L’odeur de mon pays était dans une pomme.Je l’ai mordue avec les yeux fermés du sommePour me croire debout dans un herbage vert.L’herbe haute sentait le soleil et la mer,L’ombre des peupliers, y allongeait ses raies,Et j’entendais le bruit des oiseaux, plein les haies,Se mêler au retour des vagues de midi.Je venais de hocher le pommier arrondi,Et je m’inquiétais d’avoir laissé ouverte,Derrière moi, la porte au toit de chaume mou…Combien de fois, ainsi, l’automne rousse et verte,Me vit-elle au milieu du soleil et, debout,Manger, les yeux fermés, la pomme rebondieDe tes prés, copieuse et forte Normandie!…Ah! Je ne guérirai jamais de mon pays.N’est-il pas la douceur des feuillages cueillisDans leur fraîcheur, la paix et toute l’innocence?Et qui donc a jamais guéri de son enfance?… Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle