Le 19 avril dernier, Richard Perron, Président du Syndicat
de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ),
publiait un texte intitulé : va-t-on
enfin mettre la table pour un coup de barre concernant la sous-traitance?
Dans son texte, monsieur Perron
attribue la pénurie d’expertise au sein de la fonction publique au recours à la
sous-traitance. Il conclut :
Il est impératif de reconstruire
l'expertise perdue depuis les 20 dernières années au sein du gouvernement du
Québec pour :
1.
contrôler la qualité des travaux effectués;
2.
diminuer les coûts des projets;
3.
(et donc) assurer la pérennité de nos services
publics.
Une solution simple, efficace et
économique - profitable pour tout le monde.
Le moins qu’on puisse dire est que
monsieur Perron prêche pour sa paroisse.
Reprenons ses arguments un à un.
Contrôler la qualité des travaux
effectués.
En effet, c’est le rôle du gouvernement
de surveiller les normes établies et de les faire respecter.
Monsieur Perron attribue les abus des
entrepreneurs transigeant avec l’État au manque d’expertise des fonctionnaires.
C’est un raccourci qui ne tient pas la route. Les abus résultent de la
rencontre d’entrepreneurs avides et de fonctionnaires peu scrupuleux.
Depuis quand l’expertise est garante de
l’éthique? Ce n’est pas le manque d’expertise qui explique la piètre qualité
des travaux effectués par les sous-traitants. C’est surtout parce que des
fonctionnaires ont fermé les yeux en échange des cadeaux qui leur étaient
offerts. Pour chaque enveloppe présentée, il y avait la main tendue d’un fonctionnaire,
d’un apparatchik ou d’un politicien.
Diminuer les coûts des projets.
Il est vrai que les coûts des
infrastructures et des services coûtent plus cher au Québec, mais ce n’est pas
la sous-traitance qui en est la cause.
Il faut plutôt attribuer ce phénomène à
la corruption, à l’inefficacité des monopoles d’État et à l’excès de règlements
nuisibles à la productivité des entreprises.
Primo, la corruption est un phénomène
récurrent favorisé par l’absence de concurrence et la trop grande présence de
l’État dans l’économie.
Deuxio, les monopoles d’État sont des
organisations inefficaces dont le but premier est de protéger le statu quo. Au
contraire, les sous-traitants, grâce à la magie de la concurrence, doivent
constamment innover et se renouveler pour survivre. Cela permet de contrôler
l’augmentation galopante des coûts et d’améliorer la qualité des services
gouvernementaux.
Enfin, la multiplication des règlements,
souvent inutiles, voire nuisibles, coûte cher aux entreprises, en particulier
aux PME. Ces coûts gonflent les prix des services fournis au gouvernement et à
la population.
Assurer la pérennité des services
publics.
Pour des raisons historiques et
culturelles, les Québécois sont attachés à la sociale démocratie.
Malheureusement, si rien n’est fait, dans quelques années les monopoles d’État,
en particulier en santé et en éducation, boufferont l’ensemble des revenus de
l’État. Alors, nous pourrons dire adieu à la sociale démocratie.
À court terme, la sous-traitance permet
aux monopoles d’État de survivre, mais à plus long terme la survie de la sociale
démocratie passe par la privatisation.
Le Québec devrait s’inspirer du modèle
suédois. Le gouvernement demeure responsable des normes d’universalité et du
contrôle de la qualité, mais les services sont fournis à la population par des
entreprises indépendantes du gouvernement.
Les coopératives, les organismes à but non lucratif, les entreprises
privées se concurrencent entre elles pour se tailler une place dans le marché
des services gouvernementaux, nommément en santé, en éducation et en transport
public. C’est à ces conditions que les Suédois ont évité le naufrage de leur
sociale démocratie.
Comme le prétend monsieur Perron, il est évident qu’un
sérieux coup de barre est nécessaire pour sauver la sociale démocratie
québécoise. Toutefois, le coup de barre requis est diamétralement opposé à
celui proposé par monsieur Perron. Il faut décupler le recours à la
sous-traitance en attendant la privatisation pure et simple des services offerts
par l’État. Les restreindre, comme le propose monsieur Perron, nous
condamnerait à la mort certaine de la sociale démocratie si chère aux
Québécois.