Détendre son bras, se réveiller doucement en déployant tout son corps, glisser dans le moelleux, dans cette chaleur enveloppante. Réveiller un à un les sens, sentir en premier lieu, le parfum, celui du printemps, de ce courant d'air frais qui passe sous la fenêtre entr'ouverte.
Des arômes de roses, plus encore de framboise, surprenant, j'attendais une sensation plus florale, plus proche de mon jardin, puis là derrière une touche de jasmin, mi-acidulée avec ce sucre, si proche.
Se rouler une dernière fois dans les draps, dans une émotion, dans un reste de rêve, celui qui revient souvent quand elle me manque, celui aussi où elle est là près de moi, une caresse charnelle, qui se transforme en quelques baisers matinaux. Là sous ma main, une douceur particulière, un moelleux étonnant, le lit, les draps, une sensation différente, un coeur de meringue. Je me tourne, je retourne dans ma nuit, les yeux fermés, je veux rester entre-deux. Un état insconcient pour l'esprit et le corps, mes hormones dorment encore. Drôle de toucher !
Je respire, j'expire, je croque, dans ma bouche un goût, pas de l'air mais de la matière, souple, soyeuse même, un faux air de .... le temps s'arrête, mes neurones se reconnectent, je lance des points d'interrogation, j'hésite ... le printemps souffle un air parfumé au macaron, avec ce croustillant qui enrobe la douceur, la profondeur. Que dis-je, je mâche l'air ce matin !
Ma main, mes bras, mon corps, sans coller, se love, reprenant la position de confort foetal, arrondi, dans un cercle invisible, je n'ose plus ouvrir les yeux. "Quoi" se poursuit d'un "où". Car ma chambre n'est plus un lit, une commode, un piano, un dressing, une fenêtre, mais un cocon rose, rose framboise. Marbré de filets de sucre, dans le suave de ma gourmandise, je suis bloqué, surpris, impressionné par cette nouvelle dimension. Comment suis-je arrivé là ?
Rapide retour, car avant mon réveil, je me suis endormi simplement, nu, sous cette couette, sans elle, en déplacement pour quelques jours. Nous étions ensemble, nous sommes allés flâner après une exposition ensemble, main dans la main, collés l'un à l'autre comme depuis trois ans. Inséparables, parfois séparés par nos vies, nos contraintes mais pas nos battements de coeur. Et sous les arcades, une boutique, des saveurs, des choix, et en sortant deux boîtes, une pour chacun. Elle l'a prise avec elle, dans son sac à main. Et à distance, moi devant mon clavier, j'ai croqué mon premier macaron, elle aussin un sms, un parfum. Des coeurs, des bisous et d'autres mots d'amoureux.
Là maintenant, je suis dedans, oui dans un macaron géant, l'ultime réalité de ma gourmandise, celle qui m'a fait croquer, craquer pour la réglisse du macaron noir, du pamplemousse et poivre, du caramel au beurre salé, aux trois vanilles, mais aussi à celui aux premières fraises des bois, si inetenses. Un coup de fatigue, des mots à écrire encore, un chocolat noir, idéal avec mon thé fumé, avec mes pensées pour elle dans son hôtel, seule.
Un dernier, seul dans la boîte, désesperé d'être là, moi, gourmet, infiniment gourmand, ais aussi en quête de celle qui me manque déjà, de ses instants complices autour de petites délicatesses comme celles-ci, pour nos palais, pour notre goût commun, pour nos petits gâteaux partagés avec deux cuillères, ces moments-là. Son parfum aux fruits rouge, sa petite robe noire qui la signe naturellement, qui accompagne mes desserts, qui les prolongent.
Un dernier macaron à la framboise, celui qui m'emporté dans mes rêves, bloqué dedans.
Nylonement