« Mais qui donc s’occupe des bébés? » (Who has been caring for the baby?), titre le premier des 5 articles de cette série de documents publiés dans l’édition du 20 mai du Lancet. Car 5,5 millions de bébés meurent « sans même un bout de papier ». Face à cette invisibilité inacceptable, cette nouvelle photographie précise et prospective sur la santé néonatale et les défis posés par l’amélioration de la survie du nouveau-né dans le monde. Un dossier qui fixe aussi les objectifs à atteindre d’ici à 2030 pour offrir à chaque nouveau-né un bon départ dans la vie.
Cette grande série de recherches dirigée par le professeur Joy Lawn de la London School of Hygiene and Tropical Medicine et par le Professeur Zulfiqar Bhutta de l’Hospital for Sick Children (Canada) et l’Université Aga Khan (Pakistan) avec la collaboration avec de 54 experts de 28 instituts de 17 pays, apporte les bases d’un plan d’action et de sauvegarde des nouveau-nés et des jeunes mères, dans le monde.
Il y a 10 ans, le Lancet publiait une série similaire sur la survie néonatale, appelant à l’intégration des soins du nouveau-né dans le continuum du suivi sanitaire de mère et de la santé reproductive. Si, depuis, des progrès substantiels ont été accomplis dans la formulation et la mise en œuvre de politiques de santé du nouveau-né, les auteurs jugent aujourd’hui ces progrès largement insuffisants. Y compris dans certains pays riches, où la diminution des taux de mortinatalité reste trop lente, France y compris (Voir tableau ci-contre). Pour preuve, ce qu’ils décrivent comme l’invisibilité de la mortinatalité, le retard de l’amélioration de la survie du nouveau-né sur celle de la mortalité maternelle et les taux de mortalité encore élevés des enfants dans leurs premières années de vie.L’invisibilité inacceptable de la mortinatalité : 5,5 millions de nouveau-nés et mort-nés meurent chaque année sans même un morceau de papier. Un manque de reconnaissance officielle qui reflète à la fois une sorte d’acceptation muette de ces décès mais aussi un facteur clé pour expliquer la lenteur des progrès effectués pour limiter ces décès de nouveau-nés.
Le triple retour sur investissement : 3 millions de vies pourraient être sauvées en 2025 en renforçant les interventions de base, pour aboutir, si possible, à une couverture quasi universelle des soins à la naissance. Les auteurs parlent d’un triple retour sur investissement car ses effets portent sur les nouveau-nés, mais aussi sur la réduction du nombre de bébés mort-nés et la santé des mères.
Quelles interventions ? Des approches pourtant simples et peu coûteuses pourraient générer de grands effets sur ces 3 cibles.
· Il s’agit d’abord, de rééquilibrer vers la naissance, les fonds destinés à la santé de l’enfant. Car aujourd’hui la naissance et le premier mois de vie ne mobilisent que 44% des investissements de santé de l’Enfant de moins de 5 ans, et seuls 4% des fonds pour la santé de l’enfant mentionnent dans leurs objectifs la cible » nouveau-né « .
· La formation des professionnelles de la petite Enfance pose également question.
· La communication claire des interventions mises en œuvre permettrait d’en renforcer l’efficacité,
· leur coordination et leur efficience au niveau national peut être améliorée,
· l’accès aux équipements de soin en cas de besoin spécifiques doit être renforcé,
· un meilleur suivi épidémiologique et une évaluation des résultats à tous les niveaux doit être mis en place.
Bref, le message est lancé, ne plus fermer les yeux sur ces enfants qui partent à peine nés, comme s’il ne fallait pas les compter.
Sources: The Lancet 20 May 2014 doi:10.1016/S0140-6736(14)60458-X Who has been caring for the baby?
Communiqué Worldwide nearly six million babies are born and die each year without birth or death certificates
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