Le roman du cafe

de Pascal Marmet
Essai - 240 pages
Editions du Rocher - janvier 2014

Julien est orphelin et a appris le métier aux côtés de son grand-père, torréfacteur de café. Mais il vient d'être mis à la porte par ce dernier, se retrouvant ainsi sans boulot et sans domicile, il est accueilli chez sa bonne amie Johanna, et tous deux ils vont occuper leur temps libre à des flâneries gustatives à travers les cafés et bars de la capitale, avant de s'envoler vers les régions équatoriales qui abritent les arbustes où poussent les rouges cerises gorgées de promesses...

Au premier abord, j'ai été un peu déroutée, un poil déçue. La collection Le roman du... impose un exercice de composition, de romancer un ouvrage documentaire, pédagogique, de créer des personnages qui ont pour but de nous vulgariser une filière. Alors c'est pas très romanesque, peu spontané, un peu surfait. Et qui nous parle ? Le narrateur est l'auteur ? Le personnage est créé ou la première personne est-elle représentative ?Progressivement, au fil des courts chapitres, j'admets : le narrateur principal est mal voyant, ce qui lui permet de demander des descriptions précises de l'environnement des différents lieux où il se rend avec son amie. Un prétexte pour l'établissement de descriptions autour du café, ses lieux de production, de transformation, de consommation, et son histoire à travers les époques et à travers le monde. Peu à peu, les personnages nous convainquent davantage, et on se plaît à partager leurs périples, leurs découvertes, leur complicité.Se roman s'adresse aussi bien aux néophytes consommateurs de café, qu'à ceux qui comme moi n'en consomment quasiment pas mais que la filière agro-alimentaire intéresse et concerne. Et si en plus, on peu lire certains passages avec dans les narines l'âcre et envoûtante odeur qui se dégage du torréfacteur de l'usine d'à côté, alors....On voyage au Brésil, on se remémore le Costa Rica, on apprend sur la place de la Côte d'Ivoire dans ce commerce d'or brun.

Extrait :"En panache, mon cappuccino s’encapuchonnait d’une crème consistante, fier de la finesse de son tissage, de sa couleur noisette rendue vive par ses reflets fauves. L’arôme y était intense, riche de distinctions fleuries, de fruits d’ailleurs, de cacao fort et de brioche grillée. Et au palais, avec le juste d’amertume qui décline l’astringent, mon élixir se corsait, se veloutait, ensorcelait."

On y parle café bien sûr, des cafés, les enivrants, ceux qu'on regrette avoir porté aux lèvres, les exceptionnels, les secrets, les tendances. De la cafetière italienne à la capsule, l'auteur aime décrire le bon qu'on peut trouver partout, à certaines conditions. Il évoque le très prisé blue mountain de Jamaïque, le kopi luwak d'Indonésie issu des excréments de la civette, le sidamo de l'Ethiopie indépendante, le maragogype mexicain et ses énormes grains... mais aussi les dosettes courantes, les capsules déferlantes, les filtres à l'ancienne.Au final, c'est une lecture très intéressante si on met de côté les aspects littéraires, riche d'anecdotes, de faits, d'explications, avec en toile de fond des histoires d'amitié, un monde fait de nombreux métiers autour du café, une filière mondialisée qui prend parfois encore sa source dans des exploitations à taille humaine. En fin de roman se trouve une annexe historique, peu utile à mes yeux mais qui complétera les savoirs de ceux qui se passionnent des aspects chronologiques de cette épopée botanique et industrielle. _______[merci à Babélio et à l'auteur !]
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