Bien, vous savez de quoi je vais parler, puisqu'il m'a été demandé de faire étalage de ma fabuleuse érudition.
Les livres de ma vie étudiante (ça tombe bien, j'ai été étudiant)
Alors là, vous vous attendez à ce que je vous sorte Xénophon et Tite-Live. Presque.
Le grillon du foyer (Dickens, bande de nazes). Evidemment, c'est pas vraiment un livre pour les grands. J'avais trouvé cette petite édition Nelson, avec sa couverture blanche ornée de motifs art déco, je ne sais plus où.
Ce dont je me souviens : l'histoire simple et poétique m'a beaucoup marqué, un livre que j'ai relu souvent. L'histoire commence par la bouilloire de Madame Peerybingle qui chantonne... Un conte de Noël, la naïveté de l'enfance...
L'anecdote inutile : vous parler de ça ici étant particulièrement inutile de toutes les manières, je passe à quelque chose de plus intéressant.
Mes études d'histoire m'ont amené à lire beaucoup de livres ; la découverte de ce qu'est réellement le métier d'historien ne peut que changer de manière radicale la conception du monde, et amène à des processus de réflexion insoupçonnés.
Si je ne devais en garder qu'un, ce serait Clovis, de Michel Rouche, d'une érudition époustouflante. Mais bon, c'est un peu le spécialiste, quoi, un prof d'université comme on aurait aimé en avoir plus souvent.
Ce dont je me souviens : Clovis, c'est le chef de la tribu des francs, qui fait un peu n'importe quoi, déjà il se marie avec une Clotilde, ça craint deux prénoms presque pareils, puis il se convertit au christianisme sur un champ de bataille, comme s'il avait pas mieux à faire, et il suffit qu'un évêque lui dise dépose des colliers, fier sicambre, adore ce que tu as brûlé, brûle ce que tu as adoré (à l'époque on savait faire des discours qui avaient de la gueule), pour qu'il se mette à aimer l'art religieux tel qu'on le fabrique à Soissons. Et quand il est pas content, il fracasse la tête de ses soldats*.
L'anecdote inutile : sur la dédicace, l'auteur m'a écrit hommage... Le problème, c'est qu'on ne rend normalement des hommages qu'à une dame.
* je reconnais que je fais de la vulgarisation très très vulgaire ici. Qu'il me soit permis de m'autorectifier : après une bataille, à Soissons, selon la tradition germanique, on fait le partage du butin. Cependant, Clovis veut récupérer un vase liturgique afin de le rendre à l'évêque du coin, mais un soldat s'y oppose en frappant le vase ; au champ de mars suivant, c'est à dire au moment où les soldats se retrouvent pour partir en campagne militaire, Clovis, qui est un peu rancunier tout de même, retrouve ce soldat, constate que ses armes ne sont pas bien entrenues, les jette par terre, et pendant que le type les ramasse, lui fracasse le crâne. Nous voyons deux aspects ici du fonctionnement d'une tribu germanique du haut moyen-âge : l'équité lors du partage, mais aussi l'autorité absolue du chef de guerre qui, tant qu'il est reconnu comme tel, a le droit de vie et de mort sur ses soldats, car il les entraîne à la victoire. La semaine prochaine je vous expliquerai pourquoi les épées mérovingiennes - qu'on a retrouvées intactes - étaient si redoutées.