« Ne pas oubliez : la prochaine fois, ne pas se reproduire avec un connard. Ou au moins se marier avant. »
Les dents de la mère.
Après un premier roman remarqué – que je n'ai pas lu – Julie Courtney Sullivan s'attaque, avec finesse et beaucoup de psychologie, à l'universel mais néanmoins insaisissable lien mère-fille. En suivant les femmes issues de plusieurs générations et d'une même famille, l'auteure aborde des sujets qui nous touchent toutes et tous à plusieurs niveaux.
La question de l'appartenance, les fameux liens du sang qui nous imposent une loyauté parfois malsaine. La culpabilité qui empêche toute relation, la difficulté de cohabiter avec des membres de sa propre famille dont les défauts deviennent, avec le temps, insupportables.
La question de la mère est centrale, chacun se représente l'autre en fonction de ce qu'il désire voir, sa propre interprétation et ce que que l'autre laisse apparaître. La femme oscille entre mère et putain, règle incontournable de toutes micro-sociétés.
Et puis... quand celui qui était garant de la cohésion familiale décède, tout se dilate, se comprime, s'enserre jusqu'à l'implosion. Pas facile de trouver la bonne distance vis à vis de sa famille, savoir dire non pour être soi et faire, parfois, le poing dans sa poche sans s'oublier soi-même.
Si j'ai bien aimé, j'ai trouvé le temps un peu long, petit bémol insuffisant pour ne pas le conseiller à tous ceux qui désire passer un bon moment de lecture.
Le livre de poche, 600 pages, 2014, traduit de l'anglais par Camille Lavacourt
Extrait
« Quand tu es née, j'ai enfin compris pour la première fois pourquoi les gens secouent les bébés jusqu'à la mort », avait-elle dit à Maggie lors d'un de ses longs voyages à New York. « Merci pour cette information », avait répondu Maggie. « Oh, non ! Ce n'est pas ce que je voulais dire. Ce n'était pas contre toi, tu étais le bébé le plus facile que j'aie jamais vu. C'est la maternité en général qui rend une femme folle. Toutes ces hormones te tombent dessus. Tu n'arrives pas à dormir. Tu ne peux pas raisonner cette créature hurlante. Avant d'avoir des enfants, je croyais que les gens qui secouaient les bébés étaient des monstres. Après, je me suis rendu compte que cette pulsion est totalement naturelle. C'est s'en empêcher qui demande des efforts. »