Communiqué du Nouveau Théâtre de Montreuil
Où sont passés les mots et le vocabulaire qui constituaient un corpus commun avec lequel il était possible de bâtir et d’imaginer les mondes de demain. Ces mots étaient : mutualisation, protection sociale, éducation, services publics, justice !Un ensemble de valeurs qui tendait à construire une société de biens communs dans laquelle l’intérêt général primait !Le nouvel accord Unédic du 22 mars 2014 touche l’ensemble des chômeurs, qu’ils soient au régime général, intérimaires ou intermittents (1) du spectacle. Nous sommes donc tous concernés !Tel qu’il est proposé aujourd’hui, cet accord va à l’opposé de ces valeurs et du socle sur lequel une société peut se construire et se projeter. Depuis des années, le M.E.D.E.F. s’acharne à mettre à mal en s’attaquant, par tous les moyens possibles, à la philosophie de solidarité et de mutualisation qui en sont les bases et les fondations. Cette réforme répond à une logique idéologique où l’exclusion – particulièrement des plus faibles – est la règle. Un système où les plus fragiles se font broyer par un libéralisme au cynisme à peine voilé.Agir donc, pour arrêter la broyeuse afin que l’ensemble des citoyens puisse bénéficier d’une protection sociale juste. Faut-il, une fois de plus, rappeler que 6 chômeurs sur 10 ne sont pas indemnisés ?Ce débat qui s’engage dépasse, en effet, de loin les revendications d’une corporation arc-boutée sur ses acquis sociaux et s’étend à l’ensemble de ceux et celles qui ne veulent pas d’un monde qui bat uniquement au rythme de la finance et de la rentabilité. C’est-à-dire celui d’un monde où la valeur marchande serait l’unique critère, d’où découlerait une société totalement déshumanisée. Une société incapable de se projeter et de s’inventer un avenir commun, de se concevoir une histoire commune.L’art et la culture sont vecteurs d’émancipation et de lien social et participent pleinement à la construction d’un imaginaire nécessaire pour s’inventer une histoire commune.Les annulations qui se profilent n’amputeraient pas seulement ce pouvoir d’imagination. Elles seraient une véritable catastrophe pour les acteurs impliqués – équipes artistiques, spectateurs, institutions, villes – d’un point de vue artistique, humain mais aussi économique. Car, oui, la culture est aussi un vecteur de richesse économique ; elle « rapporte » près de 21 milliards d’euros de valeur ajoutée par an pour la France (2) !On ne peut donc se résoudre à cette alternative même si une action commune et déterminée peut apparaître comme l’unique solution pour infléchir l’intransigeance de l’actuel gouvernement.Concernant le régime spécifique des intermittents, il y a pourtant d’autres solutions. Des solutions pensées par un comité de suivi qui a su réunir autour d’une même table professionnels, partenaires sociaux, experts, parlementaires de tout bord. Ils ont, depuis 2003 lors du précédent mouvement social, inventé, imaginé, construit un système d’allocation chômage réaliste et concret, qui défend bec et ongles l’idée d’une société du bien commun. Mais, encore une fois, ces propositions pourtant plus justes n’ont pas été retenues.C’est au nom de cette justice que nous demandons au gouvernement de revenir tout simplement en arrière et de ne pas entériner l’accord du 22 mars qui fragilise globalement notre société et qui a un impact désastreux dans les domaines de l’art et de la culture.Mathieu Bauer, Fériel Bakouri et toute l’équipe du C.D.N. de Montreuil26 juin 2014Recueilli parLes Trois Coups
(1) Ce sont les techniciens (annexe 8) et artistes (annexe 10) qui alternent des périodes de travail salarié et de chômage dans les domaines du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel.L’accord Unédic du 22 mars 2014 modifie notamment le différé (le délai de carence entre la perception des derniers revenus et le versement des allocations chômage), qui retarde l’ouverture des droits au chômage. Celui-ci concernera désormais près de la moitié des allocataires (contre 9 % actuellement).(2) In L’apport de la culture à l’économie en France (Inspection générale des Finances / Inspection générale des Affaires culturelles).
Nouveau Théâtre de Montreuil-C.D.N. • 10, place Jean-Jaurès • MontreuilMétro : ligne 9, Mairie-de-MontreuilRenseignements / réservations : 01 48 70 48 90