Longtemps j’ai tout mené de front. Longtemps, j’ai pu tout mener de front.
Le rythme de fou, le temps de rien, les gens que j’emploie à faire ce que je ne peux pas. Ceux qui changent mes draps, ceux qui changent leurs couches, ceux qui repassent les chemises, ceux qui les emmènent au solfège et à la danse.
Longtemps, c’était ma vie normale. Longtemps, c’était comme ça et pas autrement. Sans doute que je crânais même un peu.
Et puis il y a eu Ultime. Les nuits hachées, les jours heureux. Le plaisir de prendre le temps, de faire les choses soi-même, de les entendre raconter leurs journées, de se faire des nez de clown avec les Babybel, des soleils en bâtons de carottes dans l’assiette, de reprendre le contrôle de l’intimité de la maisonnée, de danser sur nos chaises à table. De se fabriquer des souvenirs. De comprendre qu’à force de courir, on passe à côté des choses.
Alors, le travail, oui, évidemment mais plus comme avant. Ralentir, lever le pied, de toutes façons, ils grandissent toujours trop vite. Sans doute qu’il m’a fallu tout ce temps pour comprendre.
Accueillir ses premières fleurs chiffonnées au creux de ma main, l’écouter rire aux éclats, la pousser encore une fois maman sur la balançoire, regarder le vent ébourriffer ses cheveux, assise par terre sur la pelouse, y a-t-il quelque chose de plus joli qu’un mercredi?