Le mardi au sein de cette rubrique vous allez découvrir dix portraits de pères. Des gens différents, des situations différentes, des galères, des joies, des concessions et du bonheur aussi. Merci à eux.
Rencontre avec Christian, 47 ans (Grenoble), papa de Samuel 21 ans.
Oui tardivement c’est le mot. J’ai connu la maman de Samuel à 26 ans, suite à notre liaison amoureuse elle est tombée enceinte. La relation était compliqué surtout avec la belle-famille. On m’a mis à l’écart de la grossesse, j’ai pensé qu’elle avait avorté, j’ai même rencontré des mois plus tard un membre de la famille m’annonçant la chose. J’étais soulagé au final. Je regrette surtout cette mise à l’écart de l’époque. Bref.
Elle met au monde un enfant, ton enfant, tu vas apprendre la chose 11 ans plus tard !
Oui 11 ans plus tard. Sur une connerie, un hasard. Sans le savoir la maman de Samuel et moi avions une amie commune. Le monde est petit c’est l’expression. Sans rentrer dans les détails j’ai appris qu’elle avait un enfant de 11 ans. J’ai pas mis longtemps pour faire le lien même si au fond je ne voulais pas y croire. Durant plusieurs mois j’ai tenté de reprendre contact, via l’amie commune. Elle avait changé de région, de vie, un homme dans sa vie… bref après plusieurs tentatives j’ai enfin réussi à rentrer en contact avec elle.
Première rencontre avec l’enfant suite à cette prise de contact ?
Oh que non ! Prise de contact houleuse. Je n’avais rien à faire dans sa vie, je ne m’étais pas manifesté (moi j’étais sur l’info qu’elle avait avorté), bref une sensation d’exclusion très forte face à cette grossesse. Notre amie commune a fait beaucoup pour que la situation et le lien puisse perdurer. Par la suite j’ai appris qu’elle avait rencontré son compagnon pendant sa grossesse. Comble du malheur, de l’horreur ou j’en sais rien, on a fait croire à cet enfant que ce nouveau était le père… je te laisse imaginer. La situation était de pire en pire j’ai demandé un test de paternité pour faire valoir mes droits.
Et… ?
J’ai laissé tomber par connerie ou par peur j’en sais trop rien. J’ai pensé au gamin et au choc. J’ai gardé le lien durant quelques années afin de savoir ce qu’il devenait. Suite à la pression familiale du côté de la maman et de ma présence, Samuel a connu la vérité. Il avait 15 ans. Depuis nous sommes un peu des étrangers, je crois qu’il m’en veut beaucoup de cet abandon. Depuis deux ans la situation semble s’apaiser, c’est la première fois que nous sommes partis en vacances à deux d’ailleurs. Il comprend mieux la situation, je crois qu’il marche sur un fil pour ne pas brusquer sa mère ni casser le lien avec son « faux » père.
Tu as une certaine amertume de cette histoire ?
Je garde juste l’amertume de cette exclusion définitive et obligatoire. J’ai bien conscience que le corps appartient à la mère et c’est elle qui met au monde, mais on m’a écarté de cette grossesse, on a menti à un enfant. Ouais je garde une amertume, une cicatrice profonde, comme une obligation de fermer ma gueule tu vois.