Vieillissement de la personne handicapée mentale

Publié le 22 mai 2014 par Jean-Pierre Jusselme

« On n’est pas sérieux quand on a 17 ans », disait Rimbaud. On aborde la vie avec innocence, candeur, naïveté et enthousiasme. Mais si le handicap s’abat sur cette existence, les problèmes s’accumulent et le vieillissement devient plus problématique. Vivre avec une pathologie demande une adaptation, un mode de vie différent et une révision complète de son appréhension du monde. Pourtant, c’est un scénario qui peut tous nous toucher – et qui nous fait devenir sérieux, dès 17 ans.

Colloque 1

La personne handicapée est perçue comme un être « à part », à l’écart de la société. Mais c’est un constat qui s’ancre dans une réalité plus douloureuse lorsque c’est une personne handicapée mentale. C’est un problème qui fait peur, un problème qui inquiète, qui impressionne – c’est un problème qui est devenu peu à peu un tabou dans notre société. Pourtant, le handicap mental existe et doit être compris pour être soigné et pris en charge. Un handicap mental accompagne le malade tout au long de sa vie, il doit donc être accompagné et aidé pour améliorer et faciliter son vieillissement.

C’est ce sujet sensible qu’a voulu aborder le colloque du 11 avril 2014, au Forum du Technopole à Saint-Etienne, organisé par l’ADAPEI. Faire prendre conscience le public de ce problème et approcher les gens du handicap étaient entre autres les buts des spécialistes présents dans la salle. Toute la journée de ce vendredi était dédié à cette question du « vieillissement des personnes handicapées mentales », avec tous les thèmes et tous les sujets que ça touche : du rôle des aidants au sein de l’organisation médical jusqu’à l’accompagnement des familles ou la nécessité de ne pas déraciner le patient, tout a été abordé.

La personne handicapée vieillissante by Pourparlers on Mixcloud

Il fallait lever le voile, crever l’abcès de cette société sclérosée par ses tabous, pour aborder de front ces problématiques au centre de la vie en communauté. Le public qui assistait à ce colloque est venu en nombre, preuve que la part d’ombre mais aussi la part d’interrogations qui planent autour de ce sujet sont aussi importantes que le vif intérêt porté aux questionnements qui l’entoure. Les proches de personnes handicapées – donc directement confrontés aux problèmes soulevés pendant les conférences – se partageaient la salle avec les simples curieux désireux de se renseigner sur un sujet trop méconnu.
Les débats s’organisaient en deux parties : la parole était d’abord laissée au spécialiste venu s’exprimer sur une facette du problème, puis l’assistance pouvait délibérer, en posant des questions ou en racontant des anecdotes personnelles qui servaient le débat. Le dialogue était permis – était même encouragé – pour faciliter la communication et pour que d’autres visions que celles des intervenants se fassent entendre.

La table ronde, avec pour thème : « Des besoins multiples, des réponses diversifiées »

Le vieillissement de la personne handicapée mentale ne s’aborde pas comme celui de la personne âgée « traditionnelle », en pleine possession de ses moyens. Plusieurs domaines gravitent autour de ce handicap, qui freine et qui gêne l’individu. Ainsi, des établissements spécialisés sont prêts à accueillir les personnes qui le souhaitent. Ces structures utilisent leurs compétences pour prendre en charge les handicapées, pour les suivre et leur permettre de vivre une vie « normale » – ou qui s’en rapproche au maximum. Les soins apportés par les aidants sont primordiaux et nécessaires – mais le concept même de ces structures est bénéfique : elles font garder les patients en lien avec la société, avec le monde qui les entoure, et elles les aident à vivre, tout simplement. C’est un soulagement pour les familles, qui voient leur proche s’épanouir dans un milieu qui lui est consacré. Ces établissements – trop rares, trop peu nombreux car coûteux pour un département et qui laissent certaines familles démunies face au handicap de leur proche – amènent le patient à obtenir une indépendance dont il serait privé hors de ces murs – son bien-être le fait accepter plus sereinement son vieillissement et lui fait apprécier la vie à sa juste valeur, malgré le handicap qui le poursuit.
Le handicap mental englobe de nombreux symptômes. Il existe énormément de pathologies, et il faut trouver une réponse efficace à chacune d’elles. C’est un problème posé à la médecine, mais qu’elle arrive progressivement à résoudre. Différentes solutions sont proposées, différentes structures, différents soins, différents accompagnements, pour répondre individuellement à chaque handicap. Mais malgré ses fortes avancées ces dernières années, des failles persistent encore. Les formations des aidants notamment ne sont plus suffisantes – les progrès et les découvertes médicales évoluent plus vite que les formations.

Le film d’Olivier le Mab

Le film d’Olivier le Mab projeté en début d’après-midi exposait le point de vue des personnes handicapées elles-mêmes. Rencontrées dans leurs lieux de prise en charge, elles racontaient leurs envies, leurs plaisirs – leur vie, tout simplement. Olivier le Mab présentait un regard humain sur des personnes que l’on déshumanise trop souvent. Il leur rendait leur individualité en les écoutant, en leur tendant un micro qui leur permettait d’extérioriser leurs doutes, leur volonté, leurs rêves, mais aussi leurs colères et leurs revendications. Il a donné un visage au handicap, il lui a donné une voix – et c’était émouvant et attachant de l’entendre enfin s’exprimer et sortir de son silence.

Pour aller plus loin : extraits du site de l’Unapei qui donnent des infos complémentaires, des chiffres et des indications sur le sujet

http://www.unapei.org/le-handicap-mental-sa-definition.html

http://www.unapei.org/L-avancee-en-age-des-personnes,31.html