Le Royaume-Uni, l’Italie et la Belgique viennent de décider d’intégrer dans leur PIB les activités de prostitution et de trafic de drogue. L’INSEE s’y refuse pour le moment. En dehors de toute considération morale, est-ce vraiment une bonne idée ?
A partir de septembre prochain, tous les pays membres de l’Union Européenne devront inclure dans le calcul de leurs richesses les activités illicites telles que la prostitution, la production et le trafic de drogue et la contrebande dans le but de comparer les économies. C’est stupéfiant me direz-vous. Alors que certains pays se sont précipités, voyant là une manière de gonfler leur croissance, d’autres comme la France sont plus réticents.
Bruxelles y voit des avantages
Tout d’abord, cette directive est mise en place dans un souci d’équité. En effet, la participation au budget européen est calculée en fonction du PIB des pays. Il ne semble pas juste que certains pays prennent spontanément en compte l’économie souterraine alors que d’autres contribuent moins au budget suite à leur PIB moins élevé. Parmi ceux comptabilisant déjà la drogue et la prostitution, on y trouve la Hollande, la Slovénie, la Finlande, la Norvège ou encore la Suède.
Deuxièmement, cette réforme permettra de doper la croissance et donc de diminuer les déficits et les dettes des pays. Globalement, au niveau européen, le PIB augmentera de 0,2%. Il n’y pas de quoi parler de pic de croissance ! Mais cela contribuera-t-il à relancer l’économie ? Dans toute l’Europe, la création de richesse souterraine aurait approché 2 000 milliards d’euros en 2012 pour un PIB total de 16,6 milliards, donc 12% en moyenne. C’est l’économie italienne qui bénéficiera le plus de ce nouveau règlement. Le PIB du pays pourrait croitre de 10%, réduisant ainsi le ratio de la dette nette sur le PIB. Le PIB français augmenterait « que » de 3%.Aux Pays-Bas, cela a augmenté le PIB de 0,4% en 2010 ; mais pour cause, la prostitution et la consommation de cannabis sont légales, rendant le calcul plus simple.
Enfin, selon Eurostat, un institut statistique communautaire rattaché à la Commission européenne, ce nouveau système de calcul est plus réaliste car les activités illégales contribuent à faire circuler de l’argent et génèrent ainsi de la richesse et des emplois.
Comment calculer l’économie souterraine ?
Selon la Commission européenne, l’estimation de la drogue se fait grâce au nombre d’utilisateurs, à la consommation moyenne et au cours de ces drogues. Pour la prostitution, il faut prendre en compte le coût de la location des lieux de prostitution ainsi que celui des achats annexes (préservatifs, tenues…).
Par ailleurs, cela pose un sérieux problème éthique. L’INSEE refuse de prendre en compte l’argent généré par des activités exercées sous la contrainte : tout ce qui a été dénoncé auparavant va venir gonfler les statistiques. Aussi, comment un pays va maintenir sa crédibilité pour lutter contre ces activités alors qu’elles apportent de la richesse au pays.
La France a jusqu’au 30 septembre pour appliquer ce règlement ou alors elle s’expose à une condamnation par la Cour de Justice. Néanmoins, les partis europhobes vont profiter de ce règlement pour parler d’une dérive morale de l’Europe tandis que les gouvernements y voient peut-être là la seule opportunité pour remplir leurs objectifs de croissance en période de crise.