Tu vis en moi. Pourtant, qu’es-tu au juste ? Mystérieuse, mon cœur te flirte, toi qui le charmes. Vacillante, ma raison te consulte parfois. Trop peu souvent. Nos préjugés se méfient de toi. Pourtant. Rarement tu me déçois. Alors… Mon esprit pressent ta nature. N’ose l’avouer. Scientifiques, psychologues et philosophes cherchent à te comprendre. Or, ton essence nous échappe. Steve Jobs louait pourtant ton pouvoir, te disant « plus puissante que l’intellect ». Sans qu’on sache pourquoi, tu nous pousses à agir, à opter pour tel ou tel sentier. Sous ton égide, les images se combinent aux impressions mentales, de nouvelles idées se développent. Fidèle, tu es toujours là, analysant la situation, me proposant le bon chemin. Trop souvent, je t’ignore. La vie est si trépidante, me distrait trop. M’écartant de ta sagesse, je m’égare dans le méandre de la modernité, je file vite, vite, vite, ne profite pas de ta vérité.
Plusieurs raillent tes allures surnaturelles, tes connexions avec le psychique et le paranormal. Mais d’autres croient en toi. L’armée américaine t’a étudiée, pour ses troupes en combat, pour des décisions rapides, pour sauver des vies. Ton apport est capital à qui sait t’écouter. Oui, à qui sait t’écouter…
J’implore ton conseil, Intuition. Dis-moi comment t’éprouver toujours.
Aussitôt, diligente, tu infiltres mon esprit. Je ferme les yeux, et perçois ton murmure.
« Écoute ta voix intérieure, Jean-Marc. En tout temps, je suis connecté à toi. Reconnais-moi. Rappelle-toi tes bons coups, quand tu disais “ Je ne sais pas pourquoi j’ai fait ça ” ou “ Comment j’ai réussi ça ? ” Jean-Marc, dans ton travail, sous ma gouverne, tu agis parfois sans raison objective, sur l’aspiration du moment. C‘est ma voix que tu entends. Alors, tu décides. On te regarde, on se questionne, on ne comprend pas. Souvent, le temps valide ton action. Et mon pouvoir.
« Je relie l’instinct à la raison, j’intègre l’impression aux faits et la logique. Banalise la puissance de l’instinct, tu me négligeras, tu bouderas tes pressentiments, à ton détriment.
« Prends du temps pour toi, Jean-Marc. Seul. Connecte-toi à ta sagesse la plus profonde. Prie, médite, marche, cours, nage. Affectionne le silence, pratique la pleine conscience de l’instant. J’en requiers un niveau élevé, et une capacité subtile d’utiliser les sens. Sois attentif à tes sens. Trop d’activités, trop de pensées brouillent ma voix, et mon soutien. Vide ton esprit.
« Crée, Jean-Marc. La créativité m’interpelle, accroit ma vivacité.
« Observe, note les étrangetés qui gravitent autour de toi, remarque les coïncidences qui animent le monde.
« Écoute ton corps, tiens compte des signaux que je lui transmets. Agis avec tes tripes.
« Connecte-toi à l’autre, entend ce qu’il ne dit pas. Identifie ses émotions, le langage de son corps. Enregistre le rejet que vit ton ami, ressens l’amour ou le faux dans le baiser d’un couple. Intéresse-toi à l’autre, éprouve sa culpabilité, sa honte, son embarras, son dégoût, son désir, sa joie. Devine ses pensées. Tu t’approcheras de moi. Et du bon chemin.
« Ne renie pas la pensée de ton inconscient, prête attention à tes rêves.« Enfin, débarrasse-toi des émotions négatives. Elles m’obscurcissent. Quand tu es contrarié, en colère ou déprimé, je ne peux rien. Serein, ton esprit m’accueillera.
« Je suis donc là pour toi, Jean-Marc. Ouvre ton cœur à ces conseils. Je t’offre le meilleur pour ton travail, tes relations, tes projets, ta vie. Sans modération, tire profit de moi. »
Le silence renaît. Intuition, ta voix s’est tue. Cette voix précieuse. Elle patiente. Mon cœur est ravi, mon esprit, apaisé et imprégné du souffle de ta sagesse. Je sais maintenant. Tu es à ma portée. À moi, maintenant…
© Jean-Marc Ouellet 2014
Notice biographique
Jean-Marc Ouellet grandit dans le Bas-du-Fleuve. Médecin-anesthésiologiste depuis 25 ans, il pratique à Québec. Féru de sciences et de littérature, de janvier 2011 à décembre 2012, il a tenu une chronique bimensuelle dans le magazine littéraire électronique Le Chat Qui Louche. En avril 2011, il publie son premier roman, L’homme des jours oubliés, aux Éditions de la Grenouillère, puis un article, Les guerriers, dans le numéro 134 de la revue Moebius. Chroniques d’un seigneur silencieux, son second roman, paraît en décembre 2012 aux Éditions du Chat Qui Louche. En août 2013, il reprend sa chronique bimensuelle au magazine Le Chat Qui Louche.