[anthologie permanente] Geneviève Huttin

Par Florence Trocmé

Geneviève Huttin a publié récemment Une petite lettre à votre mère, au Préau des collines.  
 
 
LA VOIX DE MONTARGIS 
 
Nous avons toujours sur qu’on écrivait chasteau au Moyen Âge. Et parfois même (rires sous cape) un chastiau… 
 
A la chorale, elle avait un visage de madone et quand elle chantait 
 
Ce mois de mai 
   Ce mois de mai 
Ce mois de mai   ma verte cotte 
   Ce mois de mai   ma verte cotte 
Ce mois de mai   je vais-ais tirer… 
 
nous pensions qu’elle était amoureuse 
 
Et le Chien de Montargis ? Pour toi, Geneviève, il luisait sous la pluie quand tu passais devant avec ta mère 
 
Le chien c’était le monde tel qu’il vous saute à la figure dans l’enfance, l’odeur de chien mouillé du pardessus SNCF de ton père accroché à la patère… 
 
Le chien mouillé, c’était lui 
 
Le facteur, capote noir, déposait le courrier 
 
Les ornières de la rue ne se fermaient jamais 
 
Les grands prés inondés où les vaches appelaient et vous les entendiez… 
 
 
Monter dans le cerisier, c’était écouter la voix des arbres 
 
Celui qui t’enracine et celui qui t’a déracinée 
 
Le mirabellier dont les fruits n’avaient pas le goût de là-bas 
 
Quand les jardins non plus ne se ressemblaient pas 
 
Les voisins le disaient 
 
Ton père laissait tomber ses bras avec fatalisme 
 
Le sien était plus grand 
 
plus d - é - s - h - e - r - b - é,  
 
ça n’avait rien à voir avec le presbytère 
 
et les fastes d’églises 
 
 
les petites communiantes en robes de mariées 
 
Quand tu y pénétrais 
 
elle était belle et cul béni 
 
 
la voix qui te coupait le souffle et 
 
te disait 
 
 
la FFF… rance… 
 
Geneviève Huttin, Une petite lettre à votre mère, Le préau des collines, 2014, pp. 30-32 
note de lecture de Véronique Pittolo 
 
Bio-bibliographie de Geneviève Huttin