Voici pour vous amis lecteurs, le premier test des ACS T1 réalisé en France. Et mon petit doigt me dit que le produit mérite tellement qu’on parle de lui que cela ne sera probablement pas le dernier!
1. ACS, un peu d’histoire
ACS-custom, créée en 1994, est spécialisée dans le développement, la conception et la fabrication de protecteurs auditifs et de In-ear-monitors, standard et sur-mesure.
Peu après l’introduction au Royaume-Uni des protections auditives de renommée mondiale ER-Series conçues spécialement pour les musiciens, ACS-custom UK développe le T3 (un In-ear 1 voie) qui lui confère rapidement une renommée parmi les musiciens et amateurs de musique. Lui succéderont les T2 en double voie, puis le flagship actuel de la gamme le ACS T1, » Triple drivers In-Ear Monitors ».
Aujourd’hui basée à Banbury dans l’Oxfordshire, ACS est présent à travers le monde dans 15 pays Européens, en Australie, Amérique et en Asie.
2. ACS T1, une construction habile fourmillant de petites attentions
Les ACS T1 en silicone tranchent avec les In-ears en acrylique que semble préférer la concurrence, et c’est tant mieux pour nos oreilles …
2.1. Matériau de construction des In ears
ACS ne jure que par le silicone. Le T1, comme tous les produits ACS, est réalisé à base de silicone médical « SterlTouch ». La promesse client derrière cette appellation un peu racoleuse est une porosité extrêmement réduite, permettant enfin de concilier le confort du silicone et la qualité du son que les experts accordent plutôt à des matériaux plus rigides.
Au port, il est indéniable que l’isolation est parfaite. A titre de comparaison elle est bien meilleure que celle de mes Earsonics EM2 (plein) ou EM32 (demi-pleins). Un des autres avantages indéniables de la silicone est la souplesse qui permet au T1 de de suivre les mouvements des conduits : il est même possible de manger ou de faire du sport sans perdre l’étanchéité du seal. Vraiment bluffant.
De plus le matériau étant par nature peu adhérant au gras, ils sont beaucoup plus propres que des intras en acrylique ou en résine. Un très gros plus à l’utilisation qui ne rend plus nécessaire les nettoyages systématiques après chaque utilisation.
Seul bémol à mon expérience avec les T1, ils sont relativement difficiles à positionner dans l’oreille si vous n’utilisez pas de gel facilitant l’insertion. Au bout de 15 jours toutefois, j’ai attrapé le « coup de main ».
Terminons enfin avec la palette de personnalisation qui vous propose 18 coloris, ainsi que la possibilité de graver jusqu’à 18 caractères (option), mais pas de « dessins » contrairement aux marques proposant des intras en acrylique qui se prêtent mieux à l’exercice de customisation.
2.2. Câble
Les câbles des T1 sont largement au dessus de ce qui se fait chez des fabricants comme Westone, 1964 ou Earsonics. Ils ne paient pas de mine d’aspect extérieur mais disposent de deux qualités remarquables.
En premier lieu ils ont une capacité de réduction des microphonics absolument hors norme. Dès lors, il n’est plus nécessaire de faire passer les câbles des In ears derrière l’oreille, comme c’est le cas de la plupart des intras. En ce qui me concerne, c’est un atout énorme dans la mesure où je déteste les guides transparents que l’on me force à faire passer derrière les esgourdes sur mes autres intras. C’est une vraie libération avec le T1 qui se font des lors complètement oublier lorsqu’ils sont chaussés.
En second lieu, ACS s’est attaqué à un problème de fond des in-ears : la jonction de la prise câble à l’écouteur. Sur le T1, cette jonction se fait complétement « dans l’in-ears » comme on peut le voir ici :
Plus besoin donc de paniquer en manipulant ces in ears ou en les laissant pour une fois traîner dans la poche d’un sac, le risque d’abîmer les prises étant complètement nul. Là encore tous les possesseurs d’intra à prise classique (et même à prise « recessed » dans une moindre mesure), familiers de ce problème, apprécieront.
Enfin le câble n’est que très peu sujet aux nœuds: là encore un gros plus en utilisation quotidienne.
2.3. Bundle
Le bundle du T1 est à la hauteur du reste de sa fabrication et contient les éléments suivants :
- Etui ACS Monitor (boite pelican étanche et rigide)
- Etui de transport en simili cuir
- Outil de nettoyage
- Crème lubrifiante
- Livret d’utilisation et d’entretien
- Câble stéréo jack 3.5mm plug 1/4″ pouces
Bref, un vrai bundle qui ne se moque pas du client, dans la veine de ce que propose 1964, mais bien au delà d’Earsonics, très chiche en la matière
3. ACS T1, du brit’sound brut pour les truands
Une fois n’est pas coutume je ne proposerai pas de plan aussi structuré pour la partie sonore, pour une raison propre au ressenti que j’ai eu du produit : le plaisir d’écouter le ACS T1 est largement supérieur à la somme de ces performances prises dans chacun des registres. Certains produits arrivent à créer une magie au delà de la performance technique, et forcent par la même le testeur à s’absoudre de son référentiel de notation. Le T1 est de ceux-là.
Le plaisir d’écoute que m’a procuré le T1 est du à trois qualités qui se révèlent à l’écoute comparative d’autres In-ears : un médium unique, des timbres d’une rare corpulence, et une spatialisation bien soignée.
3.1. (Pu)T1 quel médium !
L’oreille humaine est ainsi faite… un écouteur qui sonne bien dans le médium à toutes les chances de séduire si le reste du spectre n’est pas terminé à la tronçonneuse. Le T1 a été pensé pour les musiciens et plus spécifiquement pour les chanteurs. Le médium ne pouvait être que d’exception avec une telle cible marketing en tête. A l’écoute, force est de constater que la promesse est bien remplie.
Autorisez moi, avant de démarrer dans le vif du sujet une remise en contexte du médium dans la signature globale de l’intra. Le ACS T1 est un écouteur « neutre », voire très légèrement montant. A titre de comparaison, le niveau de médium et d’aigu délivré par rapport au niveau de basse, est par exemple plus élevé que sur des ES EM32, EM6 ou 1964 Quad V3.
Cela dit, lors des sessions d’écoutes, ce sont bien les voix, les guitares et les pianos qui ressortent avec une luminosité exacerbée. Cette luminosité ne se fait pas de manière artificielle par un simple effet d’EQ relatif. Elle est naturelle, et semble tomber sous le sens. Les jonctions entre les différentes fréquences sont d’ailleurs gérées avec justesse et aucun effet de « seuils » n’est perceptible à l’oreille entre les registres.
Naturellement la plupart des mélodies étant composées dans le médium, le T1 est redoutable pour mettre en exergue celles-ci, un peu à la manière d’un roman dont on aurait passé au Stabilo les moments importants. (les autres moments sont également lisibles pour ceux qui le souhaitent, mais ils sont tout simplement moins immédiats à repérer). Tout ceci nous amène à discuter des timbres dans la section suivantes.
3.2. Complètement timbrés
La deuxième savate infligée par le T1 se prend en pleine face dans le domaine merveilleux et ésotérique de la plénitude des timbres. Combien de casques ai-je immédiatement reposé avec un laconique « … ça sonne creux » ? Je ne les compte plus moi même, et c’est probablement ce que je déteste le plus dans la reproduction du son. Le détouré artificiel m’emmerde, et les textures transparentes à la limite de rachitique aussi. Je veux des formes, de la matière, du corps, du contraste !
Le T1 a su me conquérir sur cet aspect pour lequel je suis pourtant aussi difficile qu’un vieux trappeur canadien barbu et misanthrope, reclus depuis trop longtemps dans sa cabane avec pour seule compagnie un écureuil apprivoisé. le T1 sonne plein, le T1 sonne généreux, le T1 sonne naturel et musical. C’est d’ailleurs un petit choc pour moi qui adorait mes Earsonics EM32. dès que je repasse sur ces derniers, sur cet aspect précis, je ne peux que regretter les timbres médium et haut médium du T1 qui me procurent un plaisir d’écoute supérieur sur le T1.
Ce petit T1 à une capacité à sortir un médium bien contrasté et tout en en relief qui vient percuter nos oreilles avec une énergie « brute » et un rendu qui procure une solide illusion. C’est le premier intra que j’ai eu le plaisir de tester qui m’ait procuré cet effet-là dans le médium.
3.3. Houston…
Et à propos de relief, l’espace dans lequel nous emmène le T1 est rare à trouver en « intra ». Parmi les intras les plus larges que j’ai pu écouté, le T1 étonne surtout par sa capacité à « dé-latéraliser » l’écoute. Le message musical vient bien entourer l’auditeur, en bas, en haut, et pas uniquement sur les côtés. En ce qui me concerne cela a la conséquence d’agir assez fortement sur mon implication dans la musique écoutée. A être plutôt en ressenti et émotion plutôt qu’en analyse… Attention toutefois, on reste bien encore dans une techno intra qui ne vous proposera pas la même distanciation qu’un bon casque ouvert.
Côté présentation de la musique le T1 est plutôt « in the face », mais de manière bien étagée, et avec une forte immersion. Cela contribue à renforcer la lisibilité des beaux médiums proposés et les performances vocales qui sont spécialement appréciables. Quoiqu’il en soit je trouve les T1 plus aboutis en termes de scène sonore que les autres intras que j’ai eu le plaisir de tester jusque là.
3.4. Et si on améliorait ?
Mais dans chaque produit, il y a aussi des choses qu’on auraient encore voulu plus belles, et le T1 n’échappe pas à la règle.
Un bas de spectre encore perfectible ?
Je n’ai que peu parlé des basses jusque là. Vous n’aurez pas manqué de le remarquer. En premier lieu parce qu’avec une belle emphase sur le médium, les basses ne sont pas forcément ce que l’on remarque en premier sur le T1. En termes de quantité, je trouve l’équilibre du T1 parfaitement réussi. Les basses sont là bien à leurs places, sans bavure ni caractère trop effacé.
Cependant, il me faut rendre à César ce qui lui appartient. A la comparaison avec mes Earsonics EM32, je leur trouve un manque d’impact qui peut nuire à certains genres musicaux ou en aimerait se faire malmener plus franchement par le bas de spectre. Ce brin de « physiologique » supplémentaire qui va bien lorsque l’envie de monter le volume se fait sentir un vendredi soir au sortir du turbin…
Et pour terminer la comparaison les textures déployées dans le bas de spectre sont légèrement moins fines que ce que me proposent mes EM32. Ce point est particulièrement sensible sur certains timbres de basses bien particuliers et très riches (Marcus Miller ou Victor Wooten pour ne citer que ces grands Messieurs)
Ne nous méprenons toutefois pas. L’excellence des EM32 en bas de spectre est telle que leur tenir la dragée haute est une gageure. Le niveau global du T1 sur cet aspect bien spécifique demeure excellent, mais pas au niveau de ce qui me semble une des références actuelles.
Peu tolérant ?
J’ai eu quelques surprises dans ma discothèque à l’écoute des T1, notamment dans les médiums. Selon la qualité de l’enregistrement j’ai rencontré des batteries PlaySkool qui sonnaient un peu comme ça …
Et puis sur d’autres morceaux elles sonnaient plutôt comme ça…J’ai aussi rencontré des « instruments à corde »
Et aussi de « vrais » violonsTout ça pour dire que le T1, comme beaucoup de bons écouteurs ou casques demande un certain standing en terme d’enregistrement et d’encodage, sous peine de vous retranscrire avec fidélité une bouillie peu ragoutante.
Simplificateur ?
Enfin pour terminer, le ACS T1 me semble mieux adapté aux audiophiles et aux musiciens qu’aux métiers du travail technique du son. Il est tout simplement plutôt musical qu’analytique, et simplifie probablement légèrement le message sonore par rapport à mes Earsonics EM32, même s’ils me procurent souvent plus de plaisir d’écoute que ces derniers. Cette simplification se sent principalement dans les extrêmes qui sont légèrement moins fins.
Comme toujours reconnaissons qu’il est diablement difficile d’allier musicalité et capacité d’analyse, et que dans le monde des intras il faut encore bien souvent choisir. Ou bien tout simplement avoir plusieurs paires selon ses envies …
4. Le mot de la fin
Excellente surprise donc pour moi que l’ACS T1, que je n’attendais pas à ce niveau de performance. Pour ne rien gâcher l’ACS T1 se trouve a moins de 850€, coût d’empreinte inclus (avec un audioprothésiste partenaire), et constitue un rapport qualité/plaisir/prix assez remarquable.
Pour un testeur, un des critères qui ne trompe jamais c’est d’ailleurs de voir si l’envie d’écouter le produit testé demeure après le test. En ce qui me concerne ils ne quittent plus ma poche… leur isolation diabolique, doublé du médium enjôleur m’ont définitivement conquis.
Bravo Messieurs les anglais !
Je remercie Priscille de chez Earcare pour le prêt