Dans son livre « Les services secrets chinois - de Mao aux JO », Roger Faligot fait notamment [je souligne le
« notamment » car il s'agit d'un euphémisme au vu de la richesse d'informations apportées par ce livre] part que les responsables politiques de la Chine craignaient à la veille de
l'organisation des Jeux Olympiques plus particulièrement le risque de soulèvements ou d'agitations sociales en lien avec différentes ethnies : tibétaine, ouïghour [les Ouïghours constituent
aujourd'hui la plus importante (officiellement, près de 9 millions) des minorités nationales reconnues de la Région autonome de Xinjiang]
ou des insurrections d'origine ouvrière, voire du mouvement Falun Gong groupe considéré en Chine comme une secte [mouvement qui prône en
fait la résistance pacifique sur le modèle de Gandhi et qui s'appuie sur la pratique ancestrale du Qi Gong], mais aussi la survenue d'une
catastrophe naturelle capable de causer le chaos dans l'organisation de la vie quotidienne centrée sur un événement mondialement attendu le 08/08/08.
Le parcours de la flamme olympique a ainsi bien été perturbé par des manifestants acquis à la cause tibétaine. Le citoyen français aura
pu constater que ces manifestations ont mis à mal les positions de certains de nos dirigeants politiques dont notamment Bernard Kouchner lui-même, ministre des affaires étrangères, indiquant avec
un cynisme inquiétant que l'on ne pouvait pas être plus tibétain que le Daïla Lama lui-même et dont on se souvient pourtant de son adhésion sans concession à cette cause. C'est que la diplomatie
entre les pays occidentaux et la Chine est mise à rude épreuve. Alors que les cents derniers jours avant le 08/08/08 sont entamés, la plupart des pays occidentaux auront reçu le Daïla Lama, sauf
le Président Nicolas Sarkozy. On pressent dans cette attitude conciliante la volonté de ménager les maitres de Pékin. Toute la question est de savoir dans quel but ?
Aujourd'hui face à la catastrophe du tremblement de terre majeur du Sichuan, ces revendications, ces risques sont mis de côté. Et l'on
constate comme éberlués à la manifestation d'une des plus grandes opérations de transparence jamais réalisée dans ce pays pourtant particulièrement strict sur l'utilisation des informations
sensibles. Les médias français n'hésitent pas pour certains à s'en étonner d'ailleurs parlant d'une catastrophe si bien exploitée par opposition à l'attitude criminelle de la Birmanie. On est
donc de l'époque où Mao niait le dernier grand tremblement de terre. Au contraire, tous les dirigeants politiques et militaires se pressent dans la région sinistrée pour affirmer leur soutien au
peuple, et font démonstration de transparence par la publication de chiffres comme lors la conférence de presse du 18 mai organisée par le Ministère de la Défense Nationale. Cette attitude est
louable et nécessaire. Mais en Chine comme dans nos pays occidentaux, ce type de démarche cherche parfois à masquer des inquiétudes ou des faiblesses, voire des fautes. Souvenons-nous de
l'attitude de G.W. Bush à la Nouvelle Orléans. Ou de la mascarade d'informations diffusées par les pouvoirs publics français lors de la catastrophe de Tchernobyl. En la matière, il n'est donc pas
évident de donner des leçons aux dirigeants chinois. Pour autant, cette réserve ne nous impose pas au silence et à la naïveté. Au contraire, elle requiert d'ouvrir les yeux. Toute la question est
donc de savoir dans quel but les dirigeants chinois ont-ils décidé a priori de réviser leurs standards ?
Peut-être pour anticiper ce que Roger Faligot notait comme la plus forte crainte du pouvoir en place : le soulèvement du peuple, surtout
du petit peuple. Face à la corruption qui manifestement a conduit nombre d'écoles à être
construites sans respect des normes sismiques, face à la désorganisation des secours [mais comment en serait-il autrement face à une catastrophe d'une telle ampleur?], face aux
risques d'épidémies, ... face à la puissance de la nature, les dirigeants ne peuvent qu'adopter une position d'humilité. Déjà, ils acceptent l'aide internationale. Ils devraient en tirer des
enseignements, espérons au bénéfice de la liberté d'expression qui seule permettra au pouvoir en place s'il est sincère d'orienter une nouvelle politique en faveur du développement économique de
ces populations mises pour un temps sous le feu des médias et dont on sait qu'elles sont bien loin, pour celles qui sont touchées par le séisme, du dynamisme économique qui caractérise les
grandes régions côtières . Car c'est bien de cela dont on besoin ces populations.
La catastrophe du Sichuan ne nous fera pas oublier le caractère autoritaire du régime communiste de Pékin mais ceci n'est pas une raison
pour ne pas leur venir en aide.
Pour démontrer qu'il n'y a pas lieu de rester naïf, voici quelques liens sur une autre actualité moins médiatisée :
Chine : armée pour la paix
ou pour la guerre ?
Le site de CNN se fait hacker
par des pirates chinois
La cyber-armée chinoise en marche contre les
réseaux indiens