La deuxième partie de notre interview avec Para One.
Tu as fondé Marble avec Surkin et Bobmo mais tu étais dans un autre label avant. Comment en es-tu arrivé à changer ?
Para One : J’étais sur Institubes comme artiste fondateur mais je n’étais pas vraiment dans le staff. Je n’ai jamais été impliqué dans le financier et je savais que ce n’était pas mon truc. Je n’avais pas envie de m’impliquer là-dedans mais je faisais partie du crew Institubes et on était une vraie famille.
Avec Marble, tu as changé de rôle ?
Je suis plus impliqué dans la gestion du label et on a été rejoint par Canblaster et Myd. Maintenant, c’est une hydre à cinq têtes. Je considère que ce n’est pas vraiment mon métier de développer d’autres artistes mais j’apprends à m’impliquer. C’est très intéressant de comprendre comment élaborer une stratégie et j’avais négligé ce genre de choses. J’apprends ces choses-là seulement maintenant.
Par exemple, Surkin et Bobmo sont plus jeunes que toi. Comment vois-tu cette nouvelle vague de l’électro français ?
A mon avis, Surkin et Bobmo ne sont pas dans cette nouvelle vague qui arrive car ils approchent déjà de la trentaine (rires). Derrière, il y a la génération de Canblaster, Myd, Club Cheval, Bamboonoo ou ClekClekBoom. Moi, j’ai foi en eux et je pense que c’est un crew de gens qui donne beaucoup d’espoir. Ils ont une vraie culture et une vraie envie de nouveautés. Ils ne rejouent pas éternellement la même chose. Ce sont des personnalités très fortes et très intéressantes. A mon avis, il va se passer des choses dans les prochains mois ou les prochaines années.
Vous avez une certaine proximité avec Bromance. Il s’agît d’une amitié et d’affinités musicales ?
Totalement. En fait, Bromance, c’est un peu la famille avec Zone, San Pellegrino ou ClekClekBoom. C’est un mélange entre affinités humaines et musicales. Après, on est tous différent avec des esthétiques différentes. Chacun sort la musique qu’il veut mais quand on se retrouve sur des plateaux à l’étranger, c’est une vraie force. Les gens voient débarquer les Français. A une époque, c’était Ed Banger, Kitsuné et Institubes. Aujourd’hui, c’est Bromance, Marble, etc. Par exemple, au Nouvel An, je suis allé à Montréal et à New York avec Brodinski, Gessaffelstein et The Hacker. On a proposé un vrai plateau, on ne se foutait pas de la gueule du monde. Finalement, tous les genres de musique électronique étaient abordés avec des trucs dark, house, rap et il y a une cohésion dans tout ça même si ce ne sont que des personnalités fortes et autonomes.
Et êtes-vous bien reçus par le public étranger ?
Grave ! On a encore fait une soirée à Miami, ça cartonnait !
Je reviens vers ton album, je t’avais déjà posé quelques questions dessus mais j’en ai encore. Pourquoi as-tenu à faire une version live, Club, de ton album Passion ?
J’ai pas vraiment tenu à le faire, c’est venu tout seul. Je me suis rendu compte que ça pouvait être intéressant et je n’ai pas envie de sortir un disque si ce n’est pas le cas. Aujourd’hui, j’ai mis les deux pochettes côte à côte car j’essaie de trouver ce qui relie et sépare les deux albums. Il n’a jamais été question de sortir un album de remix pour faire l’actualité et faire des dates. Si c’est pour faire ça, je n’en ai pas besoin car j’ai des dates. C’est plus sincère que ça, c’est vraiment une volonté de transposer des morceaux pour le live et y compris des morceaux pas du tout dancefloor. En le faisait, je me suis rendu compte que l’exercice me passionnait et donc, j’ai presque tout fait en un mois. J’étais concentré pour que cela sonne et tu sais, quand tu fais un track pour le jouer en live dans deux jours, tu te creuses pour que ça claque et que le son soit fat. Une fois que j’ai tout fait, en mettant les deux albums en rapport, c’était intéressant d’avoir un même titre qui sonne très différemment. C’est devenu une sorte de diptyque avec Passion, la version maison et Club.
Tu vas pouvoir m’éclairer, je me suis toujours demandé comment un DJ choisit son DJ set. Pourquoi choisir d’autres morceaux qui ne sont pas de toi mais dont tu as l’envie de jouer en live ?
Justement, c’est marrant parce que je viens de faire un DJ set samedi dernier, à Bordeaux. J’ai joué deux heures et quart, j’étais super content de mon DJ set avec l’intégration de mes propres morceaux à des morceaux du passé. J’adore jouer des vieux morceaux dont des titres de techno datant d’il y a vingt ans. J’aime mettre en relation le passé et le présent, le très vieux et le très récent. A mon avis, c’est pour cela que je m’exprime mieux en DJ set qu’en live. Je trouve ça plus intéressant à l’heure actuelle car il y a vraiment des rencontres musicales plus fortes que dans un live. Le live, c’est une représentation de ton univers et de toi. Tu vois, c’est cool d’en faire et d’aller voir des lives mais pour moi, la musique de club doit se jouer dans le noir avec un DJ invisible et les gens doivent découvrir quelque chose mais aussi reconnaître.
C’est donc une façon de partager la musique que tu aimes…
Bien sur ! J’aime jouer la musique des autres et si cela ne tenait qu’à moi, je ne jouerai que la musique des autres (rires). Je ne suis pas si imbus de ma musique que ça. Je la trouve pas mal mais j’adore jouer la musique des autres. Comme tout musicien, je suis fan de musique avant tout.
Du coup, as-tu certaines influences ou des morceaux dont tu as vraiment envie de faire partager ?
Il y en a plein avec tous les classiques comme la techno de Detroit ou la house de Chicago. Pour les gens de ma génération, c’est ce qui nous a nourri. Il y a des références à ça dans mon album. Il y a encore peu de temps, je jouais un morceau de E-Dancer que je trouve complètement fou. Cela me fascine de me demander comment il pouvait y avoir de la musique qui sonne aussi bien et que tu peux jouer aujourd’hui alors que cela a vingt ans. Pour moi, cette génération de visionnaires de techno afro-américaine est un mystère. Comment toute une génération de mecs a pu être aussi brillante dans un espace et un temps si concentré ?
Aurais-tu une recommandation musicale ?
En ce moment, il y a une nouvelle génération à Detroit avec Jay Daniel. Ils sont de Detroit mais font de la musique sous influence de Jay Dilla. C’est la house et de la techno avec un esprit MPC. Cela me parle totalement à cause de cela, c’est vraiment le meilleur de deux mondes et en ce moment, je pense que les trucs les plus stylés viennent de là !
Une dernière chose à ajouter ?
Je suis très heureux de ce qu’il se passe avec l’album ou le clip. J’ai l’impression qu’il y a quelque chose d’assez sincère de la part des gens s’appropriant le truc. Je suis flatté !
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