Trésor de l'abbaye de Saint-Maurice d'Agaune
A l'occasion de la restauration du musée de l'abbaye suisse, ses trésors sont exposés au Louvre, pour le plus grand plaisir d'amateurs d'émaux cloisonnés, de réutilisation d'intailles antiques et plus largement d'orfèvrerie. Après une introduction sur l'abbaye, fondée en 515 autour des reliques de Saint Maurice (triste histoire que celle de ce saint : décurion d'une légion romaine issue de Thèbes, il refuse de tuer des chrétiens. Du coup, sa légion se fait massacrer par la légion voisine), on découvre quelques inscriptions funéraires antiques.Mais c'est après que tout commence... Parmi les pièces les plus splendides, le reliquaire du prêtre de Teudéric, l'aiguière dite de Charlemagne et le vase dit de Saint Martin. L'orfèvrerie du Haut Moyen Âge, c'est incroyable : les émaux d'une couleur vive et chatoyante, qui jouent avec la lumière et épousent la forme de l'objet jusque dans ses courbes ; les objets hérités de l'Antiquité que l'on intègre, l'air de rien, que l'on repense, que l'on sublime ; les tailles en cabochon ; les cloisonnés... Je suis plus que séduite par ces objets qui demandent une grande maîtrise technique et une inventivité folle. Et ce qui me rend encore plus joyeuse (oui, j'ai des petits plaisirs tout à fait étonnants), ce sont les tissus qui ont été retrouvés avec ces objets : morceaux de soieries aux animaux fantastiques et aux personnages mythiques. C'est émouvant de penser aux reliques qu'ils protégeaient. Puis, on découvre les trésors romans, notamment le chef reliquaire de saint Candide, d'une froide beauté, délicatement martelé et à la barbe ciselée. La châsse des enfants de saint Sigismond, gigantesque, fait aussi partie des merveilles à découvrir. Enfin, l'exposition se clôt sur des reliquaires, des coupes, une épée et une statue équestre du saint qui nous mènent jusqu'à la fin du XVIe siècle. Plus que d'exposer simplement des trésors, cette exposition s'attache à en resituer le contexte de la création, à nommer les donateurs généreux de l'abbaye et à nous introduire à l'art médiéval. Bien entendu, une telle exposition ne peut que vous encourager à aller courir ensuite les rares trésors médiévaux qui nous sont parvenus... Et qui donne envie de découvrir celui présenté au musée Maillol.
Aiguière dite de Charlemagne © Trésor de l'abbaye de Saint-Maurice. Jean-Yves Glassey et Michel Martinez