Le développement des infrastructures est essentiel pour la croissance économique et la réduction de la pauvreté. En Afrique, les infrastructures peuvent contribuer annuellement à 2% du produit intérieur brut, avec des effets particulièrement positifs en Afrique orientale et centrale. En outre, l'augmentation de l'accès aux infrastructures telles que les routes, l'électricité, les télécommunications, l'eau et l'assainissement, surtout dans les zones rurales, entraîne des bienfaits sociaux directs tels qu’une meilleure santé, une meilleure éducation et l'autonomisation des femmes, contribuant ainsi à la réalisation d’une croissance socialement équilibrée et inclusive.
Inversement, une infrastructure déficiente peut entraver les activités économiques et affaiblir les efforts de développement humain. Une médiocre qualité des infrastructures sape en particulier la productivité des entreprises manufacturières en Afrique. Compte tenu de l'importance future de la production manufacturière pour notre développement, cette carence ne peut être tolérée. Il est donc essentiel de combler ces lacunes afin de libérer le potentiel productif de l'Afrique et de maximiser l'impact des infrastructures sur la croissance économique et le développement humain. Pour ce faire, des ressources financières importantes sont nécessaires.
Un aspect important du développement de nos infrastructures est la nécessité d'une approche régionale. Les économies d'échelle provenant des infrastructures régionales permettent de baisser les coûts de construction et des services. En particulier, l'infrastructure régionale est appropriée du point de vue géographique de l'Afrique : par exemple, nous avons 16 bassins fluviaux internationaux, qui offrent un vaste potentiel hydroélectrique. Il est donc essentiel de promouvoir l'infrastructure régionale et transfrontalière car elle stimule le commerce, améliore la sécurité, permet de faire des économies, renforce la gestion des ressources naturelles, désenclave les pays sans littoral, et favorise l’émergence des avantages comparatifs nationaux et régionaux.
Les dépenses actuelles d'infrastructure s'élèvent à 45 milliards de dollars par an, alors que le besoin annuel pour leur financement est estimé à 93,4 milliards de dollars US par an au cours de la prochaine décennie, si le continent compte respecter les normes internationales dans ce domaine. Toutefois, les estimations de la Banque mondiale et la Commission Economique pour l'Afrique (CEA), soutenues par les résultats de l’étude « Diagnostic de l'infrastructure par pays en Afrique Pays » (AICD), suggèrent que si les inefficacités dans la planification du projet, l'exécution et l'entretien sont bien rectifiées, le besoin en financement annuel serait ramené à environ 20 milliards de dollars par an seulement. Donc avec une gestion prudente, il est possible de réduire de moitié le gap de financement.
Cette mission n’incombe pas seulement aux gouvernements. Pour les entreprises, le déficit de l'infrastructure en Afrique est une opportunité d’affaires. Les ressources du secteur privé sont nécessaires pour compléter les efforts des gouvernements. Pour être comblé, le manque d'infrastructures nécessite également des mécanismes de financement dédiés. Conscient de cette nécessité, les chefs d'État et de gouvernement de l'Union africaine ont approuvé la création d'un mécanisme de financement dédié pour accélérer la livraison des infrastructures en Afrique.
La Banque africaine de développement est le fer de lance de la création du nouveau fonds « Africa 50 » dont la mission est de mobiliser les fonds du secteur privé afin d’accélérer le rythme de réalisation des infrastructures en Afrique. À long terme, il compte drainer le soutien des marchés des capitaux internationaux pour financer les infrastructures en Afrique.
Dans la Communauté de l'Afrique de l'Est, la priorité est donnée délibérément au développement des principaux corridors de transport régionaux qui sont les supports du développement des échanges et des investissements. Certains des projets prêts à bénéficier de prêts auprès de « Africa 50 » dans la région, comprennent la réhabilitation et l'extension du Corridor Nord reliant le port de Mombasa avec Kampala, Kigali, Bujumbura et la République démocratique du Congo. D'autres projets régionaux prioritaires comprennent la réhabilitation du corridor central reliant Dar-Es-Salaam avec Bujumbura, Kigali, et la RDC.
En outre, le projet de LAPPSET, où le Kenya est à la recherche de partenariat avec le secteur privé en vue de construire une autoroute, un oléoduc, une ligne de chemin de fer et un port à Lamu pour connecter la nouvelle République du Sud-Soudan et l'Ethiopie, présente un grand potentiel d'investissement. Ce ne sont que quelques-uns des projets ambitieux entrepris dans la région. En Afrique de l'Est, nous traduisons nos paroles en actes.
Au Kenya, nous avons pris note de deux facteurs : premièrement, que les investissements dans les infrastructures disjointes est peu rentable. Dans ce contexte, nous avons adopté une approche de réseau dans tous nos investissements relatifs aux infrastructures, que ce soit dans l'énergie, l'éducation, les routes, l'agriculture, la santé ou d'autres secteurs. Deuxièmement, que les spécifications sont le plus souvent superflues et conduisent donc à des investissements très lourds et injustifiés.
Permettez-moi de conclure en observant que l'Afrique a profondément besoin d'une intégration régionale et continentale pour le développement durable. Mais l'intégration ne peut se réaliser que là où il existe certaines infrastructures. Pourtant, pour que ces infrastructures existent, quelqu'un doit investir dans ce secteur. Ceci, Mesdames et Messieurs, est le défi majeur auquel nous sommes confrontés. Je suis certain que nous serons à la hauteur.
H.E. Hon. Uhuru. Kenyatta, Président de la République du Kenya.
Article initialement publié en anglais par African Executive. Traduction réalisée par Libre Afrique – Vendredi 16 mai 2014