Le trio originaire d'Ontario, Timber Timbre, refait parler de lui avec son 5ème essai, Hot Dreams, prolongement d'un songe aux couleurs monochromatiques d'où émerge une musique aux forts accents américains, d'Elvis Presley à Jay Hawkins en passant par Chuck Berry. Récit de cette odyssée dans la nuit noire américaine.
Le disque s'ouvre ainsi tel un conte, voix calfeutrée et romanesque, on avance timidement dans un univers anxiogène en suivant le fil vocal de Taylor Kirk, leader de la formation et seule lueur dans les ténèbres apparents. Le style du chant, éminemment narratif, fait ainsi référence à un songwriting commun d'une folk que le cousin canadien, Leonard Cohen, n'aurait pas renié. Certaines vocalises peuvent aussi évoquer par leur timbre, un autre natif du pays de la feuille d'érable, à savoir Win Butler des Arcade Fire.
Chaque titres semblent démarrer là où la marche du dernier s'était arrêtée, suivant un script au scénario sans failles. Ce faisant le disque est recouvert d'une ombre cinématographique fortement emprunte des films noirs, dont la matière affine les contours d'une œuvre chargée en influences et en références. Et pourtant Timber Timbre tire de cette corde nostalgique un son d'une classe folle, notamment en raison de cette association instrumentale entre la lap steel guitare de Simon Trottier et le violon de Mika Polsen, capable de moments de grâce tout simplement désarmants, à l'instar de l'introduction sur "This Low Commotion".
Dépeignant des lieux à la froideur palpable, Timber Timbre offre un panorama musical au verni noir dont les éclats ne peuvent s'apercevoir que sur un certain versant. Une écoute diffuse et prolongée sera donc nécessaire pour apprécier non pas les arrangements, suffisamment dépouillés pour éclater clairement à l'oreille, mais au contraire pour s'imprégner de leur diffusion dans des espaces qui expriment un vide parfois assommant de vertige comme sur l'entêtant "Curtains!?".
Dans la même température que son fabuleux prédécesseur Creep On Creepin' On, Hot Dreams confirme le ressort cinématographique des canadiens, utilisé pour faire voguer une musique aux origines folk vers d'autres terrains ou s'entremêlent blues, jazz, country, rock 50's et une humeur flirtant avec le velours noir de Portishead sur "Ressurrection Drive Part II". La trilogie initiée par l'album éponyme Timber Timber en 2009 se referme donc avec brio et assoit définitivement la formation canadienne dans la cour des grands.
En Bref : Hot Dreams constitue une œuvre intemporelle et minimaliste, d'une beauté épurée comme peu en sont capables. Un songe aux expressions claires / obscures qui parcourt les âges et sublime les carcans de la folk américaine d'où il s'est échappé.
"Curtains !?" :
"This Low Commotion" :