De l’autre coté, il y a Jane. Une enfance à Fresno, « ville la plus bête d’Amérique, autant dire du monde. » Un viol subit un soir de fête de fin d’année et un départ précipité pour San Francisco. Des cours de théâtre, du mannequinat pour faire bouillir la marmite, un coloc gay qui va l’entraîner dans la drogue. Le coup de foudre pour Jefferson, musicien d’un groupe de rock. La naissance de leur fils treize mois plus tard. Et puis l’accident. Terrible. Dévastateur. Une existence qui s’écroule et Jane se retrouve à errer dans le Golden Gate Park. C’est là que son chemin croise celui de Sam…
Un texte en miroir. Deux trajectoires tortueuses, deux vies cassées qui se font face. Deux destins reliés par la nuit et ses excès. L’Amérique d’hier, celle des indiens massacrés à Wounded Knee, humiliés en permanence depuis, et celle d’aujourd’hui, aussi abrutie que violente. Pas grand chose d'original dans cette histoire, c’est un fait. Mais la prose électrique de Caryl Ferey lui donne une autre dimension. Ce gars écrit avec une fluidité incroyable. Tout coule de source, les phrases s’enchaînent dans un mouvement limpide, sans accro. Une écriture tour à tour poétique, cruelle, directe. Court et dense, ce récit sans fioriture garde une forme d’émotion à fleur de peau. Et puis j’adore la fin. Je n’y peux rien si les tragédies m’ont toujours fasciné…
Les nuits de San Francisco de Caryl Férey. Arthaud, 2014. 120 pages. 10,00 euros.
L'avis du petit carré jaune