Publié le 29/04/2014 par Yannick Picard
Pour Serge Dallet, mytiliculteur à la retraite, la surmortalité des moules n’est sans doute pas d’origine naturelle. Il conseille aux professionnels d’engager une procédure.
Etonnement pour Serge Dallet, mytiliculteur à la retraite, à la suite de la mortalité de la production mytilicole rencontrée ces dernières semaines dans la baie de l'Aiguillon (« Sud Ouest » du 25 avril). Entre crabes et homards, tout en continuant à farfouiller dans les bacs de son exploitation, Les Viviers de Coup de vague, l'ancien boucholeur s'interroge sur ce qui, pour lui, pourrait bien devenir une véritable catastrophe économique.« Au début des années 60, j'ai connu une mortalité importante, mais identifiée. Elle était due à un parasite. Aujourd'hui, ce qui se passe est anormal. Ce n'est pas possible que les résultats des analyses n'apportent pas de réponses. » Aucune bactérie infectant le mollusque ou une quelconque pollution n'ont en effet été décelées. « On cherche trop loin ce qui est peut-être proche », assure Serge Dallet, qui ne croit guère à l'hypothèse d'une conjonction de phénomènes, entre tempêtes hivernales, lâchers massifs d'eau douce et afflux de plancton.« Un apport de pesticides »« En trente-cinq ans d'activité, je n'ai jamais entendu parler d'une telle mortalité par excès de nourriture. Trop d'eau douce, je n'y crois pas non plus. Les plus belles saisons dans le passé ont été faites au lendemain de grands renouvellements d'eau dans la baie. En revanche, un apport de pesticides stagnant d'années en années dans les fossés - certains ont d'ailleurs largement débordé cet hiver - n'est pas impossible », estime Serge Dallet, dont les propos rejoignent ceux du maire de La Flotte-en-Ré, Léon Gendre, qui pointait la semaine dernière au Conseil général de la Charente-Maritime les responsabilités des céréaliculteurs situés le long de la Sèvre niortaise.Autre interrogation pour le mytiliculteur retraité : la localisation bien précise, tant sur le plan géographique que dans le temps, de cette mortalité. « Il y a quelques années encore, la moule servait d'indicateur de pollution dans des ports comme Boulogne-sur-Mer, et là personne n'a rien vu venir. Accident ou incident, les mytiliculteurs auraient dû porter plainte contre X. »Thèse de l'incidentEn invitant les professionnels à se lancer dans une telle procédure, à une fin première de protection, Serge Dallet ne veut pas pour autant pointer du doigt les travaux d'investigation de l'Ifremer (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer). « Je pense qu'une enquête diligentée par la justice et des analyses complémentaires apporteraient la réponse à ce qui reste pour le moment un véritable mystère. »Quant à l'avenir, qu'il estime difficile pour l'ensemble de la profession, Serge Dallet livre une dernière suggestion : « Le naissain, qui est en train de se refixer dans la baie, doit tenir pour sauver le métier. Si c'est bien le cas, ce que je souhaite, cela privilégiera ma thèse de l'incident ou de l'accident. »Yannick Picard