COMPOSTELLE EN FAMILLE, SAISON 4 (3e PARTIE)

Par Antoine06 @AVissuzaine
Jeudi 1er mai : Condom-Éauze (36 km). Pour l’étape la plus longue, les grands ados prévoyaient une marche nocturne en partant dès trois heures du matin. L’organisation tardive de l’expédition compliquait fortement la tâche. Si tout le monde s’accordait à penser qu’un départ tôt s’imposait, il fallut d’interminables palabres, argumentés et contre-argumentés, pour convenir enfin d’un départ à cinq heures du matin. A cinq heures vingt-cinq, donc, le groupe partait à la lueur des lampes frontales à l’exception d’un abandon (temporaire) sur blessure et d’un ado gréviste qui préférait ne pas partir du tout et accompagner sa maman en voiture plutôt que de partir aussi tard que le lever du jour. Notre parcours quitte Condom (traversée par la Baïse !) pour les vignobles du Gers en longeant des routes de crêtes marquant notre entrée dans la région du bas-Armagnac. Le guide mentionne un sentier ombragé que je ne trouve pas faute de soleil mais d’autres indices topographiques permettent de ne pas avoir d’inquiétude sur la route à suivre. A Montréal, après 18 kilomètres qui ne sont que la première partie de l’étape, une pause-café s’impose sous les arcades du village, dont le signe particulier pour les pèlerins de Saint-Jacques est de marquer la jonction entre la route du Puy et celle de Vézelay.
Mes chaussures de marches terminent leur route ici. Trop usées, trop douloureuses pour les pieds, je terminerais les deux prochaines étapes en basket, pas idéalement adaptées, mais suffisantes pour finir. Nous quittons le village par la porte fortifiée et rejoignons le hameau de Lamothe, puis le village de Éauze en longeant d’anciennes voies ferrées. C’est un peu monotone, certes, mais le dénivelé est inexistant ! Après 7 à 9 heures de marche selon la rapidité des pèlerins aujourd’hui, la dégustation du breuvage régional sonne comme une évidence. Et comme il faut bien penser à l’avenir, nous commençons le soir à réfléchir à la poursuite du projet. Plus nous avancerons et plus les différents parcours se rejoindront et les hébergements seront plus difficiles à obtenir pour un si grand groupe, d’autant que côté espagnol les réservations à l’avance ne sont pas envisageable. Peut-être faudra-t-il poursuivre la route par petit groupe et sans véhicule d’assistance. Le débat est en tout cas officiellement lancé. Vendredi 2 mai : Éauze-Nogaro (21,2 km). Contrairement à l’après-midi de la veille, le parcours est plus varié, nous longeons quelques sentiers, chemins communaux, allées de vignes, traversons des bois et des hameaux. Les vignes du Gers sont omniprésentes, et qui dit vignes, dit coteaux et vallons. Les pentes ne sont pas insurmontables, mais au sixième jour de marche après plus de 120 kilomètres, la fatigue est de plus en plus présente ! Depuis le départ, les capes de pluie ne sont jamais bien loin. Le soir à l’étape, les vêtements humides commencent à sentir.  Mais la magie du chemin de Compostelle est dans le sourire des pèlerins que nous rencontrons, les quelques mots que nous échangeons. Parfois nous croisons les mêmes marcheurs plusieurs jours de suite, l’échange est toujours chaleureux. Parfois, un message est affiché ici et là sur le bord du chemin, peint sur une pierre, une ardoise ou gravé sur un panonceau de bois. Samedi 3 mai : Nogaro-Barcelonne du Gers (26,3 km). Dernière étape pour cette année. Nous marchons à nouveau sur un circuit agréable à travers bois, champs, vignes et coteaux gascons. Le bleu du ciel perce un peu et pour la première fois je marche en tee-shirt, au point d’attraper un coup de soleil sur la tonsure ! Nous déjeunons au village de Lelin-Lapujolle. Minuscule bourg perché sur une colline, et agréablement prévu pour le repos du pèlerin. Aujourd’hui nous rencontrons une famille lozérienne. Nous taquinons volontiers Jackie, la mère, qui restait pendue au téléphone y compris pendant la photo de famille que le père nous demandait ! En les croisant au déjeuner c’est la fille qui s’accroche à son portable. Une de nos oreilles indiscrète entend que la conversation de l’adolescente vantait le mérite de la déconnection urbaine ! Les derniers kilomètres sont moins agréables, longeant une voie ferrée désaffectée, puis parallèlement à une route nationale. Celui de mes neveux qui fête aujourd’hui son treizième anniversaire est au bord de l’épuisement. Mon réconfort et celui d’un de ses grands cousins l’aide  à terminer tant bien que mal l’étape. Ainsi s’achève pour l’année notre périple. 168,7 kilomètres en 7 jours à travers le Gers. Nous reprendrons l’an prochain avec une brève incursion dans les Landes, puis les Pyrénées Orientales jusqu’à Saint Jean Pied de Port, et le passage en Espagne par le col de Roncevaux.