"J'ai l'honneur de ne pas te
demander ta main,
ne mettons pas nos noms au bas d'un
parchemin......."me souffle Brassens!
Mais, tout à fait par hasard, et donc
involontairement, j'ai serré, et pas qu’une fois, celle de Serge
Nuques quelque part dans le désert des Bardenas: voyons la mystérieuse
mécanique du hasard qui provoque les intersections d’étoiles
inaccessibles avec les astéroïdes désenchantés.
"-J'ai perdu mes lunettes!"
Intérieurement, je l’ai détesté,
Hélène !
Car j'agonise de soif.
Pour les lunettes, j’ai un
alibi : je matais les motos délaissées par la confrérie des chevaliers de
fer en train de se photographier le tout à l’égo à l’entrée des Bardenas.
Donc, retour au point de faux
départ, croisement du groupe de motard qui se casse, cherchage et trouvage de
lunettes et vrai départ vers le salut : une pinte de
bière fraîche pour décoller mes muqueuses buccales et retrouver
l’usage de la parole.
Caramba ! Encore raté :
les motos sont à l’arrêt sur le chemin gravilloneux devant nous.
In petto, je me dis qu’un de ces
blaireaux a du être malpoli avec son levier de frein avant qui, on le sait à
VTT comme à Moto, est très susceptible sur le gravillon.
En fait, point de chute mais une
crevaison. Une des montures à plat agonise sous le cagnard, son gros cul
affalé sur le bas coté et les bikers sont un peu dans la merde.
On prête une pompe, un dis :
« il faut soulager la moto » j’approche ma main de la selle pour
abréger les souffrances de la bête et là je reste collé :
Saisissant la croupe de la Honda
afin de soulager le pneu arrière du poids de la moto et de faciliter son
gonflage l’immense Serge Nuques, pas le dernier pour tâter du fessu, me
devance.
« -Mé,mé,mé, c’est …… »
Les mots et l’eau à la bouche me
manque et ce ne sont pas « Hélène et les garçons » Bruno,Vincent
et Tomesh qui vont m’aider : personne n’a visité ce monument du pilotage
chez nos vététistes !
Pas longtemps. Mon gosier en
insuffisance de salive et l’esprit en carence d’idée se remettent en marche à
fond la caisse sous les stimuli de ses exploits et le Chevalier de Groland
ne sait pas si je suis un bon ou un mauvais souvenir.
Je l’attaque sur le patronyme, je
sais c’est vil, mais je suis à la limite de l’insolation après les 5 heures de
VTT par 37°, faut faire vite, le bougre à de l’esprit autant qu’il est fin
pilote, joyeux compagnons et journaliste le plus rapide à l’ouest de
l’Adour et de la Nive.
« -Serge euNuques, t’aurais pas
préféré Bruno Nuques » dis-je en lui serrant la main sous les éclats
de rires de son aréopage.
T’as remarqué les deux
gonzesses ? Moi oui!
Et quand tu évoques la castration,
symboliquement tu nique le machisme, déclenche les rires chez le peuple fendue
et avec le rire des filles, les garçons suivent.
Désarçonné par ma familiarité,
dérouté par l’hilarité générale, incapable de me situer dans son trombinoscope
garni de célébrités autant que de fans anonyme, je l’assomme avec le récit de
ma journée, le voyage depuis Bordeaux avec la Ducati (olà des filles qui sont
aussi en Ducat’, c’est pas du bol, ça ?Les mecs se re-marrent), le Van de
Bruno pour mon VTT, ma pompe qu’il tient à la main, l’oubli des lunettes, la
crevaison, la rando qui m’a vidé et cette rencontre magique qui m’emplie, cette
suite de Fibonacci qui fait que nous sommes là dans cette
entrevue sans enjeu social, chaleureuse, émerveillée parce qu’inutile (car je
ne crois pas que j’arriverai à lui fourguer des fenêtres).
Il demande dans le ressac entre deux
vagues de ma logorrhée : « et toi ? t’es qui ? »
« Personne ! Mais on
partage le même prénom et la même ambition de pourrir les caisseux ».
On se re-re-re-serre la pogne et il
me propose un autographe sur le corps de pompe.
Je décline en accompagnant d’un
geste du poignet à hauteur de l’entrejambe, un amical : « Je suis
impressionnable mais j’suis pas idolâtre »
Pas facile à placer dans une
conversation mondaine le geste masturbatoire, mais là le public est caliente.
Voila, tout le monde se gondole, du
moins il m’a semblé et c’est déjà fini, je ne reverrai jamais Serge Nuques.
Cependant, grâce à lui, je ne
déteste plus Hélène !