Northlanders est une série imaginée par Brian Wood (DMZ), qui rend hommage aux vikings. Si dans l’imaginaire collectif ceux-ci sont représentés comme des guerriers scandinaves sanguinaires et barbares qui pillent pour le plaisir, Briand Wood tenait à proposer une vision quelque peu différente de celle véhiculée par les écrits des moines chrétiens, principales victimes de ces incursions normandes. L’auteur ne dépeint certes pas des enfants de chœur, mais il tente tout de même de tenir compte des us et coutumes de ce peuple afin de proposer le point de vue de différents personnages, allant d’un jeune saxon qui veut devenir viking à un exilé qui revient sur ses terres afin d’y déloger l’usurpateur qui avait pris place sur le trône qui lui était promis.
Si Panini avait déjà sorti deux albums souples contenant les huit premiers épisodes de cette saga composée de cinquante numéros, publiés chez Vertigo entre 2008 et 2012, Urban comics a la bonne idée de publier l’intégralité de cette œuvre d’envergure en seulement trois volumes. En choisissant de regrouper les récits par zone géographique et en respectant l’ordre chronologique, l’éditeur chamboule totalement l’ordre de parution original. Ce premier tome entièrement consacré aux contrées anglo-saxonnes débute donc en 793 pour se terminer en 1014 et commence par l’épisode #9. Si cette première brique reprend les numéros #9-10, #18-19, #1-8, #11-16 et #41, les deux suivantes s’attaqueront respectivement à l’Islande et aux aventures se déroulant sur les terres Européennes. Ce tome qui regroupe les récits Anglais, Écossais et Irlandais de la saga est ainsi composé de quatre arcs principaux :
I. Lindisfarne : cette première histoire qui se déroule dans le Nord de l’Angleterre en l’an 793 invite à suivre la quête d’identité d’un jeune garçon qui ne se retrouve pas dans les convictions religieuses de son père et qui accueille le débarquement des guerriers venus du Nord pour mettre à sac le monastère de Lindisfarne comme une opportunité pour échapper à cette destinée dans laquelle il ne se retrouve pas.
II. Skjaldmös : ce deuxième chapitre invite à suivre trois veuves danoises ayant échappé au massacre de leur village des Midlands en l’an 868 par des troupes saxonnes et qui parviennent à s’enfuir avec le butin récolté par leurs maris. Le dessin de Zezelj s’avère d’une grande efficacité pour dépeindre la détermination de ces femmes et pour mettre en images la violence du récit.
III. Sven le Revenant : ce récit (pièce maîtresse de cette compilation, déjà publiée par Panini) qui se déroule dans les Orcades en Écosse en l’an 980 invite à suivre les pas de Sven le Varègue, un mercenaire voguant sur les mers du Nord, qui décide de revenir chez lui afin de reconquérir son héritage, usurpé par son oncle, et d’y libérer son village de la tyrannie mise en place par ce dernier. Cette quête vengeresse qui aborde l’exil est portée par un personnage complexe et fascinant, qui gagne en ampleur au fil des pages. Déraciné, exposé à d’autres cultures et rejetant les mœurs et les croyances des siens, ce guerrier déraciné s’avère être le personnage idéal pour découvrir l’univers sombre et barbare des vikings. Bien loin des célèbres drakkars nordiques et de la période de gloire des vikings, Brian Wood décrit un pays marqué par la désolation et la misère et livre des personnages hauts en couleurs, marqués par la rudesse de leur environnement et n’hésitant jamais à recourir à la violence pour pourfendre leurs consorts. Le trait gras de Dave McCaig accompagne parfaitement ce récit guerrier sombre et violent.
Interlude. La fille de Thor est un récit assez anecdotique qui se déroule dans les Hibrides en Écosse et qui invite à suivre Birna Thordottir, la fille d’un seigneur local qui tente de conserver le contrôle de son héritage après l’assassinat de son père. Je ne suis pas fan de cette histoire courte, ni du dessin.
IV. La Croix et le Marteau : Ce quatrième arc se déroule en Irlande, en l’an 1014 et invite à suivre la cavale d’un irlandais accompagné de sa fille. Poursuivi par les hommes de main du roi Sigtrygg Silkbeard pour avoir commis des crimes contre l’occupant viking, le père sombre progressivement dans la folie en essayant d’assouvir sa rage envers l’envahisseur.
En se basant sur un contexte historique d’une grande richesse, Brian Wood parvient à donner vie à une galerie de personnages hauts en couleurs, qui permettent de rendre hommage aux guerriers scandinaves et à leurs traditions, tout en proposant des angles de vue différents. Si les artistes qui se succèdent au dessin (Dean Ormston, Danijel Zezelj, Davide Gianfelice, Marian Churchland et Ryan Kelly) ont tous un style assez différent , ils contribuent néanmoins tous à restituer l’austérité et la rudesse de ces terres britanniques. Notons également la présence des superbes couvertures de Massimo Carnevale.
Retrouvez cette saga incontournable du label Vertigo dans mon Top du mois, ainsi que dans mon Top de l’année.
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