Dans 10 jours, nous serons appelés aux urnes pour voter pour nos députés européens.
Il y a fort à parier que l’abstention sera encore une fois le grand gagnant de ce scrutin. Pour rappel, près de 60% des électeurs français et 57% des électeurs européens avaient boudé les urnes en 2009. Il y a fort à parier que ce taux sera dépassé cette fois-ci.
Pire encore, parmi les élus, on nous annonce pour la première fois une possible victoire d’un parti anti européen !
Je t’aime, moi non plus
Pourquoi un tel désamour pour une Europe qui semble pourtant notre seul espoir de peser sur la scène mondiale dans les années à venir?
Les raisons sont multiples, certaines sont liées au scrutin en lui-même:
- Les listes pour lesquelles nous votons se fondent ensuite dans des regroupements transnationaux que nous ne connaissons pas.
- Le français moyen connait mal le rôle des députés européens (quelques explications ici).
D’autres sont liées à l’image de l’Europe elle –même:
- Trop technocratique
- Fonctionnement complexe et abscons
- Gangrénée par le lobbying
- Elle interdit les camemberts au lait cru
- Mais elle ne fait rien pour l’Ukraine
- L’Euro a augmenté le coût de la vie
- Ce sont les Allemands qui décident tout au final
- …
J’en passe et des meilleures. Il faut trier le bon grain de l’ivraie dans tout cela mais tout n’est pas faux.
Une partie de cette mauvaise image est due à nos politiques: ils sont les premiers à s’approprier les avancées que l’Europe nous apporte tout en les rendant responsables de décisions qu’ils n’assument pas.
Absence de débat sur l’Europe
Alors que je trouve la scission droite/gauche de moins en moins pertinente (je reviendrai un de ces quatre sur ce point) car se fondant sur des principes idéologiques de plus en plus désuets, aujourd’hui, il y a une vraie séparation entre les partis sur la position européenne.
Certains (FN, debout la république, le front de gauche…) prônent la sortie de l’Euro et la restauration des éléments de souveraineté transférés à l’Europe, la plupart des autres (PS et UMP en tête si on excepte Guaino) sont pour une poursuite du processus enclenché il y a plus de 60 ans sans changement majeur.
En tant qu’Européen convaincu mais désirant une approche différente de l’Europe telle qu’elle s’est développée, je suis extrêmement surpris par la pauvreté de l’offre concernant un point aussi crucial et le peu de débat que cela soulève.
Aussi, je vais l’ouvrir tout seul, comme un grand!
Ce que je voudrais
- Une Europe à 2 vitesses
Je pense que l’Europe s’est élargie trop vite. Il est extrêmement difficile de prendre des décisions à 28 sans un véritable pouvoir central. Aussi, je serais pour une Europe qui fonctionnerait un peu différemment:
- Un groupe de pays large (tel qu’aujourd’hui, voire plus large avec la Turquie,…) qui signerait des accords commerciaux privilégiés, faciliterait la circulation des biens et des personnes
- Une Europe politique restreinte (comprenant une dizaine de pays) qui fonctionnerait selon un modèle Fédéral
- Un président Européen
A l’image des USA, ce fonctionnement fédéral permettrait d’avoir à la tête de la fédération un véritable président qui incarnerait l’Europe et s’exprimerait en son nom.
- Une politique extérieure unique et une défense commune
Là aussi, c’est la conséquence du fédéralisme. A l’image du secrétaire d’état américain, nous aurions un véritable patron de la diplomatie européenne. Nous parlerions enfin d’une seule voix et on cesserait les atermoiements et les hésitations lors des crises internationales.
- Un socle fiscal et social commun
Les états garderaient des prérogatives en termes de fiscalité, de droit du travail, … mais des règles à minima seraient édictées concernant la durée du travail, le salaire minimum,…
Libre ensuite à chaque état en fonction de ses choix en termes de protection sociale ou autre d’aller au-delà de ces minimas.
De fait, le droit de chaque état s’imposerait aux travailleurs sur son sol, quelle que soit la nationalité originale de ceux-ci (plus de travailleurs détachés)
De plus, les entreprises réalisant un chiffre d’affaire sur un territoire seraient soumis à la fiscalité de ce territoire (plus de rapatriement des bénéfices dans les paradis fiscaux intra ou extra-communautaires)
- Un fonctionnement plus démocratique
Cela impliquerait une diminution drastique du lobbying, un parlement avec de vrais pouvoirs, la suppression de la commission au profit d’un véritable gouvernement fédéral, une diminution des aspects technocratiques (laissez nos fromages en paix !),…
Des élections au sein d’un des états au sein de la fédération ne seraient plus un enjeu aussi important que le furent les dernières élections allemandes. On a eu l’impression que cette élection fut vraiment celle qui allait determiner réellement la politique européenne des années à venir…
- Une Banque Centrale au service de l’économie
La BCE n’aurait plus comme unique objectif de lutter contre l’inflation mais elle soutiendrait par son action l’économie de l’Europe, elle prêterait aux états (directement ou par le biais d’organismes publics) à des taux préférentiels afin que les intérêts de la dette ne soient plus le monstre qu’ils sont devenus
On pourrait continuer encore cette liste et j’ai bien conscience qu’elle est un peu utopique à ce jour.