Mercredi prochain, débute donc - tout le monde devrait maintenant le savoir, même Potzina :o), le 67ème festival de Cannes et, si tous les projecteurs seront évidemment braqués sur les films sélectionnés là bas et qui devraient commencer à sortir dès mercredi ("Grace de Monaco" qui fera l'ouverture le 14 et sortira en salles en même temps ou "the Homesman" dont je vous ai parlé ce matin même), il reste une petite poignée de longs métrages qui sortent dans les salles françaises ce même jour, mais quin hélas, ont de fortes chances de rester terriblement dans l'ombre des grandes sorties cannoises.
C'est notamment le cas de "Ligne d'eau", un long métrage polonais d'un certain Tomasz Wasilewski- dont c'est le second long après un premier inédit en France mais qui a fait le tour de tous les festivals- et que j'ai eu la chance de voir en avant première avant sa sorties salles donc ce 14 mai, grace à son distributeur Outplay.
Ce film est pourtant un évènement ne serait ce que parce qu'il est assumé comme le premier film polonais qui parle ouvertement d'homosexualité comme sujet principal, un sujet encore bien plus tabou dans ces pays d'Europe de l'Est que dans nos états occidentaux.
On y suit Kuba, un jeune homme sportif, qui se destine au début du film, à devenir champion de natation. Mais, entre les compétitions, sa petite amie et sa mère possessive chez qui il vit toujours, il se sent au fond de lui, sans l'avouer, assez prisonnier. Un soir il rencontre Michal, un garçon à la beauté troublante qui le fascine instantanément...
Et, du coup, toute sa vie bien programmée, va basculer. Malgré le poids d'une société polonaise restée très conservatrice, il se met à rêver d'une autre vie, d'un autre possible, et va tout faire pour vivre tant bien que mal cette passion non prévue au programme...
Soyons clair : "Ligne d'eau" n'est pas exempt de certains défauts (il faut dire que j'ai vu récemment pas mal de films sur ce sujet et il n'est pas forcément parmi les plus inattendus au niveau du scénario et les plus rythmés au niveau de la réalisation) mais il a l'immense mérite de nous donner une belle cartographie de la Pologne aujourd'hui, un pays que l'on connait pas mal, et où l’homophobie est encore très prégnante, et où il n’est clairement pas aisé d’assumer son homosexualité.
Du coup, ce contexte particulier permet d'atténuer sensiblement le sentiment de déjà vu que pourrait laisser penser l'intrigue de départ. "Ligne d'eau" vaut assurément le coup d'oeil, notamment pour la description psychologique de ces personnages dépassés par des sentiments et des désirs plus forts qu'eux, et ce long métrage constitue un joli récit d'apprentissage d'un jeune qui aimerait s'assumer en tant qu'homosexuel sur de sa sexualité, mais qui va être confronté à l'implacable réalité, bien différente de ses désirs profonds.
Le film acquiert une vraie profondeur dans sa dernière partie, lorsque les masques tombent et que la tension- sexuelle notamment- devient particulièrement difficile à canaliser. On y apprécie notamment une belle photographie qui met particulièrement en valeur la beauté et la jeunesse des corps des protagonistes, ainsi qu'une non moins belle bande sonore- composée par l'ancien Michal de la Star Academy qu'on avait un peu perdu de vue et qu'on est content de retrouver!!
Bref, voici un film pas totalement abouti, mais qui séduit par son regard apre et sans sans concession et qui nous rappelle que, si besoin était, que la liberté d’aimer est un combat perpétuel, partout dans le monde, et notamment dans le pays de Lech Walesa ou, pour rester dans le cinéma, de l'immense et regretté Krzysztof Kieślowski.
Ligne d'eau - Bande-Annonce Officielle (VOST)