Document envoyé par Luis Alposta
Cliquez sur l'image pour lire confortablement le texte.
Voici en vers libres d'une exceptionnelle fluidité (essayez de lire à haute voix pour entendre la musique des mots) un hommage par un poète qui est allé l'entendre sur scène et l'a écouté à la radio...
Au Maître du Soufflet créateur d'un style unique et reconnaissable entre tous A Aníbal Troilo, au Lourd Poids (2) adorable qui avait le pouvoir de rendre profond ce qui pour lui était facile. A l'auteur de Garúa (3) à celui de Che Bandoneón (3) et Patio mío à celui de Sur (3) et de Responso (4) A ce grand gourou portègne qui, avec sa face de lune, qui éclairait la nuit, emplissait le Marabú et le Tibidabo (5) Au généreux Poids Lourd Poids Lourd de Buenos Aires lui qui pour la ville tout entière chantait et jouait comme très peu. Lui qui, quand il s'en fut, laissa sur la devanture du vieux théâtre Odeón en lettres d'or Simplemente Pichuco (6) Luis Alposta (Traduction Denise Anne Clavilier, avec l'affectueuse autorisation de l'auteur) Sur, chanté par Edmundo Rivero et accompagné par Pichuco. Laissez tomber la piètre qualité de l'image et écoutez ça ! Edmundo Rivero et Luis Alposta étaient de très grands amis. Il était normal d'aller chercher de ce côté-là. Un abrazo, Luis.
(1) Luis Alposta m'a fait l'honneur de postfacer mon tout premier livre publié en France : Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, paru en mai 2010, aux Editions du Jasmin. (2) Ici Luis Alposta emploie le verlan si familier aux Portègnes. Il inverse les deux syllabes d'un des surnoms du musicien : El Gordo (le gros, à entendre dans un sens très affectueux). Intraduisible en français. (3) Garúa, Che bandoneón et Sur font partie du corpus présenté et traduit en français dans Barrio de Tango, ouvrage cité. (4) Responso, tango instrumental composé le 4 mai 1951 pendant la veillée mortuaire autour de son ami, le poète Homero Manzi, décédé la veille. Responso veut dire absoutes, nom du rite qui clôt les funérailles catholiques, et qui occupe dans le langage courant en Argentine la place qu'occupe en français de France les termes "requiem" et "glas". (5) Marabú et Tibidabo : deux grands cabarets de l'entre-guerre à Buenos Aires où Aníbal Troilo joua à tour de rôle avec son orchestre. (6) Allusion au titre du dernier spectacle auquel Troilo avait participé la veille même de son fatal accident cérébral. Il s'agissait d'une soirée écrite par Horacio Ferrer et chorégraphiée par Juan Carlos Copes pour permettre à Pichuco, très malade, de reprendre contact avec la scène et de retrouver son public. Il n'y eut que quelques représentations jusqu'au 17 mai 1975.