Jeudi 1er
mai : Condom-Éauze (36 km).
Pour l’étape la plus longue, les
grands ados prévoyaient une marche nocturne en partant dès trois heures du
matin. L’organisation tardive de l’expédition compliquait fortement la tâche.
Si tout le monde s’accordait à penser qu’un départ tôt s’imposait, il fallut
d’interminables palabres, argumentés et contre-argumentés, pour convenir enfin
d’un départ à cinq heures du matin.
A cinq heures vingt-cinq, donc,
le groupe partait à la lueur des lampes frontales à l’exception d’un abandon (temporaire)
sur blessure et d’un ado gréviste qui préférait ne pas partir du tout et
accompagner sa maman en voiture plutôt que de partir aussi tard que le lever du
jour.
Notre parcours quitte Condom
(traversée par la Baïse !) pour les vignobles du Gers en longeant des
routes de crêtes marquant notre entrée dans la région du bas-Armagnac.
Le guide mentionne un sentier
ombragé que je ne trouve pas faute de soleil mais d’autres indices
topographiques permettent de ne pas avoir d’inquiétude sur la route à suivre.
A Montréal, après 18 kilomètres
qui ne sont que la première partie de l’étape, une pause-café s’impose sous les
arcades du village, dont le signe particulier pour les pèlerins de
Saint-Jacques est de marquer la jonction entre la route du Puy et celle de
Vézelay.
Mes chaussures de marches
terminent leur route ici. Trop usées, trop douloureuses pour les pieds, je
terminerais les deux prochaines étapes en basket, pas idéalement adaptées, mais
suffisantes pour finir.
Nous quittons le village par la
porte fortifiée et rejoignons le hameau de Lamothe, puis le village de Éauze en
longeant d’anciennes voies ferrées. C’est un peu monotone, certes, mais le
dénivelé est inexistant !
Après 7 à 9 heures de marche
selon la rapidité des pèlerins aujourd’hui, la dégustation du breuvage régional
sonne comme une évidence.
Et comme il faut bien penser à l’avenir,
nous commençons le soir à réfléchir à la poursuite du projet. Plus nous
avancerons et plus les différents parcours se rejoindront et les hébergements
seront plus difficiles à obtenir pour un si grand groupe, d’autant que côté
espagnol les réservations à l’avance ne sont pas envisageable. Peut-être
faudra-t-il poursuivre la route par petit groupe et sans véhicule d’assistance.
Le débat est en tout cas officiellement lancé.
Vendredi 2 mai : Éauze-Nogaro
(21,2 km).
Contrairement à l’après-midi de
la veille, le parcours est plus varié, nous longeons quelques sentiers, chemins
communaux, allées de vignes, traversons des bois et des hameaux. Les vignes du
Gers sont omniprésentes, et qui dit vignes, dit coteaux et vallons. Les pentes
ne sont pas insurmontables, mais au sixième jour de marche après plus de 120
kilomètres, la fatigue est de plus en plus présente !
Depuis le départ, les capes de
pluie ne sont jamais bien loin. Le soir à l’étape, les vêtements humides
commencent à sentir.
Mais la magie du chemin de
Compostelle est dans le sourire des pèlerins que nous rencontrons, les quelques
mots que nous échangeons. Parfois nous croisons les mêmes marcheurs plusieurs
jours de suite, l’échange est toujours chaleureux.
Parfois, un message est affiché
ici et là sur le bord du chemin, peint sur une pierre, une ardoise ou gravé sur
un panonceau de bois.
Samedi 3 mai :
Nogaro-Barcelonne du Gers (26,3 km).
Dernière étape pour cette année.
Nous marchons à nouveau sur un circuit agréable à travers bois, champs, vignes
et coteaux gascons. Le bleu du ciel perce un peu et pour la première fois je
marche en tee-shirt, au point d’attraper un coup de soleil sur la tonsure !
Nous déjeunons au village de
Lelin-Lapujolle. Minuscule bourg perché sur une colline, et agréablement prévu
pour le repos du pèlerin.
Aujourd’hui nous rencontrons une
famille lozérienne. Nous taquinons volontiers Jackie, la mère, qui restait
pendue au téléphone y compris pendant la photo de famille que le père nous
demandait ! En les croisant au déjeuner c’est la fille qui s’accroche à
son portable. Une de nos oreilles indiscrète entend que la conversation de l’adolescente
vantait le mérite de la déconnection urbaine !
Les derniers kilomètres sont
moins agréables, longeant une voie ferrée désaffectée, puis parallèlement à une
route nationale.
Celui de mes neveux qui fête
aujourd’hui son treizième anniversaire est au bord de l’épuisement. Mon
réconfort et celui d’un de ses grands cousins l’aide à terminer tant bien que mal l’étape.
Ainsi s’achève pour l’année notre
périple. 168,7 kilomètres en 7 jours à travers le Gers. Nous reprendrons l’an
prochain avec une brève incursion dans les Landes, puis les Pyrénées Orientales
jusqu’à Saint Jean Pied de Port, et le passage en Espagne par le col de
Roncevaux.