Pensions : les régimes « Bentley » prennent l’eau

Publié le 17 juin 2014 par Fabien Major @fabienmajor

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les bénéficiaires des fonds de pension les plus généreux du Québec ne sont pas de bonne humeur. Les futurs retraités municipaux sont en beau joual vert contre le ministre Moreau. Son projet de loi 3 ne passe pas. Bien, moi je salue son courage et sa détermination. Notre société n’a plus les moyens de se payer des « régimes de retraite Bentley » .  La machine prend l’eau. Il faut y voir MAINTENANT. Pelleter encore sur le dos des générations suivantes et dans le compte de taxes foncières est purement irresponsable.

Dans un papier que j’ai rédigé pour le Journal de Montréal en juin 2012, je citais  la directrice générale de l’Union des Municipalités, Peggy Backman. « Le déficit estimé de nos régimes à prestations déterminées est de 4 milliards. Depuis 2008, les cotisations patronales sont passées de 59 à 71,3 % et la part des salariés est passée de 40,7 à 28,6 %. »  

Pour illustrer la bêtise du gouffre sans fond dans lequel les syndiqués municipaux nous entraînent, rappelez-vous de l’exemple qui suit. En 1980, Paul avait 50 ans. Il avait accumulé 30 ans de participation dans son régime. Sa convention lui permettait d’être éligible à la pension maximale à 60 ans et son espérance de vie était de 71 ans et 6 mois.

En 2014, des gars dans la cinquantaine ans peuvent quitter RIGHT NOW. Sans réduction de la rente avec une espérance de vie de 80. On doit alors collectivement les financer pendant 30 ans au lieu de 12.

Et soudainement, on veut travailler !

Quant à moi, la plus tordue des règles de détermination de la rente de retraite est le principe des 5 meilleures années (parfois moins). A 60 mois de l’éligibilité, la coutume veut qu’une majorité de fonctionnaires se rendent disponibles pour faire du temps supplémentaire et occupent aussi les cases des jours fériés. Pas grave si on laisse seulement 22 h d’ouvrage par semaine aux jeunes qui tentent d’obtenir une permanence depuis 11 ans. Non, on veut gonfler artificiellement une productivité imaginaire. Non seulement, les tâches ne sont pas mieux acquittées, mais pires, elles coûtent le double et le triple aux municipalités. 5 ans, plus tard, les rentes sont donc gonflées à bloc aux stéroïdes en se basant sur des rémunérations dignes du Baron de Münchhausen.

Ça pas d’allure dans le municipal, mais pas non plus au provincial. Heureusement, le rapport d’Amours avait soulevé le cas et cela a retenu l’attention du ministre Moreau. Pour être équitable, on ne devrait QUE faire la moyenne de toutes les années de travail, actualisée en dollar d’aujourd’hui. Point. Temps supplémentaire EXCLU. Permettre les congés de contributions patronales lors des embellies économiques a aussi été une grave erreur. Alors, avoir maintenant un déficit cumulé des caisses de retraite municipales de 4 milliards, ce n’est pas une surprise.

Les prestataires peuvent tirer deux conclusions diamétralement opposées :

  1.  « On a vécu une époque formidable. On a vraiment été gâté et on demeure tout de même des citoyens privilégiés. »
  2.  « Pas question de perdre nos acquis. On s’en crisse des payeurs de taxes. Ils avaient juste à venir porter leur CV à la ville comme nous autres et à joindre le bon syndicat. »

Mais dans le bras de fer qui s’amorce, la réplique la plus déconnectée et la plus arrogante des « gagnants à vie » est celle-ci : « Pas touche à mon fonds de pension. On a accepté des baisses de salaires dans le temps pour obtenir ces conditions. On a négocié ça de bonne foi. »

Le sabotage d’équipements, les menaces de mort, les coups de poing dans face, les saccages de bureaux à coups de deux par quatre, etc. C’est ça la bonne foi? Je me souviens très bien des années 70 et 80. De l’atmosphère irrespirable lorsqu’il y a eu des grèves illégales des éboueurs. Des boyaux d’incendies percés et des tas de fumier déversés au petit matin dans les entrées des contremaîtres. Vous appelez ça négocier de bonne foi? 

En 1982, le Canada se remettait difficilement de la crise du pétrole. Les baby-boomers formaient la majorité de la force du travail. La loi du nombre a incité plus d’un maire opportuniste et échevin girouette à plier les genoux et dire oui à des exigences farfelues. Comme, indexer des salaires à « seulement 9% » et bonifier la différence dans le fonds de pension. C’est-à-dire, à pelleter le problème 3 décennies en avant. Et ça, c’est aujourd’hui. Bienvenue dans la réalité.

Un gouvernement responsable doit casser le moule. Le contribuable n’a plus à payer pour les erreurs du passé. Je veux ben être de bonne foi, mais quand je constate que les employés municipaux ont des conditions (salaires et avantages sociaux) 38% plus généreuses que les employés provinciaux… j’ai comme une crise de la foi.