La magie des mots, par Francesca Tremblay…

Publié le 13 juin 2014 par Chatquilouche @chatquilouche

 Le souffle chaud du vent qui entrait par la fenêtre de la chambre caressait nos corps nus, immobiles. Je te regardais dormir. Je n’ai pas voulu te réveiller, tu semblais si paisible. Sur ton dos et tes larges épaules, il y avait les esquisses rouges que mes ongles avaient tracées. Vives signatures que j’avais laissées et qui disparaîtraient une fois le soleil levé. La nuit avait tenu à te rappeler mon nom et ton cri lui répondit, enfin. Une douce mort de passage dont les brumes se dissiperaient à l’aube, laissant les rêves là où ils étaient.

J’avais peur de me réveiller, et qu’au matin tu sois déjà loin. Mon corps souffrait de tes longues absences, même s’il savait que tu revenais toujours. Hier, je t’ai aimé de tout mon cœur, de toute ma chair qui frémissait. Tu tombas, tel l’arbre mort qui repose pour toujours, et je vins me poser près de toi, mon amour. Nous fîmes, ce soir-là, une forêt d’arbres tombés au combat, où le nom des bêtes était hurlé à la lune blanche et où la sueur ruisselait sur nos corps.

Tu avais rallumé un brasier que j’avais étouffé, de peur qu’il ne me consume. Et j’étais de cendre ce matin, et je vibrais de vie tel le phénix qui renaît. Pourtant, tu repartirais et tu voudrais découvrir le monde parce que le mien ne te suffisait pas.

Quand tu arborais ton beau sourire d’aventurier perdu, c’était fête. J’aimais m’égarer au milieu des océans fous qui se déchaînaient au fond de tes prunelles. Si bien que j’en perdais la tête. Ou lorsque tu me racontais les plaines arides des déserts du sud, un sourire admiratif naissait sur mes lèvres, tandis que je m’accrochais aux tiennes. Tu étais l’enfant du premier jour et j’étais le missel mystérieux qui rêvait de porter tes secrets. Tes histoires savaient tracer une voie jusqu’à mon cœur hasardeux et agité.

Enfant du premier jour, serais-tu toujours là ? Et qu’en serait-il vraiment, si je partais, là, dès maintenant ? Si c’était moi qui te quittais, cette fois. Serais-tu amoureux d’une autre ? Je sais que cette porte est ce qui me sépare du monde. Mais je sais aussi que si je la franchissais, elle me séparerait des songes que nous avons faits. Elle me séparerait des ciels sublimes au fond de tes yeux.

Je te regarde dormir et ton air paisible me fait croire en un fol amour qui perdurerait au-delà de l’avenir. Tu sembles léger comme l’oiseau, prêt à t’envoler, insouciant. Ces chimères ne sont que les miennes, après tout, et quand tu te réveilleras, tu sauras me raconter les plus belles folies que l’on fera.

Demain est fait de l’espoir de nos amours, et nous sommes les enfants du premier jour.

NOTICE BIOGRAPHIQUE

En 2012, Francesca Tremblay quittait son poste à la Police militaire pour se consacrer à temps plein à la création– poésie, littérature populaire et illustration de ses ouvrages.  Dans la même année, elle fonde Publications Saguenay et devient la présidente de ce service d’aide à l’autoédition, qui a comme mission de conseiller les gens qui désirent autopublier leur livre.  À ce titre, elle remporte le premier prix du concours québécois en Entrepreneuriat du Saguenay–Lac-Saint-Jean, volet Création d’entreprises.  Elle participe à des lectures publiques et anime des rencontres littéraires.

Cette jeune femme a à son actif un recueil de poésie intitulé Dans un cadeau (2011), ainsi que deux romans jeunesse : Le médaillon ensorcelé et La quête d’Éléanore qui constituent les tomes 1 et 2 d’une trilogie : Le secret du livre enchanté.  Au printemps 2013, paraîtra le troisième tome, La statue de pierre.  Plusieurs autres projets d’écriture sont en chantier, dont un recueil de poèmes et de nouvelles.

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche :https://maykan2.wordpress.com/)