Par Stephane Bigeard |
Je vous offre ce très beau texte,(déjà publié en janvier 2008) écrit par un ami de longue date, Christian GERARD.
Cet homme connait bien les coeurs (il est officiellement Cardiologue!), mais il nous prouve qu'il n'est pas seulement un spécialiste du coeur en tant qu' "organe thoracique creux et musculaire, principal organe de circulation du sang"!... mais aussi du coeur en tant que siège des sentiments, des passions, de l'amour, de la générosité, des pensées intimes ...
J'ai besoin d'air. de l'air, de l'air !!! Vous m'entendez ? Allez ouste, déguerpissez !
Entre ces gens qui vous regardent d'un air méfiant, d'un air soupçonneux, entre ceux qui prennent tout de suite leurs grands airs quand ils vous croisent, parce qu'ils se croient importants, ou ceux qui viennent vous pomper l'air, avec tous leurs ennuis, leurs détresses, leurs malheurs... ça devient irrespirable ! Fichez-moi la paix !
J'ai besoin d'air. j'ai besoin de changer d'air !
J'ai alors trouvé la solution : je me suis fabriqué ma bulle d'air, mon espace vital personnel.
Ah ! Elle était bien cette bulle. Je pouvais y respirer enfin tranquillement, seul, loin des soucis. Car cette bulle je l'avais faite hermétique. Impossible d'être pollué par ce qui m'entourait. Aucun bruit ne pouvait m'atteindre. Les cris de détresse, les appels à l'aide, rien ne pouvait troubler ma paix. Je n'entendais rien.
Et puis cette bulle, je l'avais faite bien matelassée, avec tout ce petit confort matériel que j'avais accumulé.
Je pouvais m'envoyer en l'air quand je voulais, sans me faire de mal. Et tant pis, si quand je retombais, j'en écrasais quelques uns; je ne sentais rien dans ma bulle, je ne voyais rien.
Une bulle où rien ne pouvait rentrer. Ah! Elle était belle , elle était solide ma bulle. J'étais enfin tranquille, heureux dans mon petit bonheur personnel.
Du moins le croyais-je. Car, petit à petit, au bout d'un certain temps, j'ai fini par ressentir que j'étais seul, vraiment seul.
J'ai pris conscience de ma solitude. Et si ma bulle était solide, mon coeur lui était fragile ; or, la solitude, c'est ce qui vous ronge le coeur et finit par vous détruire petit à petit. Dans ma bulle, comme qui dirait, je ne manquais pas d'air ; mais je manquais d'amour.
Et, sans amour, cela devient vite étouffant; je sentais l'effet de serre, j'avais l'impression de vivre dans de l'air comprimé !
Je m'étais construit une bulle pour être tranquille, et je me retrouvais au bout du compte, emprisonné, seul dans ma bulle.
Oh cela ne se passait pas à l'ère de la préhistoire. Non, c'était aujourd'hui , au 21ème siècle.
De l'aide!
De l'aide, mais personne ne pouvait m'atteindre. Ah , je devais avoir un drôle d'air, seul dans ma bulle.
En fait, je n'étais qu'un pauvre hère. Il fallait que je m'en sorte. J'essayais alors de chanter pour passer le temps; mais je n'avais même plus un air en tête. Il fallait que je sorte. Oh, je n'avais pas le mal de l'air, j'avais le mal d'amour.
Il fallait que je retourne à l'air, là où est la vie ; là où l'on respire les bonnes et les mauvaises odeurs mais, au moins, là où l'on respire quelque chose.
Il fallait que je retourne dans l'air du temps, l'air du monde, où l'on croise certes parfois, des gens à l'air dédaigneux, mais aussi heureusement, d'autres à l'air sympathique, et puis, ceux qui, ayant l'air de rien, et sans en avoir l'air, vous font un bien fou, par un sourire, un regard ou un mot.
Bref, j'ai fini par crever ma bulle d'air. Oh, tout de suite ça n'a pas était facile.
Je me suis pris en pleine figure tout ce qui s'était amassé autour de ma bulle et que je n'avais pas voulu voir ou entendre ; mais vous ne pouvez pas savoir le bien que peut vous faire une bonne bouffée d'air frais!
J'ai senti l'air; je l'ai senti sur mon visage.
J'ai humé l'air, j'ai aimé l'air.
Et puis il y a eu ces airs qui venaient de loin et qui irrésistiblement m'attiraient à eux.
Ils me rappelaient, ils me rappelaient... des airs de musique.
Et je me suis retrouvé au ... Festival d'Trois mages. (Un Festival du Creusot!) C'était magique!
Tout ce monde rassemblé, et personne ne manquait d'air.
Au contraire, chaque nouvel arrivant était une bouffée d'oxygène pour tous les autres; c'était le miracle de la multiplication de l'air.
Je pouvais enfin souffler; je n'étais plus seul.
Et c'est alors, que j'ai entendu ce que je ne pouvais plus entendre depuis des années dans ma bulle;
j'ai entendu une brise légère et cette brise a parlé à mon oreille et m'a dit:
" Respire!...
laisse-toi caresser par l'air frais de la tendresse, celle que tu reçois et celle que tu peux donner...
Ouvre-toi!...
Ne t'enferme pas!
Tu aurais pu exploser dans ta bulle !
Alors que tu pensais t'éclater, tu te croyais gonflé à bloc ? Tu as failli en crever !
C'est l'Amour ta vraie respiration !
Il est comme l'air : insaisissable mais bien réel !
Il t'enveloppe et te pénètre, Il est ton souffle, et parfois ça décoiffe !
Dans les tempêtes et les tremblements de terre, Il est cette caresse légère qui te donne confiance.
SANS CET AIR, TU T'ENTERRES !!!
Auteur : Christian GERARD, du Creusot