Entretien avec Matthieu Meyer
Signal un festival pointu à destination du grand public. Quelle est la genèse de ce projet, quel en est l’objectif, quels sont les publics visés ?
A l’origine Signal c’était une soirée club que j’ai monté avec Jeremy du collectif Exploration. On avait envie de monter un truc un peu différent en invitant des artistes qu’on aime beaucoup et qu’on ne voit pas forcément très souvent, voire rarement (Forward Strategy Group, SHXCXCHCXSH, Akkord, Clouds, Samuel Kerridge, etc). L’idée était de faire des programmations assez éxigeantes et radicales, en essayant de les faire découvrir à un public assez large.
Depuis SIGNAL s’est développé au gré de nos envie. Notamment avec la série Signal Live, des performances techno & vidéo à la limite de l’expérimentation, en début de soirée, pour sortir du format club. Ou encore avec Signal Tv, des lives à la Karambole, retransmis en direct sur Dailymotion.
Au milieu de tout ça, comme on a la chance d’avoir un espace en plein air assez magique avec LaPlage et le club Glazart juste à côté, l’idée est née de monter un petit festival toujours avec cette même vision, mais cette fois on a demandé aussi à nos potes de Noctua de bosser avec nous pour organiser tout ça.
Signal met en avant depuis peu le live techno, notamment à des horaires de concert. Quel est la visée ? Quelle place le live techno aura-t-il dans le festival ?
L’idée de Signal Live à l’origine vient de l’envie de programmer certains artistes qu’on adore, toujours assez exigeants, des gens comme Kangding Ray, Demdike Stare, Actress, Mondkopf, etc. Le fait de choisir ce format, vient d’une part du fait que ce sont des artistes techno qui ne sont pas tournés vers le dancefloor, donc c’est difficile de les programmer sur une soirée à 3h du matin (bien qu’on l’ai fait avec Kerridge et son live super expé, c’était une très bonne expérience, un peu dure pour le public…). D’autre part, en club on a forcément à faire à un public qui ne vient pas que pour la musique. Ils viennent danser, s’amuser, rencontrer des gens, se défouler, etc. Le public est fatalement moins captif, c’est pas un reproche, c’est normal, c’est juste une ambiance différente.
Avec Signal live, on voulait recentrer le truc sur la musique. Sur un format concert, les gens viennent vraiment pour voir la performance d’un artiste (et ils sont vachement plus sobres haha !).
L’idée c’était aussi de développer l’interaction musique/vidéo, notamment à travers la création du quatuor DASEIN, entitée mêlant les 2 arts, où la vidéo agit sur la musique et inversement, le tout en live. Ca nous a permis aussi de travailler une autre configuration de la salle, en supprimant la scène (remplacée par un écran géant) et en plaçant les artistes au fond de la salle et non sur scène.
Mais bon, il y a encore du chemin à faire, ça reste super compliqué de faire déplacer un public pour ce genre d’événement et on doit faire face à des réalités économiques. On verra ce que ça donnera à le rentrée, mais il est clair qu’on a très envie de continuer sur cette voie.
Quelles leçons ont été tiré de l’année passée ? Passer à quatre jours c’est s’inscrire dans la lignée d’autres festivals type Weather ?
En fait c’est la toute première édition du festival, le projet Signal dans sa globalité étant né il y a tout juste un an. Pour le choix des quatre jour, en vrai il ne faut pas aller chercher trop loin, ça s’est décidé avec le calendrier et les lieux à dispo, à savoir Glazart et LaPlage qui nous permettent de jongler entre plein air et intérieur et des jauges allant de 600 à 1500 places. Et pour les jours, on s’est aperçus que cette année le 14 Juillet tombe un lundi, ça faisait un beau week-end, quatre jours pour dévoiler les facettes parfois différentes qui animent le projet Signal.
Concernant la programmation… on reconnait les marottes de Signal, la résidence techno. Peux-tu la présenter globalement ? Entre Zadig et la team Dement3d, quelle est la trame ?
Globalement, on retrouve tout ce qui fait l’entité Signal: des lives et dj sets d’artistes pointus, généralement des sons techno exigeants, parfois assez durs comme avec l’écurie Grounded Theory ou Dement3d, mais aussi des choses moins « dancefloor », plus electronica, avec Bruma, Horla ou Vophoniq. On y fait aussi la part belle a de jeunes (ou moins jeunes) artistes français comme [HXB] ou Full Quantic Pass, il nous semble essentiel de ne pas proposer un catalogie de gros noms étrangers mais plutpot de montrer qu’on a une scène en plein développement avec des artistes talentueux.
Et c’est pour aller dans ce sens qu’on a aussi donné carte blanche à 4 labels parisiens pour la partie « nuits » de la programmation, avec Syncrophone, Construct Re-Form, Infiné et Dement3d. Ces labels sont une véritable force et regroupent des gens très talentueux, ça aurait été con de ne pas les inviter !
Ensuite, comme il est important d’avoir un certain équilibre, on ne peut pas mettre en avant une programmation uniquement faite de sons techno chelous, d’où une programmation qui va aussi chercher des artistes tout aussi talentueux mais plus house, dansants, comme Vakula, Pit Spector ou Borrowed Identity.
Du point de vue d’un organisateur, comment mesures-tu l’explosion de la scène techno actuellement ? Est-ce un phénomène de mode ou un vrai engouement durable, ne concernant pas juste des drogués qui aiment le boumboum ?
C’est toujours très compliqué de répondre à ce type de question, qui sait de quoi l’avenir sera fait ? Je pense qu’il y a indéniablement un phénomène de mode, qui est valable pour le public comme pour les organisateurs de soirées, les clubs, etc. Mais j’ai l’impression que ça va au-delà de ça. Quand on voit le nombre de labels qui existent, ceux qui se créent, et surtout le nombre d’artistes locaux talentueux qui émergent en ce moment, ça ne pas être qu’une passade. Il y aura forcément un moment ou le soufflé va retomber, mais ça ne veut pas dire que la scène techno va se réduire à peau de chagrin, je pense que dans tous les cas les gens sont en train d’être éduqués et si ce n’est pas le cas pour tous, ce qui se passe en ce moment va forcément influencer pas mal de monde pour la suite.