Pour que nos lecteurs et lectrices francophones puissent comprendre comment et pourquoi l’enquête sur le MOSE est vécue à Venise comme un séisme et en Italie comme un véritable tsunami, nous avons décidé de reprendre cette histoire depuis… le début !
C’est à dire, à l’époque ou Venise était encore la Sérénissime République surnommée "La Dominante".
Depuis que Venise existe et qu’elle a fait du commerce avec les pays du Levant sa richesse, la cité lagunaire à vécu grâce à l’océan, mais en a toujours redouté les colères. Les hautes marées ont de tout temps été une inquiétude, nourrie par la mémoire de la ville engloutie sous les eaux de la lagune avant le Xème siècle et la création mythique de Venise.
Car avant la lagune, cette région était une vaste plaine traversée par la via Annia, où se dressait la grande cité romaine d’Ammiana (Torceli, Amianae et Buriani du Pactum Lotharii de 840 par l’empereur Lothaire Ier). Nos lectrices et lecteurs se reporteront à la lecture de nos précédents articles : ; Le mythe de la ville antique ;
En dépit du désordre hydrographique que provoquèrent les "déluges" du VIIème siècle, malgré les premières aque alte d’exception du VIIIème siècle, le bassin lagunaire n’était toujours pas formé à la fin de ce siècle où terres agricoles, eaux et marais formaient encore un paysage instable. C’est le détournement du Piave, qui , ajouté à une période de forte montée du niveau marin auraient conduit à la disparition quasi complète de la ville entre les XI et XIIème siècles. A cette époque, les vénètes étaient déjà installés dans la région marécageuse.
Au XVème siècle donc, les périodes d’acqua alte étaient une préoccupation pour les notables, car elles endommageaient les marchandises entreposées dans les magasins à fleur de canaux. Un aventurier de l’époque, Federico Gualdi, proposa, le 15 décembre 1662, son nouveau projet pour sauver la lagune de Venise des marées de l’Adriatique. On connait bien ce projet au travers d’un mémoire destiné au Conseil des X et qu’il a daté du 10 janvier 1662 (du calendrier vénitien, en fait c’était 1663 dans notre calendrier).
Découvrez comment, Federico Gualdi inventa le principe du MOSE dès le XVème siècle en proposant de construire des palissades en bois aux entrées de la lagune dans notre article
Bonaparte, également, avait fait consacrer un budget important à la consolidation des enrochements et des digues qui séparent la lagune de la mer.
Le 4 novembre 1966 fut une journée noire pour Venise. Poussée par un fort Sirocco (vent de Sud-Est) l’eau est montée à 194 centimètres dévastant de nombreuses habitations. La place Saint Marc était noyée sous 120 centimètres d’eau, pendant 30 heures… en plus d’une eau très haute à Venise, il y eut une violente tempête qui endommagea les digues le long des côtes.
Nos lectrices et lecteurs se reporteront à nos articles : Venise le 4 novembre 1966
Cette catastrophe eût une renommée mondiale et la terre entière s’alarma alors du risque que faisaient courir les hautes marées à une ville d’art mondialement connue comme Venise. C’est alors que furent créées des fondations nationales pour "Sauver Venise en Péril", chacune étant plus ou moins concurrente plutôt que complémentaires, et donc, plus ou moins inutiles à Venise… en tout cas, moins utiles à Venise qu’au prestige de leurs éminent membres bienfaiteurs.
Au début des années 1970, le CNR lança un premier concours d’idées, suivi d’un appel d’offres du ministère des Travaux publics et de l’achat en 1980 des projets présentés. Les six solutions proposées furent confiées à l’évaluation d’un collège de sept ingénieurs hydrauliques, qui furent également chargé de préparer un projet de faisabilité.
Dès 1973, le gouvernement italien fit voter une première loi n. 171/1973, qui définissait déjà le champ de compétence de chaque partenaire institutionnel : l’État italien pour la sauvegarde physique et l’équilibre de la lagune, la Région Vénète pour la dépollution des eaux, les Communes de Venise et de Chioggia pour le développement économique et social, la rénovation et réhabilitation des structures urbaines.
Vers 1975, le Ministère des Travaux Public lança un concours pour recevoir les différents projets, mais aucune suite ne fut réellement donnée.
Pendant l’été 1975, un groupe de recherche composé d’industriels s’est penché sur le problème des inondations et de l’idée de fermer les portes de la lagune.
Ce groupe était composé de la société de pneumatique Pirelli, du groupe textile Erika Glanzstoff, et de l’entreprise de construction Furlani.
Ce nouveau projet avait l’avantage d’un faible coût initial et d’une installation rapide. Le "système Pirelli" consistait en un long tube flexible, fait de nylon enduit de caoutchouc synthétique.
Il fallu encore perdre quelques années, avant de créer un groupe d’experts qui se penchèrent sur l’élaboration d’un "projet pour la conservation de l’équilibre hydraulique de la lagune et la défense de Venise des hautes eaux" : le "Progettone" de 1981. Il fallu une autre loi spéciale en 1984 pour valider la nécessité de traiter de manière unifiée les mesures de sauvegarde.
La seconde Loi Spéciale pour Venise définit en 1984 les stratégies et les critères devant être adoptés pour l’intervention de sauvegarde de Venise et institua un Comité d’orientation, de contrôle et de coordination (le Comitatone, dirigé par le président du Conseil des Ministres et comprenant les institutions compétentes au niveau national et régional) en conférant au ministère des Travaux publics l’autorisation de procéder à une concession, qui devait être accordée de façon unitaire et selon des négociations privées.
Cette exigence, également exprimée en 1982 dans un document du conseil municipal de Venise, était d’accélérer les temps mais, surtout, d’affronter selon une optique unitaire et organique l’ensemble des interventions de sauvegarde dans une réalité complexe et délicate comme celle du bassin lagunaire en confiant l’ouvrage à un sujet unique et qualifié, en termes d’entreprise et de compétences techniques et scientifiques. La mise en projet et l’exécution des interventions pour la sauvegarde de la ville furent donc confiées par la Magistrature des Eaux de Venise au Consortium Venezia Nuova, groupe comprenant une cinquantaine d’entreprises et constitué en 1982.
Après quatre ans d’enquêtes, d’études, d’analyses des différents systèmes de vannes mobiles et d’élaborations, le Consortium Venezia Nuova présentait en 1989 une proposition d’intervention articulée pour la sauvegarde de Venise, le projet REA (Riequilibrio E Ambiente – Rééquilibre et Environnement).
En 1997, la Magistrature des Eaux de Venise et le Consortium Venezia Nuova présentaient l’étude d’impact environnemental (SIA), qui fut évaluée positivement en 1998 par un collège de cinq experts internationaux nommés par le Président du Conseil, Romano Prodi ; la même année, le projet de digues mobiles était rejeté par la Commission d’évaluation environnementale du ministère de l’Environnement. Sur demande du «Comitatone», le MOSE fut ensuite soumis à un examen approfondi et c’est l’intervention de Romano Prodi pour dédouaner définitivement le projet qui fit sauter ce verrou. Le Corriere della Serra a publié le témoignage d’Andreina Zitelli, ancien membre de la commission nationale d’évaluation de l’impact environnemental du MOSE, où elle explique les pression que Romano Prodi a exercées en personne pour favoriser le projet.
En 2001, le Conseil des Ministres, après avoir évalué l’impact environnemental du projet, lançait la mise en projet exécutive de l’ouvrage en définissant plusieurs prescriptions de projet.
En 2002, le Consortium Venezia Nuova présentait le projet définitif, qui intégrait les exigences du ministère des Transports et de l’Autorité portuaire.
Les travaux du Projet MOSE (acronyme de MOdulo Sperimentale Elettromeccanico, "module expérimental électromécanique" qui n’a donc jamais signifié Moïse comme on le voit dans les médias français) ont commencé en 2003 dans les trois passes du Lido, de Malamocco et de Chioggia.
Aujourd’hui, le projet est achevé à plus de 80% et, selon le Ministère de l’Économie, devrait être achevé en 2016 avec plus de 6 années de retard due essentiellement à des besoins financiers de plus en plus importants, le montant du projet ayant été multiplié par 4 depuis le début des travaux. C’est donc 4 987 millions d’€uros de fonds publics qui ont été engloutis dans la lagune, et qui sont allés dans la seule poche d’une entité privée, le Consorzio Venezia Nuova, seul concessionnaire de l’ouvrage, donc sans aucune concurrence.
En 2009, un contrôle fiscal dans une des 50 entreprises du consortium a permit de mettre en lumière des fausses factures, ou des montants surévalués, émises pour accumuler de fortes sommes sur des comptes détenus à l’étranger. Les magistrats de Venise ont alors enquêté plusieurs années, et, en février 2013 les premières arrestations eurent lieu : Piergiorgio Baita, le président de Mantovani, une des société de construction, et Claudia Minutillo, chef d’entreprise et ancienne secrétaire personnelle de Giancarlo Galan, ancien ministre de Silvio Berlusconi.
Giovanni Mazzacurati, Giorgio Orsoni et Marco Agostini – photo La Nuova di Venezia
En juillet 2013, on arrêtait Giovanni Mazzacurati, surnommé "il grande burattinaio" (le grand marionnettiste) de longue date président du consortium Venezia Nuova. Se reporter à notre article …
L’arrestation en octobre 2013, de l’administrateur de la FIP de Padoue, Mauro Scaramuzza, et de Gioacchino Francesco La Rocca, fils de ‘Ciccio’, un des grands parrains de la mafia apporte la preuve que les travaux du MOSE, censé protéger Venise des aqua alta, ont été la cible de Cosa Nostra. Le plus préoccupnt dans ce dossier c’est que les charnières sur lesquelles pivoteront les fameuses vannes n’ont pas été fabriquées dans l’acier qui était indiqué sur la cahier des charges. Au lieu de charnières en acier moulées, ce sont des charnières en acier soudé qui ont été livrées. Or, les soudures sont un point faible de l’acier qui est rendu cassant. Ces charnières, dont personne ne s’est ému parmi les responsables locaux, sont désormais une bombe à retardement qui provoqueront à terme un désastre. Lire notre article A Venise, la mafia n’existe pas… et pourtant…
Les procureurs Stefano Ancillotto, Stefano Buccini et Paola Tonini ont constaté que l’ancien patron de la société Mantovani, Giorgio Baita avait transféré des fonds pour la construction du MOSE sur des comptes à l’étranger. Une partie de ces fonds à été transférée par Claudia Minutillo dans une banque de San Marino, l’Éden fiscal italien. Selon la Guardia di Finanzia, environs 20 millions d’Euros sont partis dans des caisses noires à l’étranger, notamment au Canada. Mais au-delà des circuits internationaux de la grande finance, l’enquête révèle une corruption triviale au jour le jour, un sentiment d’impunité, une cupidité mesquine et ridicule qui a fait sauter toutes les inhibitions des politiciens et des fonctionnaires.
D’autre part, des pots de vin, versé en espèces dans de grosses enveloppes ont été versés par des entrepreneurs du consortium à divers hommes politiques de divers partis, mais également à des personnages influents dans les décisions administratives. Sur la vidéo ci-dessous, vous pouvez voir l’une de ces transactions filmée par les enquêteurs de la brigade financière :
Ces longs mois d’enquêtes et les interrogatoires de premiers interpellés on conduit à l’aube de mercredi, en Vénétie, Lombardie, Émilie-Romagne et dans le Latium, plus de 300 policiers de la Guardia di Finanza (police financière) à interpeller et écrouer 25 personnes, et placer sous contrôle judiciaire 10 autres, dont l’actuel maire de Venise, Giorgio Orsoni (Parti démocrate, gauche). Nous vous avons informés aussitôt quand le maire de Venise à été arrêté, et dans nous avons détaillé les premières informations et accusations.
L’opération devait s’appeler Antenora, comme dans l’Enfer de Dante, finalement, c’est La cautela qui a prévalu.
Pour tenir la comptabilité des pots-de-vin qu’il distribuait, le consortium Venezia Nuova ne pouvait pas utiliser l’informatique. Les sommes étaient donc scrupuleusement notées à la main sur du papier… comestible ! Mais lorsque les agents de la brigade financière ont perquisitionné les bureaux de Venezia Nuova, les comptables n’ont pas eu assez d’appétit pour avaler toutes les preuves. Une perquisition décidément très agitée. En voyant arriver les agents du fisc, un employé a planqué la caisse noire destinée à Marco Milanese, ce jour-là – 500 000 €uros cash tout de même – derrière une armoire. Les policiers ont posé les scellées sur l’armoire, et l’employé est revenu le soir récupérer l’argent pour qu’on le donne à Milanese. Le subterfuge aurait fonctionné si l’employé ne s’était pas vanté de son exploit au téléphone !
Giorgio Orsoni avait la réputation d’être un grand bourgeois cultivé et fortuné au-dessus de tout soupçon de corruption, ses bureaux ont été perquisitionnés, il est soupçonné d’avoir financé de manière illicite sa campagne électorale aux municipales de 2010. La politique coûte cher, et c’est à contrecœur qu’il accepta "un don de campagne" de 110 000 €uros sous la table pour sa campagne électorale. Le financement de l’activité politique est moins grave que l’enrichissement personnel. Si ce n’est que monsieur le maire a finalement pris goût aux enveloppes et qu’il est repassé à la caisse… pour 450 000 €uros, qu’il persiste à nier pour le moment.
Entendu pour la première fois le 6 juin à 8:00 Orsonni a déclaré que l’argent qu’il avait reçu du consortium était "des dons de campagne" mais jamais "des pots de vins pour favoriser les entreprises qui veulent sauver Venise". Il s’estime donc parfaitement innocent.
Un conseiller régional Pd ainsi que des chefs d’entreprise leurs bras droits et un ancien général font partie de la centaine de personnes mises en cause.
"Une grande partie de ces fonds servait à financer des forces politiques à un niveau local, régional et national", a affirmé le procureur en chef de Venise, Luigi Delpino, lors d’une conférence de presse à la mi-journée. Quarante millions d’euros ont en outre été saisis par la Guardia di Finanza. Le parquet de Venise a également requis l’interpellation de l’ancien gouverneur de Vénétie (1995-2010) Giancarlo Galan, ex-ministre de Silvio Berlusconi et aujourd’hui député de Forza Italia (droite).
En 2003, Giancarlo Galan avait posé la première pierre de ce chantier titanesque, aux côtés de Silvio Berlusconi, alors président du Conseil. Giancarlo Galan, s’accroche désormais au vote de ses collègues qui doivent, ou non, lever son immunité parlementaire : "Ce sont des accusations farfelues, je vais tout vous expliquer… le processus mediatique est monstrueux, je lis des choses à mon propos qui semblent inimaginables. Je ne peux pas répondre pour le moment… mais je ne me laisserai pas détruire!".
Sur la photo ci-dessus, prise le 6 juin 2009, Giacarlo Galan et Sandra Persegato après la cérémonie de leur mariage qui a eu lieu à Villa Rodella. Les chroniqueurs racontent que ce mariage avait ravagé le pays mis en état de siège pendant plusieurs jours : une centaine de fonctionnaires de police des Carabiniers avaient été réquisitionnés, pour assurer la sécurité et surveiller toutes les routes, on avait mobilisé une unité sinophile et des plongeurs pour vérifier le canale Bisatto. parmi les illustres invités, Renato Pozzetto, Brunetta, alors ministre avec sa fiancée Titti. Berlusconi était arrivé en hélicoptère et offrit à la mariée une paire de bracelet qui valent une fortune. Les contribuables contribuèrent financièrement…
L’homme d’affaires padouan Paolo Venuti est considéré comme le gestionnaire du patrimoine illicite de Giancarlo Galan. Pour un patrimoine de 2,8 millions d’€uros, les enquêteurs ont trouvé 5,9 millions d’€uros cachés en dehors du territoire national, dont 1,125 millions d’€uros en Croatie.
Un autre ancien ministre, Altero Matteoli, alors en charge des Infrastructures, est mis en examen pour des histoires à propos de l’assainissement de Porto Marghera.
Le 5 juin, Giorgio Orsoni à été suspendu de sa fonction de maire de Venise par la préfet. Le Conseil régional de Vénétie qui s’est réuni le même jour sous la présidence de Luca Zaia a procédé en urgence au remplacement de tous les dirigeants qui sont impliqués dans l’enquête sur la corruption autour du projet MOSE.
Renato Chisso, ancien conseiller régional, désormais incarcéré à Pisa, clame lui aussi son innocence et selon son avocat "…a rejeté catégoriquement les allégation faites par Baita et Mazzacurati". . . les juges vénitiens ont donc arrêté des anges purs, sans avoir de preuve de leur culpabilité !
Outre des hommes et des femmes politiques de tout bords, la corruption a touché également, Patrizio Cuccioletta et Maria Giovanna Piva, deux ex présidents du Magistrato alle Acque dont la mission était de surveiller le projet MOSE et de veiller que tout soit fait dans l’intérêt collectif. Le premier a touché 400 000 €uros, des vols privés et des repas dans des restaurants de luxe et un emploi fictif pour sa fille Flavia. Il soumettait aux techniciens de Venezia Nuova les rapports à la suite des contrôles qu’il était censé effectuer sur le MOSE. Les enquêteurs ont trouvé deux versions de l’un de ses rapports : l’original et celui "caviardé" de tous les jugements négatifs sur le système de digues flottantes. "Il était tellement à notre service qu’il était prêt à signer une feuille de papier-cul", a élégamment affirmé un témoin aux enquêteurs.
La seconde a perçu 400 000 €uros par an et un rôle fictif à l’hôpital de Mestre rémunéré 328 000 €uros.
Le consortium avait poussé les choses très loin, s’attachant deux jeunes femmes dont le rôle était d’aller recueillir, grâce à leurs charmes, de précieux renseignements. L’une qui était appelée "S", dont le père est un haut responsable des services secrets italiens, aurait un rôle important pour connaître et déjouer le travail des enquêteurs en cours. L’autre, appelée "A" est la fille d’un haut fonctionnaire de Vénétie qui a un rôle essentiel dans de nombreuses activités du Groupe Mantovani. Ces agents secrets du consortium avaient notamment pour mission de connaître avant tout le monde le contenu des rapports à propos de tous les grands travaux initiés en Italie ces dernières années, pas seulement à propos du MOSE. Le consortium, État dans l’État avait désormais les dents longues.
Pour éviter les contrôles fiscaux, la bande s’était assuré pour 500 000 euros – un premier versement sur les 2,5 millions promis – les services d’Emilio Spaziante, un général de la Guardia di Finanzia, censé lutter contre la corruption, le numéro trois du fisc. En Italie, un véritable corps d’armée. Dans le jardin vénitien du général, les enquêteurs ont trouvé 200 000 €uros en espèces, sales et humides. Mais ce qui intrigue les juges, qui ont demandé un complément d’enquête plus approfondi sur cette question, c’est une jeune parente du général, Carmela Clima à déclaré entre 200 et 2011 2.029.473,70 €uros de revenus. Or, pour la même période, ses dépenses s’élèvent à 3.791.886,37 €uros, ce qui fait tout même une légère différence de 1.762.412,67 €uros qui "sont sortis de nulle part".
Les célèbres fiamme gialle ont du se sentir trahis quand ils ont découvert que le numéro trois au sommet le leur hiérarchie était corrompu : trahis en tant que militaires qui traquent sans cesse la corruption, trahis en tant que citoyens et contribuables que leur corps est censé protéger.
Déjà l’an dernier, avait émergé un volet "parentèle" du dossier. Des membres des familles des accusés qui ont bénéficié des largesse du consortium. Le frère de Cuccioletta a bénéficié d’un contrat fictif de collaboration pour 400 000 €uros, sa fille pour 27 600 €uros, etc…
Dans la maison de l’entrepreneur de Vérone, d’Alessandro Mazzi, viale Cortina d’Ampezzo, à Rome, où il s’est fixé depuis plusieurs années, les enquêteurs ont saisi trois Canaletto et un Tintoretto. Le président de Grandi Lavori Fincosit spa et vice-président du Consortium Venezia Nuova a investi dans les œuvres d’art l’argent de la construction du MOSE. Leur valeur pourrait être estimée en 30 et 40 millions d’€uros, mais les flammes jaunes (surnom donné aux militaires de la Guardia finanziare en raison de leur insigne) n’ont pas trouvé ces tableaux certifiés par la Direction générale du patrimoine artistique et historique. S’ils n’ont pas de certification cela signifie qu’ils ont été achetés u marché noir et que leur provenance est donc douteuse.
Nous avons publié l’ensemble des 18 pages de l’acte d’accusation sur notre blog d’actualités :sur Diaspora.
Il y a trois villes en Italie qui laissaient le monde entier la bouche bée : Rome, Florence et Venise. Aujourd’hui, la bouche du monde s’est refermée sur une grimace.
Dans le monde entier, la presse condamne, unanime, le niveau de corruption jamais atteint dans un projet qui, déjà faramineux au départ, à atteint des sommets… et jette le discrédit sur la ville, le région, le pays et au-delà, sur l’Europe entière qui se permet de juger le monde est qui montre qu’elle est encore plus gangrénée par la corruption et les systèmes mafieux.
Combien faudrait il à ces hommes de grosses berlines allemandes, de maisons en Suisse et de comptes en banques dans des paradis fiscaux pour se sentir rassasiés ? La faim est physiologique, mais la cupidité est pathologique.
Matteo Renzi, le premier ministre et Raffaele Cantone le président de l’Organisation Nationale Anti-Corruption ont eu des mots très durs à propos de "l’affaire MOSE". Ils considèrent qu’un politicien coupable de corruption est de la haute trahison, et que tout retour en politique devrait leur être interdit dans un délais imprescriptible de 20 ans. Matteo Renzi veut donc frapper vite et fort. Dès la semaine prochaine, le conseil des ministres adoptera un arsenal législatif anti-corruption. Plusieurs lois ad personam voulues par Silvio Berlusconi pour échapper à la justice, et dont bénéficiaient les escrocs de Venise et de Milan, seront abrogées.
Ironie du sort, Matteo Renzi était en réunion avec Raffaele Cantone, le nouveau commissaire anti-corruption, lorsqu’il a appris le scandale de Venise. "On travaille comme des fous pour faire venir des investisseurs dans le pays et on se retrouve à la case départ, a déclaré le président du Conseil. Ces affaires ruinent l’image de l’Italie."
Ce nouveau scandale politico-financier touche autant la gauche que la droite. Un scandale que s’est empressé de dénoncer le Mouvement 5 Étoiles (M5S) de l’ex-humoriste Beppe Grillo, qui avait créé la surprise en 2013 en s’adjugeant un quart des voix aux législatives. Début mai déjà, dans le cadre du chantier de l’Expo 2015 à Milan, plusieurs responsables politiques, de gauche comme de droite, avaient été arrêtés, accusés de corruption et d’avoir faussé les appels d’offres.
"Que devront encore faire ces partis pour ne plus mériter le vote des citoyens italiens ?" s’est insurgé mercredi le député M5S, Luigi di Maio.
Le sénateur 5 stelle, Michele Giarrusso (avocat de Catania) a déclaré sans ambages : "Pour ceux du MOSE, de l’Expo et du Tav, je voudrais la guillotine" ( le Tav le Train à Grande Vitesse, autant de grands chantiers sur lesquels le système mafieux a mis la main avec son lot de crimes et de corruption).
Ancien maire de Venise, Massimo Cacciari, qui rêve de revenir aux affaires (on comprends pourquoi) a déploré pour sa part que "la façon dont les grands travaux sont lancés dans ce pays, qui génère autant de pots-de-vin, soit criminogène" (parce qu’en France, en Grèce, en Espagne, en Grande-Bretagne, les politiciens corrompus n’existent pas ?)…
La liste des scandales de corruption qui ont récemment défrayé la chronique transalpine tient en effet du bulletin de guerre : l’Expo universelle Milan 2015, la banque Monte dei Paschi de Sienne, le chantier du Tav, l’entreprise publique d’armement Finmeccanica. Au cours des dernières semaines, deux anciens ministres, Claudio Scajola et Corrado Clini, ont été incarcérés. Aucun des grands chantiers nationaux n’a échappé depuis plusieurs années aux combines entre responsables politiques et entrepreneurs : la préparation du G8 sur l’île de la Madeleine, la reconstruction de L’Aquila après le tremblement de terre, les championnats du monde de natation à Rome. La Cour des comptes évalue à 60 milliards d’€uros publics le coût annuel de la corruption dans la péninsule.
Pendant ce temps, sont arrivés les premiers appels devant la Cour de révision, ceux d’Andrea Rismondo (avocat d’Andrea Franco), Luciano Neri (Tommaso Bortoluzzi), Stefano Tomarelli (Angelo Andreatta), Federico Sutto (Paolo De Girolami).
Le premier ministre italien qui a réussi son pari de relancer l’économie italienne pourra t’il réussir à faire en sorte que Crimes et châtiment, en Italie, est juste le titre d’un roman russe ?
Car jusqu’à présent, il y a toujours eu l’amnésie, une amnistie, une ordonnance voir une loi spéciale pour sortir les hommes politiques corrompus du pétrin, et parce que nous avons pour ces choses, la mémoire d’un poisson rouge (quatre secondes) et que seuls quelques uns d’entre nous se souviendront très bien.
Le grand déballage ne fait que commencer, comme on dit dans la lagune, quand la marée commence à monter… et il restera, après la fin des travaux, à gérer le cout de la gestion du MOSE, évaluée par le consortium à plusieurs dizaines de millions d’€uros par an.