Les techniciens à l’œuvre pour l'assemblage du dragon de bois de l'aire de jeu conçue par le Japonais Kinya Maruyama
Peu à peu depuis le début du mois de juin, Nantes se prépare à lancer son invitation au voyage. Comme tous les habitants, je vois peu à peu apparaître les équipes techniques et artistiques, leurs véhicules plein de matériel et leurs grues... les installations qu'il reste à mettre en place sont conséquentes. Dans les douves du château des Ducs de Bretagne, un broussailleux labyrinthe fait de branchages prend forme. Signé de l'américain Patrick Dougherty, il évoque par endroits ces jardins fantasques du XVIIIè siècle. Depuis le 9 juin, les services municipaux des espaces verts épaulent l'artiste lui-même et l'appui des quelques bénévoles n'est sûrement pas superflu lorsqu'on découvre, jour après jour, quelles quantités de branches de saule sont acheminées ici.
La Mutualité, future "Villa Occupada" encore en transformation...
Autre surprise réservée par cette édition 2014 : la Villa Occupada. Au cœur du très élégant quartier Dobrée, une vingtaine d'artistes d'Amérique du Sud débarquent dans les locaux de l'ancienne Mutualité. Se revendiquant tous comme héritiers directs du muralisme, ils mettent une joyeuse pagaille depuis qu'ils se sont attaqués aux façades de l'immeuble. Un mouvement bien apprécié dans le quartier malgré les petits embouteillages générés aux heures de pointe. Les étages bruissent d'une activité qui éveille la curiosité des passants. Square Mercœur, le Japonais Kinya Maruyama travaille déjà depuis plusieurs mois à la construction d'une aire de jeux totalement onirique. Évoquant un dragon de bois, elle sinue à travers les arbres et pourra accueillir très bientôt les marmots téméraires. On pourrait citer également la projection monumentale préparée par Ange Leccia sur le canal Saint Félix, et représentant une troublante nymphe prisonnière du tunnel qui enserre l'Erdre avant de la mener vers la Loire. Expositions, concerts événements, stations-gourmandes disséminées en ville pour le plus grand bonheur des adeptes de la cueillette improvisée, enseignes des magasins poétiquement chamboulées, redécouvertes d’œuvres oubliées dans les collections de certains musées, se succéderont tout l'été. Face à ce foisonnement, mieux vaut jeter soi-même un œil au programme.
Écrasée par le soleil, l’œuvre bientôt achevée de Patrick Dougherty dans les douves du château.
Le Voyage à Nantes met, depuis 2012, ainsi l'accent sur un "art de l'irruption, afin de constituer une trame sur un territoire urbain et naturel en mutation depuis l'arrêt des chantiers navals. Tout doit permettre "l'appropriation individuelle et collective du paysage que les œuvres font valoir en retour". C'est l'un des enjeux du Voyage à Nantes. Sans doute le plus noble. Il est plus malaisé d'évoquer "la mise en tourisme" (sic) que constitue l'opération. D'autant qu'il est encore plus malaisé d'évaluer les retombées économiques précises que revendique le Voyage à Nantes, société publique locale. Plus certains, le Voyage à Nantes a effectué 80% de ses dépenses de fonctionnement et d'investissement auprès de 1200 entreprises des Pays de la Loire pour un montant atteignant environ 20 millions d'euros TTC. Les chiffres parfois évoqués nourrissent, localement, les débats à l'heure où tous les budgets se resserrent.
La ville de Nantes et la Communauté urbaine ne ménagent effectivement pas leurs efforts pour amplifier les effets positifs de ce qui fut initialement une biennale d'art contemporain s'étalant sur tout l'estuaire de la Loire. Point fort, au fil des ans, le Voyage à Nantes se bonifie des singularités artistiques des années passées, y compris de la Biennale. C'est le cas de la désormais célèbrissime Maison dans la Loire de Jean-Luc Courcoult, élégamment envasée dans les flots près de Couëron depuis 2007. D'autres œuvres demeurent pérennes. C'est le cas du Nid, œuvre de Jean Julien et belvédère très couru, qui a fait de la tour de Bretagne un site incontournable pour contempler la ville et le début de l'estuaire.
Si les budgets semblent conséquents, ils ont indéniablement contribué à faire de Nantes une ville dont l'image s'est fortement renforcée à l'échelon européen. Et la multiplicité des propositions est ambitieuse. Difficile de bouder son plaisir, donc. Rendez-vous le 27 juin pour la Nuit du VAN, qui marquera l'ouverture de cette nouvelle édition du Voyage à Nantes.
Cyril P.
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