Le cinéma asiatique est un sacré joueur.
Il prend son temps et relève le challenge du temps et de la patience. Regarder, en 2014, un film japonais, coréen ou chinois est un chouette défi infligé fait à soi-même. A l’époque du zapping continuel entre téléphone et internet, se poser 2h30 pour admirer une branche d’arbre ou des chaussures d’enfants, ce n’est pas une mince affaire.
Bon, bon, je raccourcis bien sûr, par pure provocation peut-être, mais sonne dans mes propos un peu de réalisme tout de même.
Pourtant, quand on est entré dans le cinéma asiatique et qu’on a choisi les bons films (très important sinon c’est un suicide assuré!), on peut facilement se prendre au jeu et aimer ça. Kore-Eda est un de ces réalisateurs qui nous introduit le 7ème art nippon avec finesse et en nous brossant dans le sens du poil. Accessible, ses longs-métrages sont sources d’identification certaine. Le premier que j’ai pu découvrir au cinéma, Tel père tel fils, m’avait séduite et donné très envie d’en apprendre plus sur les histoires imaginées par le réalisateur japonais. Nobody knows me paraissait approprié.
Autre sujet, autre ambiance, je n’ai pas été déçue.
Ce long-métrage est pourtant tout sauf tendre et rassurant. Il malmène et bouleverse. Inspiré de faits réels, il retrace le quotidien de Shigeru, Akira, Kyoko et Yuki, quatre enfants laissés à l’abandon par leur mère, irresponsable et volage.
Akira, en tant qu’aîné prend son rôle d’homme de la maison au sérieux. Il tente de payer les factures, s’occuper de ses frères et soeurs et ne pas se faire avoir par les services sociaux. Une gageure pour cette petite famille en manque de repères au vu des voisins et des qu’en dira-t-on…
Un très beau film qui ralentit quand il est nécessaire de pointer un détail, un moment ou une émotion. Ne croyez pas pouvoir vous en sortir sans être touché. La petite musique (toujours la même) revient incessemment dans le film pour rythmer la vie qui s’écoule avec peine.
Des personnages travaillés avec soin auxquels vous vous attachez sans même vous en rendre compte. Qu’ils soient petits et aimables ou plus grands et peut-être un tantinet plus agaçants, l’observation est bien présente et on regarde avec un oeil curieux le dessin de leur caractère unique.
Une belle réflexion même si violente et dure sur l’abandon, la solitude et la vie qui s’impose à nous comme souvent sans qu’on ait notre mot à dire. Un esthétisme sans pareil avec un sublime jeu de couleurs et de lumières qui promeut la lenteur et le rythme de la vie, la vraie.
Voyez sans tarder ce joli et réaliste long-métrage.
Nobody Knows, Hirokazu Kore-Eda, 2004