La personnalisation de la vie politique s’est substituée au débat, à la
confrontation d’idées et en corollaire, à l'idée même de consensus.
Cette personnalisation, nous la devons à l’élection présidentielle renforcée
par le quinquennat.
L’élection présidentielle est la seule échéance électorale qui compte
vraiment et à l’issue de laquelle, un camp obtient la garde du pouvoir pendant
5 ans. Entre deux échéances, les uns s’opposent systématiquement à tout ce que
décide l’heureux élu qui, lui, se demande ce qu’il va pouvoir faire pendant 5
ans pour être reconduit dans ses fonctions.
Le fait que la vie politique française tourne autour d'une élection et d'un
personnage, amène chaque parti politique à s'articuler autour d'un chef destiné
à le représenter à l'élection présidentielle. Les partis ne jouent plus leur
rôle d’apporteur d’idées, ils ne sont plus que des arènes au sein desquelles se
confrontent les ambitions personnelles.
Et le quinquennat n’a rien arrangé puisqu’en précipitant le temps électoral,
il a accru l’impatience des citoyens et des politiques vis-à-vis de résultats
des politiques économiques et sociales. De plus, en faisant de la majorité
parlementaire les obligés du Président et en liant leur sort à celui-ci, il a
renforcé son pouvoir et confirmé la Chambre des députés dans son rôle de
chambre d’enregistrement.
En mettant en son centre l’élection d’un monarque républicain, notre
constitution collait comme un gant à son créateur, le Général de Gaulle.
Georges Pompidou puis Giscard ont continué sur sa lancée mais le temps des
grands hommes semble définitivement terminé. Et il est à craindre que la
fonction ne trouve plus de pieds à sa pointure.
Dit autrement, quel que soit le personnage qui l’incarne, cette fonction est
trop idéalisée pour qu’il n’y ait pas de déception au bout de
l’élection.
Le cas Hollande est certes caricatural mais avant lui,
tous les présidents depuis Giscard ont vu leur cote de popularité passer
bien en dessous des 50% sur une durée plutôt longue.
Une fois passée la plus ou moins brève période d’état de grâce post
élection, le second mandat de Mitterrand l’a vu brutalement chuter de 65 % à
30%. Celui de Chirac en a fait autant sauf qu’il a continué jusqu’à un plancher
historique pour l’époque de 17%. Etonnamment, ces deux là ne retrouveront des
couleurs que pendant les cohabitations. D’ailleurs, l’un et l’autre ont été
réélus suite à ces périodes pendant lesquelles ils ne gouvernaient
pas.
Quand à Nicolas Sarkozy, inutile de rappeler qu’il a passé son mandat à
dégringoler de manière inégalée jusqu’à battre des records d’impopularité (20%)
pour légèrement remonter sur le tard.
Plus grave encore que l’impopularité, il y a de moins en moins de respect
pour l’homme qui porte la fonction. Le phénomène n’est pas récent mais il a
pris une ampleur sans précédent avec Sarkozy, pour se prolonger ensuite sans
vraiment d'interruption avec François Hollande. Or, ne plus respecter celui qui
incarne la plus haute autorité de l'Etat affaiblit nécessairement l'Etat lui
même.
Le fait que l’homme le plus puissant de France, celui qui a en charge de
guider la France vers un avenir meilleur (ou pas pire) soit aussi rapidement
discrédité voire déconsidéré, est un handicap pour le pays surtout en des temps
de crise qui nécessitent plus que jamais que tout le monde avance dans le même
sens.
Tout cela pour dire qu’il serait peut-être temps de s’interroger pour savoir
si notre Vème république est encore adaptée aux nouveaux comportements
citoyens, à la diminution de l’influence du politique, aux périodes de vaches
maigres, à la complexité du monde qui nous entoure et accessoirement à la
carrure de notre personnel politique.
Si on se fie au marasme dans lequel patauge notre vie politique, on est en droit d’en douter !