L’idée est on ne peut plus simple. Plutôt que de recourir intensément aux produits chimiques contre les insectes ravageurs, pourquoi ne pas faire appel à la bonne barrière mécanique que constitue un simple filet ? Surtout que, avec les progrès technologiques, on dispose désormais de tissus légers, aux maillages plus fins et aux couleurs variées, qui n’empêchent pas la pénétration des rayons du soleil et donc la photosynthèse des feuilles. Le tout à un prix de revient raisonnable.
Les barrières physiques sont d’ailleurs de plus en plus utilisées par les agriculteurs des pays du Nord pour la protection des légumes (serre, tunnel, simple filet ou voile non tissé) et des arbres fruitiers. Potentiellement très utile pour « l’agriculture familiale », aujourd’hui politique agricole promue par la FAO, cette technique reste pourtant inconnue de bien des petits producteurs d’Afrique subsaharienne.
Un microclimat engendré par les filets
Pour en développer l’usage, les chercheurs du projet BioNetAgro – mené au Kenya et au Bénin par Thibaud Martin, agro-écologue du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) – ont mis au point des filets adaptés au milieu tropical. Simples et faciles d’utilisation, ils ont permis de réduire de 70 à 100 % les pulvérisations d’insecticides, essentiellement pour les cultures de choux et de tomates, les haricots verts mais aussi les légumes feuilles tropicaux comme le piment, l’amarante ou le chou frisé.
Le microclimat engendré par le filet améliore aussi la qualité des légumes, le rendement des cultures et permet de diminuer l’arrosage. Facilement amovibles, les filets peuvent en plus être réutilisés pendant cinq ans sur différentes cultures. « Un filet de petite maille (NDLR : 1 à 2 mm) bloque par exemple les chenilles des papillons, tout en permettant une irrigation mécanique et/ou pluviale des cultures et leur aération pendant la journée », souligne Thibaud Martin.
La lutte biologique contre les petits ravageurs
La société tanzanienne A à Z Textile Mills les produit, les distribue et recycle le polyéthylène en matériaux de construction (madrier, barrières, arceaux, piquets).
La recherche travaille désormais à renforcer l’effet protecteur des filets contre les petits insectes comme les pucerons ou les mouches blanches qui peuvent passer à travers les mailles. Contre les petits ravageurs, on peut aussi associer la lutte biologique (variétés tolérantes, plantes répulsives, pièges à insectes).
« En 2030, on prévoit que 60 % de la population d’Afrique subsaharienne vivra en ville, explique Thibaud Martin. Or, aujourd’hui, près d’un tiers des produits alimentaires pour l’homme est perdu pendant la phase de production, essentiellement à cause des ravageurs contre lesquels les petits exploitants luttent chimiquement, engendrant des dommages à l’environnement et à la santé publique. »