M.Juncker est président de la commission européenne. Sa désignation a fait l'objet d'une bataille, dont il n'est pas facile de comprendre les enjeux réels.
M.Cameron s'en est pris personnellement à M.Juncker. Il avait deux griefs. Tout d'abord, M.Juncker est un fédéraliste. Or, M.Cameron pense que l'UE est une bureaucratie inefficace. Il estime que les dernières élections européennes lui donnent raison. Le peuple a exprimé un jugement sur l'Europe. Ensuite, M.Juncker est le choix du parlement européen. Jusqu'ici, le président de la commission était désigné par les chefs d'Etats. Or, pour M.Cameron, seuls eux sont légitimement élus pour prendre ce type de décision. Le parlement européen, lui, ne l'est pas. A tout ceci, M.Cameron a ajouté le chantage. Si vous ne démantelez pas l'UE, alors les Eurosceptiques vont sortir l'Angleterre de l'UE. Et ça, ça ce serait un retour à l'âge des ténèbres. L'obscurantisme français n'aurait plus de contre-poids.
A cela, il faut ajouter que l'opinion anglaise approuve ce tissu de sophismes. En particulier, une BBC qui n'est plus que l'ombre de sa rigueur journalistique passée.
Résultat. M.Cameron s'est retrouvé isolé, seul aux côtés d'une Hongrie qui sent quelque peu le soufre, contre le reste de l'UE. En particulier, il a été lâché par ses alliés usuels. Ils ont considéré ses gesticulations malséantes.
Que va-t-il arriver maintenant ? Probablement rien. M.Cameron voulait probablement se faire aimer de son opinion publique. Il lui a donné un beau spectacle. Il peut lui dire qu'il s'est bien battu. En fait, seule Mme Merkel compte. Non seulement parce qu'elle dirige le pays le plus fort, mais aussi parce que l'UE est une démocratie allemande. Donc, que pense Mme Merkel ? Les journaux anglais estiment qu'elle veut une Europe libérale, comme M.Cameron. L'impuissante France, qui attend tout des autres sans avoir le courage de ne rien faire, craint probablement que ce soit vrai. Or, je soupçonne que le principe de gouvernement de Mme Merkel est le consensus. Elle veut que l'Angleterre et la France, et les autres, trouvent leur place dans une Europe qui respecte les intérêts allemands. C'est cela le modèle allemand. Si j'ai raison, elle va donc essayer de faire ce qu'il faut pour conserver l'Angleterre dans l'UE. Elle pardonnera même à M.Cameron de s'être comporté comme un ministre français.
(Un compte-rendu de l'affaire. Quant à M.Renzi n'aurait-il pas tout compris à cette logique germanique ? Il demande un aménagement du pacte de stabilité qui permettrait une relance keynésienne, sans faire perdre la face aux intégristes de la rigueur.)