Condescendance, mépris, snobisme,complaisance, air hautain, suffisance, voilà autant de mots que j'associe assez facilement à Denis avec un "Y" Arcand.
J'ajouterais ignorance aussi.
Quand j'ai vu Le Déclin de l'Empire Américain pour la première fois, fan fini de Woody Allen (le suis toujours) j'étais stimulé par l'envie de voir une version Québécoise de mon héros. Premier irritant, lors de la première à Québec, au Grand Théâtre, dans toutes la première séquence mettant en vedette Dominique Michel, à chacune de ses répliques, le public riait...!!! Retapez-vous le film, simplement la première séquence, il n'y a pas une seule ligne de drôle!
Mais les crétins qui m'entouraient ne voyaient pas un personnage, ils voyaient Dodo aux côtés de la grand'jaune, ils voyaient Dodo dans un Bye Bye, ils voyaient mon bikini ma brosse-à-dents, ils entendaient je suis up & je suis down. FUCK! où étais-je atterri? IL FALLAIT VOIR UN PERSONNAGE! Mais semblerait que Dodo était plus grande que son personnage. Ça reviendra dans la carrière d'Arcand, vous verrez.
Puis, justement, les personnages, joués par Daniel Brière (nooooon pas lui! un autre!) et celui de Geneviève Rioux. DEUX ABOMINATIONS! deux jeunes, qui étaient de toute évidence, l'image qu'Arcand avait de cette jeunesse en 1986, confuse, incertaine, naïve, ignorante, bref un regard plus que condescendant sur ses gens derrière. Une peur presqu'avouée de baby boomer extrêmement mal renseigné sur la génération qui le suivait. J'étais sorti de la projection profondément irrité et amèrement déçu, moi qui luttais déjà au quotidien dans un 418 qui faisait extrêmement peu de place à ses enfants, de réaliser que ce Denis avec un "Y" semblait être le porte flambeau de cette complaisance boomer. Dans le style: "Après moi le déluge!". Noooooooooon!
Le temps m'a mis sur la route du co-scénariste de ce film, Hubert-Yves Rose, qui me disait qu'Arcand s'était inspiré principalement des conversations qu'ils entendaient autour de lui pour ce film. Premier constat: Arcand fréquente principalement des gens de son âge qui aiment bien se tordre le cou pour mieux s'entendre parler. Deuxième constat: son regard sur les gens de la génération suivante est d'un mépris fort désagréable.
Ses films suivants ne m'avaient pas beaucoup plu. Love & Human Remains & Barney's Version restant mes préférés, mais principalement en raison de leur casting et des plumes de Brad Fraser et Mordecai Richler respectivement. J'essaie de voir Stardom depuis des années mais la copie vidéo est aussi rare qu'un Bruins de Boston propre. Mes attentes restent toutefois faibles, Jessica Paré ne m'impressionnant généralement en rien et comme c'était son premier film...
"Je suis animé par le même sentiment de faire des films que lors du tout premier!" claironne-t-il fièrement à 72 ans. Peut-être aussi avec encore ses yeux de 1967...
C'est le propre de chaque génération de se raccrocher à os repères de jeunesse. Et c'est normal. Mais quand vient le temps de mettre sa vision d'un monde sur deux heures de pellicule, on ose croire qu'on a travaillé un peu notre plat pour tout le monde.
Denis avec un "Y" ne m'a toujours offert que des sandwichs. Quand Les Invasions Barbares a été lancé, j'ai vomi. C'ÉTAIT L'ILLUSTRATION PAR 1000 "D'APRÈS-MOI LE DÉLUGE!" Les barbares c'étaient aussi nous, la junkie et le fils qui étudie à Londres. La peur des jeunes, Arcand la plaçait soudainement clairement sur pellicule. Et il s'était maintenant convaincu que sa génération avait tout fait, tout vu, tout vécu. Et qu'après, il ne pourrait y avoir que le désert.
Quand j'ai su qu'Arcand tournait sur des trentenaires, j'ai voulu tout de suite monter dans les rideaux. C'était il y a deux ans. Mars 2012. J'ai commencé à écrire ceci il y a plus de deux ans. Je n'ai pas vu le dernier film d'Arcand qui sera lancé jeudi. Mais ce que j'en lis confirme pas mal ce que je racontais plus haut. Pour traiter des gens 40 ans plus jeunes que lui, Arcand a dû traiter de superficialité majeure. Un gars de mon âge a même dit, avec effroi au sortir du visionnement de presse: les conversations, les aspirations, les préoccupations, des trentenaires qu'il met en scène semblent avoir été empruntés à une autre génération (la sienne), sans souffle, sans étincelle, sans vie.
J'ai longuement hésité avant de vous parler de Denis avec un "Y". Je ne voulais pas être gratuitement méchant. Mais voyez vous je ne me suis pas empêcher de me moquer depuis le début de ce "Y" glissé dans son prénom...
J'ai écouté L'Âge des Ténêbres pour me mettre en mode Arcand. Dur de ne pas être méchant quand le film réunit exactement les 7 degrés de la séparation nommés dans mon ouverture plus haut. Que de caricatures de vieux gâteux! J'ai terminé le film de peine et de misère et principalement parce qu'au générique j'y ai trouvé deux amis. La première est une furie (la plus jolie des trois-à l'extrême droite sur la photo) au visage peinturé en bouette dans une fête médiévale, et le second est viking dans cette même fête. Je n'ai même pas reconnu le viking mais j'ai bien ri en moi-même en me disant "Bien entendu, c'est pas Arcand qui me ferait reconnaître un gars de mon âge!" :)
Quelques petites choses que j'ai retenues de L'Âge des Ténébres*:
-Arcand parle de la troisième partie d'un tryptique comprenant Le Déclin... et Les Invasions...Pourtant on y retrouve trois personnages de retour des films Le Déclin de l'Empire Américain et Jésus de Montréal: Le prêtre, le gardien de sécurité, la comédienne Constance. Ils sont encore joués par les même acteurs. Ce n'est pas rien. Ces trois films seraient-il plus personnels que les autres?
-Partant de cette question, il me semble, et là je nage en totale présomption, que le personnage de la détestable patronne blonde du personnage principal, qu'on finit par réduire à l'esclavagisme, jouée par une pénible Caroline Néron, soit directement inspiré de la conjointe d'Arcand, Nicole Robert. Je sais, je sais il s'agit d'une accusation très forte, mais Arcand est pire dans ses condamnations de notre génération, je peux quand même m'en permettre une! Il ne m'a fait aucun dout que Néron "jouant" une blonde (Robert est la blonde productrice d'Arcand) mettant énormément de pression sur son employé au point de le mettre à bout de nerfs ne pouvait être qu'une référence à Miss Robert.
-Cette chronique de l'épuisement professionnel et amoureux met en vedette un personnage qui au moins deux fois mettra la main au visage de sa plus vieille enfant, comme si il tentait de comprendre une extra-terrestre. Oui. Arcand ne comprend rien aux gens derrière.
-Je suis coupable de ce que je vous mentionnais plus haut: Véronique Cloutier n'est pas une actrice. On a beau lui faire dire "Salut, moi c'est Lyne!" Non. On voit bien Véronique Cloutier. La même qui prend des poses de fille qu'on a surpris à faire un pet sur une plage à la Une d'un magazine qui porte son nom, raccourci aux premières 4 lettres.
-Bon choix (volontaire?) que de placer Rufus Wainwright en ouverture. De loin notre chanteur le plus plaintif et ce film sera une loooongue plainte qui paraîtra plus que le 1h47 qu'il dure.
-N'est pas toujours drôle celui qui veut. Et l'immaturité de certaines observations d'Arcand m'ont frappé.
-Vraiment pas bon quand il a carte blanche, le Denys. Il avait raflé son Oscar pour le meilleur film étranger, et de toute évidence, on lui avait donné carte blanche pour ce film. Échec. Surtout pour tout ses jeunes qui auraient aussi voulu tourner cette même année...Mais Arcand et les jeunes...
Voyez? c'est la première fois que je respecte l'orthographe de son nom!
Fallait que ce soit dans la phrase où je le dis "pas bon".
C'est con.
Je vais quand même voir son film, Le Rêgne de la Beauté, un jour.
Par curiosité.
Comme on serait curieux d'aller voir un grand-parent un peu déconnecté de la réalité.
Ne serais-ce que pour constater la distance entre le tireur et la cible.
Arcand ne s'est jamais adressé à moi.
Jamais.
Autrement qu'avec suffisance.
Son rétroviseur rouille.
Ça m'empêche pas de partager la route avec lui.
*Traduit vaniteusement dans certaines parties du monde en anglais par The Age of Ignorance.