L’usine créée par Mariano Fortuny à la Giudecca ne se visite jamais pour préserver les secrets de fabrication des précieux tissus. Trois générations d’ouvriers, une dizaine de salariés, y travaillent toujours sur les machines imaginées par le créateur de la fabrique. Toutefois, vous pouvez visiter le show room librement, il vous suffit de sonner pour que l’on vous ouvre la porte. Le fabuleux jardin, quand à lui, se visite sur réservation.
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Pour tout promeneur, il est possible d’apercevoir les arbres du jardin de Fortuny, à la Giudecca, depuis les quais des fondamenta et ponte de le Convertite. Pour celui qui se rend à un rendez-vous pour la visite du jardin, c’est déjà l’occasion d’un avant goût d’un petit bonheur vénitien.
C’est en 1919 que Mariano Fortuny transfère son activité industrielle de production de tissus, jusqu’alors dans son palais, le palazzo Orfei, sur l’île de La Giudecca, où il acquiert à Giovanni Stucky un ancien monastère désaffecté depuis l’édit de Bonaparte. Il fait construire le long bâtiment qui abrite encore aujourd’hui les machines qu’il a imaginées pour la production des tissus. Mais il ne s’intéresse nullement a l’espace autour, qui demeure une sorte de terrain vague.
Le jardin au début des années 1920
Photo Ets Fortuny
C’est son amie, la décoratrice américaine Elsie Lee McNeill, qui devint plus tard la comtesse Gozzi, qui va créer ce parc, tout atour de l’usine.
Raimundo de Madrazo y Garreta (1841–1920) – Jardí de la casa de Fortuny
Elsie McNeill, qui était la fille du chef de Coca-Cola pour l’Europe, a épousé Arthur Lee et ils ont ouvert une salle d’exposition de tissu sur Madison Avenue. Ils étaient les distributeurs exclusifs de tissus Fortuny, qui étaient à la mode dans la belle société depuis que Fortuny avait créé sa première robe imprimée plissée. Lorsque Lee est mort, Elsie a épousé un comte vénitien Alvise Gozzi, et a repris la Societa Anonima Fortuny après la mort de Mariano Fortuny en 1949.
Le jardin à été dessiné comme un parc d’agrément, avec, dans le fond, une piscine qui a longtemps été l’unique bassin privé de la lagune. Tous les étés, nouveaux designers viennent travailler, au fond du parc, près de la piscine, lors d’un séminaire destiné à imaginer les nouveaux arrangements des couleurs.
La visite est guidée par une employée préposée à l’accueil des visiteurs et clients de la fabrique.
La visite commence dans un cortille qui mène à l’ancien palazzino de Elsie McNeil, toujours occupé par les propriétaires actuels, derrière une grille en fer forgé. La margelle de puits est un des vestiges de l’ancien couvent, dont on remarque également la trace sur le mur, puisque Mariano Fortuny a réutilisé un bâtiment existant qu’il a surélevé, comme on le voit bien encore.
Nous suivons ensuite un chemin qui longe des fenêtres de la fabrique obturées par des rideaux.
Henriette Negrin, la jolie jeune femme divorcée française qui avait rejoint la vie de Mariano Fortuny, en 1897, contre l’avis de sa mère, si elle fut une habile couturière, ne intéressa que très peu au jardin. Nous sommes donc bien dans un espace créé par une décoratrice…
En 1994, "la Contessa" disparaît… alors que tout le monde, à Venise, pense que la fabrique Fortuny est vouée à disparaitre, Maged Riad, son confident, relève le défi. Aujourd’hui, ses deux fils, Mickey et Maury ont repris, avec succès, la gestion de la fabrique… et habitent la maison blanche (le palazzino di terracotta) derrière la grille en fer forgé.