Je viens vers vous humblement et rageusement. Pour vous dire la douce inquiétude qui étrangle mes jours. Longtemps la lumière a guidé mon être. Elle est toujours là, la lumière, ce matin, légère, gracile. Mais moi, je ne la réfléchis plus. Elle bute contre ma surface tactile, elle lève l'encre et part vers de meilleurs pores.Le temps s'est accéléré pour moi ces derniers temps. Je vois les paysages défiler. Et ce ne sont que des images fuyantes. Le voyage m'est plus que jamais étranger et lointain. Le voyage que j'ai tant désiré. La langoureuse contemplation des choses. Un jour, je fus, sans le savoir, j´étais, je voyageais, je partais et je revenais. Je me perdais et me retrouvais. J'aimais les rues, les cafés, les gens, la foule. J'aimais m'oublier, me fondre, me dissoudre. Je pouvais le faire. J'étais jeune.Je me force à revenir au présent. Je me force à effacer le passé. Si plaisant, si riche, regorgeant de moments précieux. Qui devraient m'accompagner jusqu'au dernier soupir. Qui me font mal parce qu'ils ont été. Comprenez-vous mon désarroi, comprenez-vous ma fadeur, non, vous ne pouvez pas comprendre, vous n'êtes pas à ma place. Aucun de vous, compagnons de périple, ne peut se mettre à ma place. Et je ne peux me mettre à la place d'aucun de vous.Où vous cachez-vous, où puis-je vous trouver, eau fraîche qui seule peut épancher ma soif...J'écoute la musique, je vois tout ce qui bouge autour de moi, le monde est en paix, et je m'en veux de ne pas être en paix avec lui. Je m'en veux d'en vouloir à la vie. Je m'en veux de me laisser entraîner dans les eaux troubles du doute et du spleen.Je voudrais ne pas désirer. Juste ressentir ce que l'instant me donne. Oublier tout le reste? Stupide pensée, égoïste et ignorante! Je ne peux pas rentrer dans cette béatitude-là. Je n'ai pas l'envie de le faire, ni le pouvoir.Que me reste-t-il alors? Où me réfugier, dans quelle demeure poussiéreuse puis-je me promener et tourner en rond, indéfiniment?Aujourd'hui sera un jour petit. Il paraît que c'est dans les petites choses que se cache le bonheur. Désolé, la phrase m'a échappé. En principe, je me refuse à dire des platitudes. Mais parfois il est bon de se lâcher.Ah oui, un petit mot sur "The descendants" d'Alexander Payne. Comment peut-on ne pas aimer cette petite comédie douce-amère, joliment interprétée et qui est bercée par de si délicieuses chansons hawaïennes?