Prodigieux médecin !
- Du mieux qu’ils peuvent. Hôpital Ôedo, Japon. Un patient, touché au thorax lors d’une prise d’otages dans une banque, décède malgré les soins prodigués par le personnel. De leur côté, les trois malfrats tiennent toujours en joue les clients de l’établissement bancaire. Parmi eux, le docteur Juzaburô Kujô, médecin trentenaire réputé et craint. Après une bisbille entre deux bandits concernant la blessure mortelle de l’otage, l’un des deux tire une balle dans l’abdomen de l’autre. C’est à ce moment-là que le célèbre médecin intervient, transfusant en direct le sang d’une jeune maman au blessé. Quelques minutes plus tard, la police lance l’assaut, capture les malfrats et délivre les otages.
- Les craintes de l’interne. Dans l’équipe féminine des internes des urgences, la réputation de coureur de jupons de Kujô est très grande. La doctoresse Tachibana en fait partie, entre attirance-répulsion, elle est déstabilisée. A peine le temps de se lamenter qu’un patient arrive ayant des douleurs à l’épaule et à l’abdomen. Elle doit agir seule, le titulaire étant déjà occupé. Alors qu’elle n’arrive pas à soigner l’homme, quasi mort, arrive le docteur Kujô…
- La détermination de ses mains. Le jeune médecin Nakamura est hésitant. Lors d’une intervention de haut vol, il n’a plus foi en ses capacités ni en ses mains. Le patient, dont l’aorte abdominale est touchée par un anévrisme, risque de mourir. Le docteur aux mains d’Horus intervient et réussit à rendre sa confiance au jeune interne.
- Accueil des blessés dans un hôpital complet. Les urgences de l’hôpital Ôedo sont ce soir-là, débordées. Plus une place de libre pour accueillir de nouveaux patients. La responsable du triage est intransigeante : plus aucun blessé ne sera admis. Pourtant les pompiers de Tokyo ne trouvent aucun lieu pour un homme dans un état critique. Passant outre les indications de ses supérieurs, le célèbre docteur accepte le patient…
- Les deux vies. Sacré dilemme pour les médecins de l’hôpital : la vie d’un futur bébé ou la vie de la maman. L’obstétricien n’étant pas disponible, c’est Kujô qui s’occupe de ce cas si particulier…
Quel manga ! Le lecteur est accroché à l’album du début à la fin grâce à des mini-récits d’une vingtaine de pages, captivants et très bien écrits. Très documenté, cette saga médicale est à mi-chemin entre les séries Urgences (les cas, les termes techniques) et Docteur House (par son personnage principal). En effet, Kujô, doué de pouvoirs quasi divins tel Horus, est reconnu comme un très grand chirurgien. Le dieu égyptien ayant la faculté de guérison. Comme le célèbre médecin de la série de TF1, il est peu enclin à sa hiérarchie ; prétentieux, arrogant et imbu de sa personne, il met pourtant toujours tout en œuvre pour sauver une vie. Afin de conférer des espaces de respiration dans les moments de tension, Seki Tatsuya apporte un ressort humoristique par le côté séducteur du docteur et les réactions qu’il provoque sur les jeunes internes femmes. Le trait vif du mangaka s’accompagne toujours de hachures et de frottements pour évoquer les scènes d’opérations délicates. Les récits sont parfois agrémentés d’illustrations magnifiques pleine page. Décidément, les éditions Komikku nous gâtent ! Après les excellents mangas Le chef de Nobunaga et Eurêka, elles nous régalent avec cette merveilleuse série.
La main d’Horus : un premier volume très prometteur, dans le monde médical où le héros, à la forte personnalité, ravira les amateurs du genre. A lire !
- La main d’Horus, volume 1
- Auteur : Seki Tatsuya
- Editeur: Komikku
- Prix: 7.90€
- Sortie: 15 mai 2014
Chaleur(s) estivale(s)
Montpellier. Louise, sa cousine Manon et leurs familles se retrouvent pour passer des vacances dans la ville héraultaise. Pour la première, les temps sont durs ; elle ne sait plus où elle en est avec son petit copain Simon. Pour embêter sa cousine, la seconde change son statut Facebook de « en couple » à « célibataire ». Si elle accuse le coup, elle passe finalement vite à autre chose grâce à Manon qui lui remonte le moral en lui parlant des beaux garçons qu’elles verront à la plage.
Le lendemain, Louise explore les fonds marins en apnée-tuba, donc proche de la côte et heurte Quentin, un jeune ado qui joue au volley dans l’eau. Après quelques remarques amusées de Manon, cette dernière franchit l’obstacle et invite le jeune garçon et Luca, son meilleur ami, à les rejoindre à la séance de cinéma en plein air sur la place de la cité, le soir-même.
Après une séance d’essayage comique pour habiller Louise, les deux adolescentes partent avec leurs parents : la mère de Louise attend un garçon tandis que la mère de Manon, divorcée, est en couple avec Jean-Jacques, le nouvel homme de sa vie. Sur la place, les deux cousines rejoignent Luca et Quentin. C’est le début de longues discussions accompagnées de baisers parfois un peu fougueux…
Le récit sensible de Max de Radiguès mélange subtilement les sentiments (l’amour, l’amitié…) et cette belle aventure estivale, teintée d’un très bel humour. L’auteur du sublime Orignal (Delcourt, 2013) est un fin observateur du monde des adolescents et le restitue admirablement dans Un été en apnée. Cette fois, il prend le parti de raconter sa vision de Louise et réussir parfaitement à se glisser dans la peau de l’adolescente. Ce côté féminin de l’auteur d’origine belge apporte énormément de fraîcheur dans le monde du 9e art et lorsque le lecteur referme l’album, il se dit qu’il a passé un bon moment. Les petits riens de la vie quotidienne de ces deux anti-héroïnes sont sublimés par un sens aigu de l’observation des jeunes. Les personnages sont bien cernés, les histoires qui s’entremêlent aussi. Le trait délicat de l’auteur de Cowabunga est d’une grande lisibilité.
A noter que l’album sera post-publié en juillet-août dans le magazine Je bouquine, soit deux mois après sa sortie en librairie et donc un potentiel lectorat de 343 000 ados.
Avec Un été en apnée, le multi-récompensé grâce à ses deux albums précédents, Max de Radiguès frappe fort encore une fois avec cette très jolie histoire.
- Un été en apnée
- Auteur : Max de Radiguès
- Editeur: Sarbacane
- Prix: 12,90€
- Sortie: 07 mai 2014
Snoopy et compagnie
Pour ceux qui ne connaîtraient pas l’œuvre de Charles Monroe Schultz (1922-2000), voici quelques indications :
Les Peanuts, plus connu en France sous le nom de Snoopy, est un comic strip créé en 1950. Au nombre de 17 897, ils furent diffusés dans 2600 journaux de 75 pays différents et en 21 langues. Déclinée en pièces de théâtre, en comédies musicales et en dessins animés, la série met en scène Charlie Brown et son chien Snoopy.
A la naissance des Peanuts, 7 journaux les publient dont le Washington Post. Influencé par Krazy Katz, Popeye ou encore Skippy ; Schultz avouera qu’il n’aimait pas le nom de Peanuts (cacahuète) et aurait préféré Good ol’Charlie Brown (Bon vieux Charlie Brown).
Il débute ses histoires avec Charlie, Shermy, Patty et Snoopy. Pour les représenter, il les dessine avec un grosse tête ronde, un petit corps, la bouche et deux points pour les yeux. Le chien se comportait comme tel, aboyant et courant à 4 pattes. Ce n’est que plus tard qu’il commencera à se comporter comme un humain.
Parmi les personnages :
- Charlie Brown : petit garçon malchanceux, maladroit et déprimé, il rate tout ce qu’il entreprend.
- Snoopy : beagle, c’est le chien de Charlie. Philosophe sur vie, il dort sur sa célèbre niche rouge, se prend tour à tour pour un écrivain, un astronaute, pilote de la Première Guerre mondiale tel le Baron Rouge. Son meilleur ami est Woodstock, un petit oiseau jaune.
- Lucy. Enquiquineuse dominatrice de la série, elle est autoritaire et très cynique.
- Linus. Frère de Lucy et meilleur ami de Charlie, il est l’intellectuel de la bande.
- Schroeder. Virtuose du piano-jouet, il a une passion pour Beethoven. Il ne voit pas l’amour immodéré que lui voue Lucy.
- Marcie. Intellectuelle, elle est secrètement amoureuse de Charlie.
- Peppermint Patty. Sportive, n’aimant pas l’école, elle est la seule qui adhère aux délires du chien, le prenant même pour un vrai garçon.
Dans ce tome 1, Snoopy se met à écrire des romans, Linus nous apprend le véritable sens de Noël, Charlie et Schroeder jouent au base ball, Lucy se comporte comme une dictatrice et à un avis sur tout et Schroeder joue du piano…
Entièrement remasterisée, cette édition compile les strips publiés dans les Sunday Pages des années 1970 et 1971. Et en 2015, Snoopy fêtera ses 65 ans et pour l’occasion : un très beau programme court animé sera diffusé sur France Télevision à la fin de l’année 2014 à travers 500 épisodes d’une minute trente créé Normaal, maison de production angoumoisine qui a déjà créée une série Gaston Lagaff ; et un long métrage 3D est en cours de production par la 20e Century Fox et Blu Sky (sortie prévue en 2015 dans 75 pays).
- Snoopy et le petit monde des Peanuts
- Auteur : Charles Schultz
- Editeur: Delcourt
- Prix: 14.95€
- Sortie: 14 mai 2014
La folie du fugueur
Algérie, dans les années 1880. Albert Dadas s’amuse dans un arbre et fait une chute sur la tête. Agé de 8 ans, le jeune garçon est transporté à l’hôpital mais n’est pas très bien soigné. C’est à partir de ce traumatisme crânien que le jeune adolescent va commencer à fuguer. Cette irrésistible envie inconsciente se présentera une première fois sur un marché algérien : vendeur de parapluies, il ne se rendra compte de rien lorsque son frère aîné viendra le chercher.
Comme un somnambule, il va partir dans des villes ou des pays européens sans s’en rendre compte. Il commence à marcher allant de Pau à Marseille, d’Amsterdam à Berlin, de Moscou à Constantinople. Parcourant jusqu’à 70 kilomètres par jour, il se « réveille » souvent dans un hôpital ou encore en prison. Sans identité, sans papiers et sans argent, il regagne sa résidence bordelaise à chaque fois.
En mai 1886, il est ausculté par Philippe Tissié, un jeune psychiatre qui va pouvoir l’aider. En recherche de sujet pour sa thèse, le médecin se voit confier par le Professeur Pitres, la guérison de celui que les infirmiers surnommaient Le prophète . Pourtant, rien ne va être simple pour lui, à peine entré à l’hôpital, il s’enfuit déjà. De retour en ville, il est malheureux, souhaiterait que tout cela s’arrête en étant soigné, rester à Bordeaux et se marier.
C’est le début d’examens cliniques, de la marche, des croquis anatomiques mais aussi des séances d’hypnose. Il commence aussi le récit de ses voyages et le processus mental engagé lorsqu’il partait : « Tout d’un coup, j’ai très chaud, j’ai des suées, j’ai mal à la tête… Il faut que je marche… Et après je ne me souviens de rien. »
Très documenté et fondé sur des faits historiques, le récit de Christophe Dabitch est sensible et très captivant. En effet, alors que le sujet n’est pas sensationnaliste, le lecteur est accroché par cette histoire hors du commun. Thématique méconnue, le travail du scénariste de La colonne (Futuropolis, 2013) est précis et met en lumière une rencontre de deux hommes au destin singulier qui changera leur vie. Après les nombreuses séances, Albert pourra mener une vie normale, se marier et avoir une fille ; tandis que Philippe deviendra célèbre grâce à ses recherches sur les Aliénés voyageurs. Le contexte médical est bien décrit dans l’album ; une période où la folie et l’aliénation deviennent des domaines d’expérimentations comme les autres. Si le scénario est fort et très bien écrit, nous sommes émerveillé par le graphisme de Christian Durieux. Véritable force de cet album, le trait en noir et blanc, teinté de gris dégradés, de l’auteur de Oscar (Dupuis) est sublime. Les cases mettant en scène les portraits ou les bustes des personnages sont d’une grande expressivité. Les planches muettes du périple de Dadas en Russie (pages 28 à 30) sont magnifiques, proches des tableaux des maîtres russes.
Le captivé : album à la thématique originale mettant en scène deux hommes hors norme et au graphisme enchanteur.
- Le captivé
- Auteurs : Christophe Dabitch et Christian Durieux
- Editeur: Futuropolis
- Prix: 19€
- Sortie: 05 mai 2014
Prostitution 2.0
Lagos, Nigéria. Mino, musicien, enregistre son nouvel album No more cryin for Africa avec des artistes locaux.
6 mois plus tard, Lyon. L’homme se met en quête de trouver son DVD dans une FNAC. Là-bas, il y croise Grace, une nigériane, qui regarde comme lui l’objet. Alors qu’il insiste pour avoir son numéro de téléphone, la jeune femme consent à lui laisser. Quelques jours plus tard, ils se retrouvent dans son appartement ; leur rapprochement physique est indéniable. Après la soirée, la femme quitte le lieu et l’homme s’engouffre dans sa voiture. Quelle ne fut pas sa surprise en découvrant Grace sur les trottoirs de la ville en train de se prostituer. Un échange animé s’ensuit et Mino ramène la femme à son hôtel.
Le lendemain, il doit se faire une raison et dépose la femme à Perrache, quartier de la gare à lyon où se concentre les prostituées. Des hommes s’acharnent contre elle et essaient de l’intimider. Mino la rejoint et Grace lui explique sa véritable situation : elle doit une grosse somme d’argent à La présidente, une camerounaise qui organise le trafic de nigérianes en France. Si elle ne s’exécute pas, les hommes de main de la mère maquerelle s’en prendront à sa petite sœur.
Apprenant sa liaison extra-conjugale, sa femme le jette dehors. Il n’a plus qu’un seul but : aider Grace à trouver l’argent pour la délivrer de sa condition…
419 (For one nine) est le numéro de l’article pénal nigérian condamnant l’escroquerie la plus répandue sur internet. En utilisant les messageries électroniques ou les réseaux sociaux, les malfrats abusent de la crédulité des victimes pour leur soutirer de l’argent. Plusieurs centaines de millions de dollars transitent ainsi dans le monde. Le récit sombre de Loulou Dedola dépeint une vérité crue mêlant la prostitution, l’argent, les trafics, le néo-banditisme (arnaques par internet) et une mafia, de plus en plus puissante venant du Nigéria, pays le plus peuplé d’Afrique. En 2013, l’auteur, musicien dans le groupe RCP, réalisera un reportage sur ce sujet pour l’émission de Canal +, Spécial investigation où il remontra la piste du 419 jusqu’au Bénin. Dense et documentée, l’histoire est écrite comme un véritable polar où le héros n’est pas un policier mais un simple citoyen, un peu perdu dans sa vie de couple et qui met tout en œuvre pour aider son prochain. Si elle aurait méritée un peu plus de peps notamment dans les scènes d’action, elle n’en demeure pas moins un bon moment de lecture. Cette histoire d’amour très contemporaine est mise en image par Lelio Bonaccorso, d’une manière très réaliste. Le trait efficace de l’italien met en lumière des visages anguleux marqués par des vies souvent difficiles. Les planches, où les décors sont a minima, sont agrémentées de couleurs aux tons marron-brun-ocre.
419 african mafia : un docu-fiction de bonne facture, à la thématique originale.
- 419 african mafia
- Auteurs : Loulou Dedola et Lelio Bonaccorso
- Editeur: Ankama
- Prix: 13,90€
- Sortie: 09 mai 2014
Voyage mouvementé
Dans un des wagons luxueux à l’arrière du train, Comte essaie de réveiller un alchimiste. Ce gros homme a la faculté de transformer le plomb en or, métal précieux qui permettra de financer leur révolution pour un renouveau du pays.
Rattrapés par des cavaliers armés, les malfrats se défendent en expliquant aux autres passagers que c’est un test pyrotechnique pour les rassurer au cas où ils entendraient des coups de feu. Aidés d’hommes habillés en musicien de fanfare, ils ouvrent malhabilement le feu sur leurs poursuivants…
Les miettes est un album publié pour la première fois en 2001 aux éditions Drozophile. Rapidement épuisé parce qu’édité à seulement 900 exemplaires sérigraphiés, il est réédité aujourd’hui par Atrabile, dans une version différente : couverture cartonnée, dos toilé et bichromie avec une encre métallisée. Pourtant tout ne fut pas si simple pour republier cette bande dessinée, entre la vente de certaines planches par Peeters et la perte de certains films, ainsi que la magnifique recolorisation en bichromie.
Le récit fantaisiste et burlesque de Ibn Al Rabin met en scène une véritable équipe de bras-cassés qui décide de détourner un train pour une vague envie de reconquérir ce petit pays limitrophe de l’Autriche. Entre un baron bien sapé, deux jumeaux-siamois qui s’engueulent tout le temps et un comte dont les ancêtres sont des primitifs, auxquels on ajoute un flûtiste qui a légèrement fumé des produits illicites et qui fait onduler les rails du train et vous avez une histoire piquante, amusante et décalée. Les dialogues très justes de l’auteur du Meilleur de la Bible (Atrabile, 2008-2010) sont savoureux. Le trait semi-réaliste de Frederik Peeters rend parfaitement l’ambiance décalée et aventureuse de l’histoire. L’auteur du sublime Pilules bleues peint comme personne les trognes patibulaires et les nez cassés de ses personnages antipathiques.
Atrabile a eu le nez creux en rééditant Les miettes, petit bijou fantaisiste et burlesque afin qu’un plus grand nombre de lecteurs puisse le découvrir.
- Les miettes
- Auteurs : Ibn Al Rabin et Frederik Peeters
- Editeur: Atrabile
- Prix: 18€
- Sortie: 15 mai 2014
Equilibre en danger
Les Kamis, esprits de la nature, créèrent le Kamigakushi, un voile magique en réaction à l’arrogance des êtres humains. Ces derniers ne purent donc plus voir les êtres magiques parce qu’ils étaient alors dans deux mondes différents. Mais un jour, les Naggos, des êtres sombres, amenant le mal dans la nature, firent leur apparition. Pour contrer ce terrible fléau, l’arbre sacré Munemori donna naissance à des êtres protecteurs, les Izunas.
Mamoru, le chef des Izunas, sorte de loup blanc, harangue ses frères pour venir à bout des Naggos, racines noires maléfiques, venus les défier sur leurs terres. Parmi la meute, Kenta est touché par le fléau magique. Alors qu’il se meurt, le chef des loups observe un phénomène important : Munemori, l’arbre de vie a été touché et l’équilibre des êtres naturels est donc menacé.
Après un beau rituel pour enterrer Kenta, l’arbre de vie accouche d’un petit louveteau, futur guerrier. Mais Munemori est capricieux, il accouche d’un nouvel être vivant : un petit enfant ! De suite, cette petite fille crée des tensions entre les loups et leurs alliés.
Quelques années plus tard. Aki, la petite fille a bien grandi, elle est maintenant une belle adolescente. Elle aime à s’amuser avec Kenta, le nouveau loup né en même temps qu’elle. Lors d’une de leur sortie et après une chute, ils se retrouvent dans un village abandonné où tous les habitants sont morts…
Prévu en diptyque, ce nouveau cycle de La légende des nuées écarlates commence fort. Teintée de fantastique et de légendes japonaises, le récit co-écrit par Saverio Tenuta et Bruno Letizia est dense. Il faut une bonne concentration pour bien comprendre les premières pages, tant les informations sont nombreuses. Les êtres fabuleux, bien cernés, sont chamboulés par une arrivée inopinée, celle de Aki, une jeune fille ; une nouveauté pour eux, ainsi que Kenta, tous les deux sont issus de l’arbre de vie infecté par les Naggos. Ces éléments vont permettre de nouer des tensions, faire avancer le récit et c’est une belle trouvaille. Ce monde merveilleux est bien mis en image par Carita Lupattelli, aidée par Tenuta pour le story-board (auteur de la saga originelle). Les animaux et les décors sont fabuleux, inspirés par les dessins japonais.
Izunas : un premier album intéressant qui met en scène un monde merveilleux magique, teinté de fantastique et de Japon médiéval. On attendra néanmoins le second et dernier tome pour nous faire une véritable idée.
- La légende des nuées écarlates, Izunas, tome 1 : Kamigakushi
- Auteurs : Saverio Tenuta, Bruno Letizia et Carita Lupattelli
- Editeur: Les Humanoïdes Associés
- Prix: 13,95€
- Sortie: 14 mai 2014
Monde féerique
Royaume de Pan. Le duc Claymore Grimm règne avec beaucoup de délicatesse sur cet univers elfique. A ses côtés, Titania, sa femme et sa petite fille, Wika. Tous les trois vivent en parfaite harmonie avec les habitants dans le Castelgrimm. Pourtant la paix est fragile, une nouvelle menace approche : les troupes d’Obéron sont aux portes du château. Ancien amant de la duchesse, il est secondé par Rowena, une elfe maléfique capable de se transformer en louve.
Sentant la menace se rapprocher, Titania confie Wika à Haggis Cornely, chevalier du clan des haches hurlantes et guerrier fidèle parmi les fidèles, pour qu’il puisse la cacher le plus loin possible du château. Alors que les duels Claymore-Obéron et Titania-Rowena font rage, l’homme et la petite fille s’échappent.
En chemin, ils croisent Rowena-la-louve. Obligé de se défendre, Haggis terrasse la femme maléfique, puis coupe les ailes naissantes de Wika, afin de ne pas éveiller les soupçons et ainsi cacher sa véritable identité. Il nettoie ses plaies avec de l’encre féerique, puis se suicide pour ne pas laisser de trace.
Grey et Shannon, des loups s’emparent de la petite fille et la dépose sur le perron d’une chaumière. Le couple de fermier l’élèvera comme sa propre fille.
Avalon, 13 ans plus tard. Wika a bien grandi ; elle se retrouve dans la capitale elfique où règne Obéron. Dans la cité, la jeune fille tatouée croise le chemin de Bran, un voleur talentueux et un brin misogyne. Il décide alors de lui faire visiter la ville et de l’initier à l’art des arnaques et des larcins. Ne se laissant pas marcher sur les pieds, Wika révèlera sans le savoir, sa véritable nature magique à cause des ses tatouages sur sa figure se changeant en tatouages sombres tête de mort.
Thomas Day, écrivain de science-fiction et fantasy, a créé un univers fantastique digne des grands romanciers du genre. Mêlant les êtres fabuleux, l’aventure et l’action, son récit n’est pas dénué d’un bel humour, grâce à l’apport du personnage Bran, au langage fleuri et complètement dépassé par l’énergie de la jeune Wika. L’histoire très sombre de l’auteur dont c’est le véritable premier scénario, est efficace et plutôt bien écrit. Entraînante, elle ne laisse aucun répit au lecteur, et ce dès la troisième page, enchaînant les scènes d’action à une vitesse folle. Nous connaissions le travail merveilleux de Olivier Ledroit pour Requiem, celui sur Wika est aussi fort. Il développe un univers fantasy teinté de steampunk d’une grande beauté. Tout est prétexte à l’illustration, y compris les cartouches de la numérotation des pages, ainsi que les tatouages changeant sur le visage de l’héroïne. Les cadrages sont magnifiques et l’organisation des pages déstructurée pour apporter une belle folie, tel des tableaux de maîtres. A noter que Pierre Dubois, le célèbre elficologue se fend d’une belle introduction et qu’à la fin de l’album le lecteur découvrira de belles illustrations et des recherches graphiques de Olivier Ledroit.
- Wika, tome 1 : Wika et la fureur d’Obérion
- Auteurs : Thomas Day et Olivier Ledroit
- Editeur: Glénat
- Prix: 14,95€
- Sortie: 21 mai 2014
Olga à la recherche de son passé
Kemlö est une ville-citadelle, construite sur un grand promontoire et dont on accède par un viaduc surplombant un immense précipice. D’immenses terrasses accrochées à des remparts font d’elle une ville sans fin. La cité sombre et oppressante est quasi morte. Aucune enseigne sur les murs des magasins et des hôtels, aucune affiche et aucun journal publié.
Par une fin d’après-midi de juillet, Olga, par-dessus, chapeau et unique valise, arrive à Kemlö. La jeune femme, dont on ne connaît rien du passé, vient prendre son poste de professeur de langue dans la classe de terminale du lycée de jeunes filles de la ville.
En attendant la rentrée, elle visite la ville sans réel but, juste celui de la découvrir. Plus les jours passent, plus elle descend vers les terrasses les plus basses de la ville, lorsqu’elle est surprise par un groupe d’hommes affamés, mal habillés, les plus pauvres de la cité. Elle est alors secourue par le Prince Falkenberg, bienfaiteur de Kemlö, qui s’empresse de tuer ces hommes de bas quartier.
Lui devant la vie, elle devient alors sa maîtresse. Un soir, confidences sur l’oreiller : elle lui révèle la vraie raison de sa venue ; ce qui ne plaît pas au Prince, qui décide de ne plus la revoir. Elle était là pour rechercher Denise, sa meilleure amie d’enfance avec qui elle eut des relations plus qu’amicales…
Le récit très sombre de Michel Conversin est oppressant, fleurtant parfois avec le surnaturel et mettant en scène des personnages très forts. Mais la vraie héroïne de cette histoire, c’est Kemlö : cette ville sans âme, aux proportions démesurées et au régime passéiste quasi dictatorial fondé sur des clans (ville haute avec la noblesse, ville basse avec le bas peuple). L’histoire mêle aussi la perversité et le sexe. Olga, femme qui se cherche, ambivalente : entre volonté d’oubli, de réinsertion par son métier et volonté nostalgique afin de retrouver son passé, son amour de jeunesse. Sans dialogue, c’est la jeune femme qui en est la narratrice dans des cartouches en haut des vignettes. Le trait en noir et blanc de l’auteur de Guillaume le conquérant (Centurion) est somptueux. Les décors magistraux de la cité dessinés comme un architecte montre la grandeur de Kemlö mais aussi son côté inhumain, sans âme. Quant aux personnages, leur style est épuré au contraire des costumes et décors intérieurs soulignés de fines hachures. Le découpage en gaufrier de 6 cases toujours dessinées verticalement rythme habilement le récit.
- Kemlö
- Auteur : Michel Conversin
- Editeur: Mosquito
- Prix: 15€
- Sortie: 07 mai 2014
Et si le Jour le plus long
avait été un désastre ?
6 juin 1946. Les alliés ont perdu la bataille du Débarquement deux années auparavant. Pour fêter leur victoire, les nazis ont invité Goebbels, le ministre de la propagande sur les plages de Normandie. Sur scène et devant un parterre nombreux d’officiers, il succède à Laval, président en exercice en France, territoire annexé par le régime nazi. Pourtant dans le ciel normand, des avions anglais survolent les festivités, attendant le moment propice pour tuer le protégé de Hitler. Mais le ministre n’est pas impressionné par la Royal Air Force, se sentant protégé par son armée d’élite la Wunderwaffen.
Pour comprendre la situation actuelle, revenons deux années en arrière, dans le château de La Roche-Guyon, QG de Rommel. Le maréchal apprend aux hauts dignitaires allemands que le DDay aura lieu en Normandie. Des fuites ont été constatées par un jeune anglais, espion-double à la solde du régime hitlérien. Son amour pour un autre officier anglais, lui permet de récolter de précieuses informations qu’il s’empresse de livrer à l’ennemi. Ces dernières sont corroborées par la découverte d’armes factices américaines dans le Pas-de-Calais. Pour détourner l’attention des nazis, les alliés mettent en place des chars et des avions gonflables.
Même si l’alliance anglo-franco-américaine met des moyens importants pour cette stratégie, les allemands la contrent et sortent vainqueurs de cette bataille.
Ce cinquième tome de Wunderwaffen est intéressant parce qu’il se concentre sur le Jour le plus long et que Richard D. Nolane en tord la vérité historique. En jouant avec cette dernière, il livre une uchronie efficace, bien maîtrisée où le régime hitlérien sort grand vainqueur de la bataille, délivre une vraie leçon aux alliés transformant le DDay en Distater Day. Pour incarner cette histoire, il met en scène des personnages historiques réels (Hitler, Goebbels ou Laval) et des personnages fictifs, alterne efficacement les moments stratégiques et les combats aériens nombreux. Le dessin réaliste de Maza semble légèrement figé pour les personnages mais d’une grande virtuosité dans les scènes aériennes. L’auteur bosnien livre donc une partition plutôt convaincante.
Wunderwaffen : une belle série historico-militaire aux combats aériens d’une grande qualité et à l’histoire uchronique potentiellement réaliste.
- Wunderwaffen, tome 5 : Disaster day
- Auteurs : Richard D. Nolane et Maza
- Editeur: Soleil
- Prix: 14,50€
- Sortie: 14 mai 2014
Et pour quelques pages de plus…
Pour compléter notre sélection de la semaine, Case Départ vous conseille aussi les albums suivants :
Le chiffroscope
Cette bande dessinée est donc une adaptation du dessin animé de 2 minutes par les auteurs eux-même ; à savoir David Castello-Lopez, journaliste-scénariste et Léonard Cohen, le dessinateur. Une cinquantaine d’épisodes ont été diffusé et dans le livre, le duo a décidé d’adapter les 10 meilleurs d’entre-eux, qui leur semblaient les plus originaux et les plus complets.
L’idée du Chiffroscope est née grâce au goût de David pour les chiffres (le journalisme de données), l’amitié de ce dernier avec Léonard, qui dessine et Emmanuel qui calcule les données.
Pour égayer les sommes importantes de chiffres, ils mettent en scène des petites histoires touchantes et réalistes avec un brin d’humour. Pour chaque thème, ils donnent d’ailleurs leurs sources. Ils répondent à :
- Le monde est-il de plus en plus violent ? Avec des statistiques sur les morts à la guerre, le taux de suicides en France, les massacres par rapport à la population mondiale…
- Demain sera-t-on tous obèses ? Des chiffres sur la proportion d’obèses dans le monde, le coût de l’obésité aux USA…
- Le monde est-il de plus en plus démocratique ? La proportion des démocratie au fil des décennies, la moyenne démocratique dans le monde…
- Demain les homosexuels cesseront-ils d’être discriminés ? Une carte des pays punissant l’homosexualité, les crimes visant les homosexuels aux USA…
- Demain saurons-nous tous lire et écrire ? La proportion d’analphabètes dans le monde, les enfants non scolarisés…
- L’argent fait-il le bonheur ? Le PIB par habitant et bonheur aux USA…
- Le monde est-il de plus en plus inégalitaire ? Les auteurs expliquent l’indice Gini, qui mesure l’inégalité économique…
- L’athéisme deviendra-t-il la première religion du monde ? 13 % de la population mondiale est athée, le podium des religions…
- Demain y aura-t-il toujours de l’eau douce ? Les chiffres impressionnants qui incluent les personnes sur Terre manquant d’eau douce.
- Demain les hommes et les femmes seront-ils égaux ? Le nombre de femmes en âge de travailler ayant un emploi, les sièges parlementaires occupés par des femmes, les pays européens ne considérant pas le viol conjugal comme un crime…
- Le chiffroscope
- Auteurs : David Castello-Lopez, Léonard Cohen et Emmanuel Grand
- Editeur: Scrinéo
- Prix: 13,90€
- Sortie: 17 avril 2014
Charles Martin,
Féerie pour une grande guerre
Mobilisé en 1914, Charles Martin participe, entre autres combats, à la bataille de la Somme en 1917. C’est dans les tranchées que naissent les premières esquisses de Sous les pots de fleurs, que l’artiste accompagnera d’une prose rythmée. Refusant les facilités du dessin naturaliste, il dessine la souffrance, la peur et la mort, comme il dessinait naguère les robes de Poiret. Parmi ces illustrations, le lecteur découvrira : Le sale coin, Le petit poste, Le cafard, Le cuistot, La fine blessure…
La Grande Guerre réapparaît dans l’œuvre de Martin en 1921, avec les illustrations de Mon cheval, mes amis et mon amie de Marcel Astruc. L’auteur y avoue que, même en pleine guerre, il n’y a que la grâce qui le touche et lui reste en mémoire. Alors, plutôt que les actes héroïques, Charles Martin raconte les amours éphémères et mélancoliques du soldat, entre filles de ferme et danseuses de bastringue. Ce sujet inconvenant sera vite effacé, la paix venue, à grand renfort de monuments aux morts et de Poilus figés dans le bronze. Parmi les sublimes dessins de Martin, les lecteurs pourront admirer : Dans la boue, 2 poules, La danse interdite, Le bastringue, Le printemps…
- Charles Martin, Féerie pour une grande guerre
- Auteurs : Emmanuel Pollaud-Dulian et Géraldine Meo
- Editeur: Michel Lagarde
- Prix: 16€
- Sortie: 20 février 2014
Tennis Kids,
tome 1 : Ramasseurs de gags
Kévin, Clément, Clara, Raphaël, Julien, Ophélie et Dimitri adorent le tennis mais surtout y jouer. Ranger les balles, arroser le cours ça les barbe. Tantôt inventeur du Ramass’balles ou un cordeur de raquettes, frappant des balles devant un radar automatique, labourant le cours de tennis en terre battue, essayant d’effrayer leur adversaires par un terrible haka, faisant tourner en bourrique leur entraîneur, épluchant les frites avec leur raquette…
Pré-publié dans le magazine Tennis+, la série Tennis kids est ciblée pour les enfants entre 8 et 12 ans. Les gags en une planche de Céka sont agréables, légèrement amusantes mais parfaites pour le jeune lectorat. Le scénariste, qui a pratiqué ce sport à l’âge de 6-7 ans, voulait s’amuser avec ces personnages, monter que le tennis est un sport individuel mais qu’il existe aussi une dimension collective dans le tennis surtout lorsque l’on commence à prendre des cours, très jeune. Le trait très rond de Patrice Le Sourd s’adapte bien aux mini-récits humoristiques pour les enfants.
- Tennis Kids, tome 1 : Ramasseurs de gags
- Auteurs : Céka et Patrice Le Sourd
- Editeur: Bamboo
- Prix: 10,60€
- Sortie: 07 mai 2014