Autant le dire simplement : courez visiter l’expo du Musée d’ethnographie de Genève : ” Le vodou, un art de vivre “. Autour de Général Trois Étangs (à droite) et capitaine Bizango (à gauche), vous attendent une trentaine de bizangos, jamais montrés en Europe. Issus de la collection de Marianne Lehmann, ces mannequins rembourrés ont le corps couvert de miroirs, au visage faits de crânes ou de surmodelages, les membres quelquefois amputés. Ils s’accompagnent de bouteilles de cordes-chaînes, comme souvent dans le vodou. C’est la dernière salle de l’exposition. Une véritable révélation ! Bizango signifie ” apprendre à changer “, écrit dans le catalogue l’antropologue haïtienne Rachel Beauvoir-Dominique. Bizango sert à prouver qu’un homme peut apprendre à changer. “
C’est réussi. Entrer dans cette salle c’est comme (on l’imagine!) Howard Carter découvrant le tombeau de Toutânkhamon en 1922, la porte d’entrée d’une Histoire et d’un Mystère.
L’ensemble de l’expo n’a pas ce caractère inédit, mais le choix des commissaires (Jacques Hainard et Philippe Mathez) fait progresser le visiteur très simplement d’un poème de Baudelaire (Le Flacon) à une énorme caisse vide, puis à une salle laissant apparaître dans les caisses entrouvertes les clichés et fantasmes du vodou puis, progressivement, l’imagination se déploie jusque dans un autel de rite pétro et sa dominante rouge qui vous plonge ensuite dans la pénombre mystérieuse de la salle bizango. Au final, une galerie des glaces renvoie au visiteur son image démultipliée, l’exposition disant très subtilement que le vodou vu par les occidentaux est d’abord une question de regard. C’est magistral, humble et digne.