Pour le philosophe Luc Ferry, « on est vraiment dans un autre monde », tant social qu’économique. Retour sur la dernière conférence du cycle Parenthèse culture.
L’ancien ministre de la Jeunesse, de l’Éducation nationale et de la Recherche a notamment consacré son intervention du 6 mai dernier à la déconstruction des valeurs traditionnelles en Europe au cours du vingtième siècle. A Paris, entre 1830 et 1890, des « soixante-huitards avant l’heure », les bohèmes, ont notamment pris le contre-pied de la classe bourgeoise en s’affranchissant des codes de ces derniers : des expositions qui choquent, une focalisation sur Paris au détriment de la province… Les « Hydrophobes », des avatars des « Buveurs d’eau », ou bien encore les « Incohérents » ont ainsi tenté d’instaurer un décalage avec le monde bourgeois en utilisant l’humour.
La mondialisation et l’innovation permanente au cœur des mutations sociétales
La mondialisation constitue le deuxième pan de ce mouvement de déconstruction des valeurs traditionnelles. La découverte de l’inertie/de la gravité a ainsi joué un rôle clef en matière de mondialisation : il s’est agi de la première théorie admise de manière globale, à l’échelle mondiale, et qui a traversé les classes sociales et les frontières. L’avènement de l’Internet constitue une « deuxième mondialisation », et pas des moindres : « la compétition va devenir d’un coup mondiale », a rappelé Luc Ferry en référence aux débuts du réseau auprès du grand public. Cette compétition pousse à l’innovation permanente : chaque entreprise s’efforce de proposer de nouveaux objets et usages, même si ceux-ci n’apportent guère de nouveautés par rapport à leurs prédécesseurs !
« Jamais l’histoire n’a été aussi opaque qu’aujourd’hui », a indiqué le philosophe. Pour l’ancien ministre, les leviers des politiques nationales ont perdu de leur impact face à la mondialisation. Les hommes politiques, quel que soit leur bord, perdent de leur prise sur les événements, notamment économiques, en raison du mouvement de mondialisation. Par ailleurs, « nous sommes poussés à la consommation ». L’acte d’achat devient un comportement intégré dans la société. « La consommation est additive. Pour cela, il faut déconstruire nos valeurs traditionnelles (nos grands-parents n’éprouvaient pas forcément ce désir de constamment consommer) », complète Luc Ferry.
Le passage du mariage effectué de manière poussée, au Moyen-Age, à celui effectué par amour, constitue également un marqueur de cette évolution des valeurs. Son moteur ? L’apparition et le développement du salariat, assurément « un moteur de liberté ». A méditer…