir au monde et faire la rencontre de Marthe, égérie et mentor, troublante et autoritaire…

Mon avis :

Le premier roman d’Agnès Martin-Lugand (Les gens heureux lisent et boivent du café) avait reçu de bons retours  (jusqu’à même être un coup de cœur chez de nombreux lecteurs), je n’ai pas hésité une seconde lorsque l’on m’a proposé de découvrir son tout dernier titre sorti il y a quelques jours. D’autant que les premiers échos étaient déjà très bons.

Passionnée depuis toujours par la couture, Iris garde au fond d’elle la déception de n’avoir réussi à intégrer l’école lui permettant de faire de sa passion sa carrière. A 31 ans, elle est employée commerciale dans une banque, mariée à un médecin depuis 10 ans et cadre parfaitement au moule de perfection que sa famille imagine. Quand, lors d’un déjeuner dominical chez ses parents, elle apprend que sa candidature avait été acceptée, l’échec qu’elle croyait n’était en réalité qu’une supercherie de ses parents qui ne considéraient pas la couture comme un bon avenir pour leur fille.

Après le choc, le profond sentiment d’injustice, la colère et l’incompréhension, elle réfléchit à ses rêves et son talent et, sur un coup de tête, choisit de démissionner. Elle obtient une place pour une formation de six mois de perfectionnement en couture et un compromis est trouvé avec son époux: six mois de formation à Paris contre un bébé. Pierre peu enclin à cette vie parisienne et à voir ce hobby empiéter sur la vie familiale lui accorde donc cette formation à l’Atelier mais en échange elle devra se consacrer à la maternité dès ses cours terminés. Mais Iris est plus que passionnée, elle est douée….

L’intrigue que l’on voit venir facilement est agréable à lire et somme toute à découvrir car Agnès Martin-Lugand  arrive à surprendre avec des révélations fortes dont je ne me suis pas doutée. Les dialogues sonnent juste et l’écriture de l’auteure est extrêmement fluide. A travers son histoire porteuse d’espoir, elle parle efficacement des rêves inachevés, de l’amour, de compromis et de la construction de soi.

On sent dès le départ qu’Iris  n’est pas heureuse, pas faite pour cette vie professionnelle et personnelle (son couple bat de l’aile et le dialogue est de moins en moins présent avec Pierre qui ne croit pas en son talent). On s’attache facilement à elle, admirant son don pour la couture, la création et la mise en valeur de la femme. On lui souhaite forcément de réussir (à s’éloigner de son grenier) et surtout de s’épanouir. Elle flirte avec ses rêves et la passion, tout en tentant de garder les attaches nécessaires pour sauver son couple. 

Quel couple d’ailleurs ? Pierre le médecin, celui qui ne vit que pour son travail et qui  impose à celle qu’il aime de renoncer à une vraie carrière professionnelle épanouissante et enrichissante. Est-elle prête à renoncer à Paris, à Marthe, sa mécène, celle par qui tout devient possible, et à Gabriel, le séducteur qui réveille des sentiments éteints depuis longtemps. Pas facile pour Iris de trouver son chemin.  Alors dans cette quête d’identité, elle va devoir prendre des décisions cruelles, légitimes, terribles et passionnées.

J’ai passé un bon moment avec ce roman. Une fois commencé, on est agréablement pris dans les mots d’Agnès Martin-Lugand  qui filent tout seul. Si son style coule, j’ai trouvé quand même qu’il manquait d’émotion. Les sentiments arrivent par le biais de l’intrigue (et des rebondissements) mais j’aurais aimé trouver une écriture plus poétique, une narration plus exaltée qui m’aurait fait battre intensément le cœur.

Certains personnages caricaturés (surtout les mâles et en particuliers l’époux distant) pourront agacer quelques lecteurs, tout comme la passivité d’Iris bien trop marquée. Pour ma part, j’ai centré ma lecture sur la réalisation de son rêve, sur sa renaissance (sur tous les plans) et à tenter de percer le personnage de Marthe qui est tout en ambiguïté. A la fois généreuse, possessive, charismatique (belle et intelligente) et reste terriblement secrète pour Iris et pour le lecteur. Elle est déconcertante et apporte un soupçon de mystère à l’histoire, tandis que Gabriel s’occupe de la séduction.

Entre mes mains le bonheur se faufile est une belle histoire qui se lit d’une traite, grâce au style simple et direct de l’auteure et à l’intrigue accrocheuse qui réserve quelques surprises.