Ce décret, pris en application de la loi du 14 mars 2011, dite loi LOPPSI 2, instaure un nouveau fichier recensant des données à caractère personnel relatives aux personnes à l’encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elles aient pu participer à la commission de certains crimes, de délits ou contraventions de 5ème classe, ainsi qu’aux victimes de ces infractions et aux procédures de recherche des causes de la mort ou de recherche des causes d’une disparition.
Ce nouveau fichier, qui sera commun à la police nationale et à la gendarmerie, est destiné à remplacer leurs anciens fichiers respectifs, le STIC et le JUDEX et servira dans le cadre d’enquêtes judiciaires (constatation d’infractions, recherche des auteurs d’infractions, rassemblement de preuves) et d’enquêtes administratives (telles les enquêtes préalables à certaines embauches).
Mais ce nouveau fichier a, dès l’apparition du décret l’instaurant, provoqué de nombreuses réactions.
En effet, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (ci-après « la CNIL »), dans son avis de 2011, avait déjà émis quelques réserves quant à l’utilisation de la reconnaissance faciale à partir de photographies des personnes dans le but d’identifier plus rapidement les auteurs d’infractions.
Ayant des craintes similaires et plus encore, la ligue des droits de l’Homme a exercé un recours pour excès de pouvoir auprès du Conseil d’Etat.
Elle faisait notamment valoir, d’une part que le fichier TAJ pouvait recenser des données à caractère personnel de personnes qui n’ont finalement pas été condamnées, ce qui pouvait aller à l’encontre du droit à la présomption d’innocence et, d’autre part, que l’utilisation du procédé de reconnaissance faciale représentait une menace pour la liberté individuelle et le respect de la vie privée des individus.
Malgré les arguments de la ligue, le Conseil d’Etat a pris le parti de valider le décret après avoir minutieusement examiné chaque aspect contesté et dont les points à retenir sont les suivants :
- sur l’atteinte à la présomption d’innocence : les juges ont soulevé qu’aucune atteinte n’était à craindre dans la mesure où les personnes relaxées ou acquittées étaient effacées du fichier sauf par décision du procureur de la République en cas de menace à l’Ordre public ;
- sur la reconnaissance faciale et le droit au respect de la vie privée : il a été jugé que l’utilisation de ce procédé garantissait l’efficacité de la constatation d’infractions et que, compte tenu des restrictions et précautions dont le traitement étaient assorti, les données collectées étaient adéquates, pertinentes et non excessives par rapport aux finalités légitime du traitement ;
- sur la durée de conservation et les personnes habilitées : le Conseil d’Etat a décidé que les durées de conservations, proportionnelles à la gravité des infractions, étaient nécessaires à la finalité du traitement et que le champ des personnes habilitées à accéder au fichier ne portait pas atteinte au respect de la vie privée des personnes concernées.
- sur les droits des personnes : pour finir, il est rappelé dans cet arrêt que les droits d’opposition et de rectification des informations contenues dans le TAJ étaient effectifs et que toute décision en matière d’effacement ou de rectification prises par le Procureur de la République pouvait faire l’objet d’un recours devant le juge administratif.
Ainsi, si tout est mis en œuvre pour respecter les dispositions de la loi Informatique et libertés du 6 janvier 1978, mais la CNIL veille fortement au respect de ces obligations et souhaite protéger les citoyens dans la constitution des fichiers judiciaires.
Les administrations et commissariats à l’origine de la saisie de ces fichiers mettent d’ores et déjà en place des audits Informatiques et libertés de leurs procédures afin de s’assurer du maintien conformité de ces fichiers sensibles.
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