J'ai récémment été averti par un auteur de deux vendeurs tiers de la place de marché Amazon (Amazon marketplace) pratiquant des rabais inquiétants sur mes livres papier neufs. Je savais déjà qu'Amazon avait la possibilité de solder mon livre papier, et cela me va du moment que mes revenus d'auteurs continuent à correspondre au prix que j'ai défini (ce qui est le cas). Je ne suis pas un grand supporter du prix unique du livre, parce que j'estime que cette loi est un moyen pour les éditeurs de continuer à vendre leurs livres à des prix trop élevés pour une grande partie des lecteurs (et là, je pense particulièrement à l'ebook). Non, ce qui me gêne dans ce concept de livres neufs écoulés par des vendeurs tiers, c'est la perte de contrôle que cela engendre pour l'auteur autoédité.
Les deux vendeurs qui pratiquent ces remises sont livres_allemands et books_and_music. Si vous cliquez sur ce lien, vous vous apercevez qu'amazon n'est plus le seul à vendre mes livres papier à l'état neuf (l'onglet du dessus spécifie bien "neuf à partir de"). Cela a été une surprise pour moi, puisque Amazon est le seul vendeur en principe habilité à écouler mes livres papier fabriqués par Createspace.
En principe... car il m'est revenu que j'avais opté chez Createspace pour la "distribution étendue" qui permet à mes livres papier d'être vendus chez de grands libraires aux Etats-Unis. Createspace, afin de distribuer mes livres papier aux Etats-Unis, fait appel à une grande société spécialisée dans la distribution, Ingram.
Ingram a la particularité de posséder des imprimeries à la demande parmi les plus performantes au monde, et détient notamment la société Lightning Source (dont j'utilise aussi les services pour des livres que je distribue et vend moi-même), et Ingram Spark, qui s'adresse à des auteurs autoédités (auquel je n'ai pas recours). Et Ingram fait appel à des partenaires pour la distribution de livres.
Or, il se trouve que les deux vendeurs que j'ai cités en début d'article, livres_allemands et books_and_music, après vérification de l'auteur qui m'avait alerté, (on peut retrouver le numéro de TVA en cliquant sur le lien du vendeur chez Amazon, puis il suffit de se rendre sur ce site pour l'identification), correspondent à un prestataire nommé The Paperback Shop. Prestataire qui n'est autre que l'un des partenaires d'Ingram, comme l'atteste ce document.
Au passage, si vous vous intéressez à la création de jeux vidéos, n'hésitez pas à acheter l'ebook de l'auteur qui m'a prévenu.
Après mûre réflexion, je crois avoir reconstitué les pièces du puzzle. L'auteur qui m'a prévenu ne passe pas par Createspace, mais par Ingram Spark. Ma théorie, c'est que The Paperback Shop, en tant que prestataire d'Ingram, distribue à la fois les livres de Createspace et d'Ingram Spark sur le territoire européen. The Paperback Shop est donc aussi comme on l'a vu un vendeur tiers Amazon.
Pourquoi Amazon permet-il à ces vendeurs de proposer des livres neufs sur son site, sur les pages des auteurs faisant appel à Createspace? Tout simplement pour favoriser la concurrence et rendre les livres plus attractifs en faisant baisser les prix, y compris des ouvrages d'auteurs autoédités.
A la suite de divers échanges avec Createspace, il apparaît que ces livres vendus par des vendeurs tiers, même à prix plus bas, donnent droit à des revenus d'auteurs équivalents aux livres vendus par Amazon directement. C'est aussi valable pour Ingram Spark. Je cite texto la réponse qui m'a été faite chez Lightning Source: "You will always receive the same publisher compensation, some of the third party sellers are our channel partners and any that aren’t would still need to order through one of our listed wholesale channels so we would always have record of any sales." "Vous recevrez toujours le même revenu d'auteur, certains des vendeurs tiers sont nos partenaires, et ceux qui ne le seraient pas auraient tout de même besoin de commander par nos canaux où figurent vos prix de vente, donc nous aurions une trace de chacune des ventes."
J'ai bien réfléchi à la situation. Ces vendeurs tiers, à ma connaissance, lorsqu'ils obtiennent une commande d'un client Amazon, ne permettent pas une remontée en classement de mon livre sur le site d'Amazon. Seule une vente par Amazon (j'en suis presque certain, mais cela reste à vérifier) permet la montée dans le classement des ventes de mon livre. La conséquence logique, c'est que je n'aurais conscience de cette vente que lorsque Createspace la fera figurer dans mon tableau de droits d'auteur sur son site.
Oserais-je dire, si Createspace fait figurer cette vente sur le tableau de bord? En étant un peu parano, on peut imaginer une société écran chargée de vendre au plus bas prix sans que l'auteur ne soit tenu au courant d'une seule des ventes. Qu'on me pardonne ma défiance, je suis romancier, j'ai de l'imagination.
Autre fait troublant, lorsque je me suis inquiété de savoir ce que devenaient les fichiers de mes livres (les fichiers qui permettent à l'imprimeur de les fabriquer), voici ce que m'a répondu l'employé de Createspace: "If you have made your title available through Expanded Distribution, your files may be sent to the distributors with whom we have a relationship in order to expedite order fulfillment. Please be assured that your files will not be sent to additional outlets by CreateSpace or these distributors. " "Si vous avez autorisé la Distribution Etendue, vos fichiers peuvent être envoyés à des distributeurs avec lesquels nous sommes en relation, afin de satisfaire la commande. Soyez je vous prie assuré que vos fichiers ne seront pas envoyés à des organes additionnels par Createspace ou ses distributeurs."
L'un de nos défauts à nous autres autoéditeurs (en tout cas le mien), c'est que nous aimons garder le contrôle. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons choisi de la jouer solo, nous haïssons l'absence de transparence des éditeurs, l'absence de vision et la précarité qui en résulte (ou en tout cas le sentiment de précarité).
Là, on se rend bien compte que la distribution étendue génère toute une série d'inconnues. Nos fichiers se mettent à se balader sur leurs petites pattes électroniques, des vendeurs que nous ne connaissons ni d'Eve ni d'Adam se mettent à faire le business quasiment à notre place, et les moyens de contrôle ne dépendent que de la bonne volonté de partenaires comme Createspace.
J'ai donc pris à titre préventif la décision de ne plus passer par la distribution étendue avec Createspace, pour tous mes livres sauf un: The Breath of Aoles. J'ai gardé la distribution pour celui-là, me disant que je pouvais sacrifier d'éventuelles ventes non répertoriées à une meilleure visibilité chez des distributeurs en ligne comme Barnes&Noble, visibilité qui pourrait être bénéfique à la vente d'ebooks, prédominante dans le domaine de la Fantasy aux Etats-Unis.
Il faut évidemment faire attention quand vous supprimez de la sorte un ou plusieurs distributeurs, car si vous vendez, votre classement sur d'autres plates-formes de vente va s'effondrer. Il n'est d'ailleurs pas du tout évident que cette manoeuvre me permette de ne plus avoir ces vendeurs tiers en lien sur chacun de mes livres papier. Nous verrons, ce genre de changement prend un certain temps avant d'être effectif.
Si Amazon et Createspace souhaitent me rendre plus confiants sur le sujet, à eux d'amener un peu plus de transparence à propos de ces vendeurs tiers, en me permettant par exemple de savoir sur mon tableau de bord d'où provient une vente (à défaut du nom du client, au moins celui du vendeur). Il serait bon que les ventes de livres neufs par des vendeurs tiers fassent remonter le classement sur le site d'Amazon. Je veux bien travailler avec d'autres gens qu'Amazon, Createspace ou Lightning Source, mais il faut au minimum que les conditions d'une relation de confiance soient établies.
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